Usage récréatif du protoxyde d’azote, l’Anses tire la sonnette d’alarme

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Publié le 09/07/2020

Crédit photo :  imageBROKER / Adobe Stock

« L’inhalation du protoxyde d’azote, n’est pas sans risque, des atteintes neurologiques sévères pouvant en résulter ». Alors que l’usage détourné de ce "gaz hilarant" est en vogue en raison de son effet euphorisant, lAgence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) alerte sur l’augmentation du nombre d’intoxications observées notamment chez les jeunes. Et appelle à renforcer la réglementation « avant que cette pratique ne se développe encore davantage ».

Selon le rapport d’étude de toxicovigilance conduit par l’Anses, sur la base des données des Centres antipoison (CAP), 66 intoxications au protoxyde d’azote ont été enregistrées par les CAP entre le 1er janvier 2017 et le 31 décembre 2019, les régions Hauts-de-France, Île-de-France et Occitanie étant les plus concernées. Plus de la moitié des usagers avaient entre 20 et 25 ans. Le gaz consommé était du protoxyde d’azote non médical, contenu dans des cartouches à usage alimentaire (pour siphon de chantilly notamment), disponibles en vente libre, et inhalé via des ballons.

Des symptômes neurologiques parfois graves

Sur les 66 cas recensés 59 étaient symptomatiques, les atteintes neurologiques et neuromusculaires étant les plus fréquentes (71,2 %). Sur 42 patients déclarant ce type de troubles, 73,8 % présentaient au moins un signe moteur ou sensitif à type de paresthésies, tremblements des extrémités ou douleurs musculaires. Quatre rapportaient des symptômes évoquant une neuropathie périphérique suite à une inhalation chronique. La moitié souffrait au moins d’un symptôme de type céphalées/vertiges/troubles de l’équilibre. Plus rarement des troubles de la conscience et du langage (2,4 % des cas) étaient rapportés.

Des signes généraux (22,0 %), digestifs (20,3 %) ou encore cardio-vasculaires (15,3 %) ont aussi été observés. Parmi les 59 cas symptomatiques, 40 étaient de gravité faible, 14 de gravité moyenne et 5 de gravité forte avec notamment un arrêt cardiaque sur cardiopathie préexistante mais non connue et deux cas de convulsions dont un avec coma.

Un usage en hausse

Autre motif d’inquiétude : sur les 66 cas d’intoxications signalés aux CAP, plus des deux tiers (46) concernaient l’année 2019 (contre 10 pour 2017 et pour 2018), ce qui « met bien en évidence l’augmentation des pratiques liées à l’inhalation du protoxyde d’azote ».

Alors que cet usage détourné était connu en milieu festif alternatif, « une extension est observée à d’autres contextes (soirées étudiantes, week-end d’intégration, festivals…) et à de nouveaux publics (collégiens et lycéens), s’inquiètent les auteurs du rapport. De plus, sont observés des cas de consommations répétées, voire quotidiennes, au long cours et en grande quantité, ainsi que des associations avec d’autres substances psychoactives responsables des cas les plus graves rapportés dans cette étude ».

Des tendances qui rejoignent les données des centres d’addictovigilance également rendues publiques aujourd’hui.

Dans ce contexte, « il apparait impératif de prévenir l’inhalation à visée récréative de protoxyde d’azote » estime l’Anses. L’agence appelle notamment à encadrer plus strictement la commercialisation du protoxyde d’azote à usage alimentaire et plaide pour une meilleure information des jeunes et des professionnels de santé sur les risques inhérents à ces pratiques. 

Vers une réglementation plus stricte ? 

Deux impératifs partagés, semble-t-il, en haut lieu. Dans un communiqué, la DGS rappelle en effet « qu’une proposition de loi déposée par la sénatrice Valérie Létard prévoit l’interdiction de vente aux mineurs de produits contenant du protoxyde d’azote et de la mise à disposition de ce gaz dans les débits de boissons permanents (bars, discothèques…) ou temporaires (ex. : soirées étudiantes). » Adopté en décembre au Sénat, le texte était depuis resté lettres mortes. Mais « des propositions pour compléter ce cadre seront intégrées lors de la poursuite de l’examen de la proposition de loi ».

Par ailleurs, une campagne d’information et de réduction des risques à destination des acteurs de terrain a été « lancée il y a quelques jours par la Mildeca », indique la DGS. De plus, en juillet/août, la campagne "Un été sans souci", qui vise à prévenir les risques pour la santé liés à la période estivale, « intégrera des recommandations de prévention de la consommation de protoxyde d’azote et orientera vers le dispositif d'aide et d’écoute Drogues-info-service ». 

En novembre 2019, la DGS avait déjà alerté, avec la Mildeca et l’OFDT, sur les dangers de cette pratique, même occasionnelle.

 

 

 

 


Source : lequotidiendumedecin.fr