Les dernières données de l’Observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT) sur la consommation d’alcool et ses conséquences sanitaires en France confirment des évolutions de long terme, et notamment une baisse de la plupart des indicateurs liés à la vente et à l’usage d’alcool, portées par les nouvelles générations d’adultes.
Selon le rapport de l’OFDT sur l’année 2023, publié le 27 novembre, les volumes d’alcool pur mis en vente sont en effet en recul de 3,8 % par rapport à 2022, pour s’établir à une moyenne de 10,35 litres par habitant âgé de plus de 15 ans. Cette baisse « s’inscrit dans une tendance longue » enclenchée « depuis les années 60 », explique au Quotidien Marc-Antoine Douchet, chargé d’étude à l’OFDT et auteur du rapport.
La baisse des ventes est principalement portée par le déclin des volumes de vins (− 4,2 % entre 2022 et 2023), qui reste la catégorie de produits la plus consommée (52 %). Ce recul se réalise au profit de la consommation de bières, passée devant celle des spiritueux depuis 2018. Ces constats illustrent un « changement dans les comportements » des Français, souligne Marc-Antoine Douchet.
Des usages en recul dans toutes les générations
Les niveaux d’usage sont également en baisse dans la population aussi bien chez les jeunes que chez les adultes et quel que soit l’indicateur regardé : expérimentation, usages dans l’année, par semaine ou par jour. Cela se traduit notamment par une baisse significative (−7,5 % par rapport à 2022) du nombre de personnes tuées dans des accidents mortels impliquant l’alcool.
La mesure de la prévalence, par l’étude Eropp (enquête sur les représentations, opinions et perceptions sur les psychotropes) de l’OFDT, est une nouveauté de ce rapport, les précédentes données étaient celles du Baromètre de Santé publique France, dont le dernier remonte à 2021. Chez les adultes, la diminution la plus marquée concerne la consommation quotidienne (−13 % entre 2021 et 2023).
Les usages sont « systématiquement plus répandus chez les hommes que chez les femmes », avec un gradient en termes de fréquence et d’intensité, indique Marc-Antoine Douchet. « Les niveaux d’expérimentation sont similaires entre les sexes mais plus la fréquence d’usage ou l’intensité (alcoolisation ponctuelle importante [API]) sont importantes, plus l’écart tend à s’accroître », poursuit-il. Sur le long terme, un rapprochement des comportements d’alcoolisation entre les hommes et les femmes est néanmoins observé.
La normalisation de l’alcool persiste
Un gradient lié à l’âge témoigne aussi des évolutions en cours. Avec l’avancée en âge, les usages correspondent à une consommation dite méditerranéenne avec des prises quotidiennes, en petites quantités. Dans les classes d’âge plus jeunes, le mode de consommation est plus proche du modèle nordique avec une fréquence plus faible, mais des quantités plus importantes.
Chez les jeunes de 17 ans, les indicateurs sont également tous à la baisse. Entre 2017 et 2022, le recul de l’usage quotidien s’élève à 31 %, et celui de l’usage dans le mois à 14 %. Quant aux API mensuelles, elles concernent près d’un tiers des jeunes, mais diminuent (−16,8 % par rapport à 2017). L’expérimentation est aussi en déclin, même si 4 jeunes sur 5 ont déjà consommé de l’alcool. « Ce que montrent les enquêtes qualitatives, c’est la persistance de la normalisation de l’alcool, qui reste la seule drogue expérimentée en famille dans un cadre festif », souligne Marc-Antoine Douchet, qui précise que l’alcool « reste un produit au centre des sociabilités juvéniles ».
Hausse des hospitalisations en lien avec l’alcool
Autre enseignement de ce rapport, la baisse de la consommation ne se traduit pas encore par un recul des hospitalisations, les conséquences sanitaires de l’alcool pouvant prendre des années, voire des décennies, à produire leurs effets.
Les hospitalisations en lien avec l’alcool progressent donc : + 4,1 % de séjours et + 2,5 % de patients en 2023 par rapport à l’année dernière. Les patients concernés sont en majorité des hommes (73 %) âgés en moyenne de 56 ans. Les séjours liés à l’alcoolodépendance (où l’alcool est le problème de santé ayant motivé l’admission) représentent 41 % de l’ensemble, contre 59 % pour un diagnostic en comorbidité. Depuis une décennie, les hospitalisations motivées par des intoxications alcooliques aiguës reculent, tandis que celles en lien avec la dépendance et le sevrage progressent. Ces derniers comptent pour 22,4 % des hospitalisations liées à l’alcool.
Cette hausse des hospitalisations peut être le reflet de tendances de fond, notamment dans le système de soins, avance Marc-Antoine Douchet. « La façon dont les professionnels renseignent et codent l’alcool, y compris quand il est présent comme comorbidités, évolue : dans les pratiques professionnelles, l’alcool est peut-être plus souvent mentionné ».
En parallèle, au sein de la file active des centres de soins, d’accompagnement et de prévention en addictologie (Csapa), près de la moitié des quelque 150 000 patients (49,6 %) sont pris en charge pour un problème d’alcool. Cette patientèle est principalement composée d’hommes (77 %). Le nombre de bénéficiaires d’un traitement pour alcoolodépendance est par ailleurs stable : l’utilisation de l’acamprosate, du nalméfène et de la naltrexone est en hausse, tandis que celle du disulfirame et du baclofène baisse.
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