L’essai de phase 2b Aster porté par les National Institutes of Health (NIH) américains suggère que le paracétamol en injection intraveineuse pourrait prévenir le risque de syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA) et de lésions d’organes dans le sepsis.
Le plus grand bénéfice était retrouvé pour les patients les plus sévèrement atteints. En revanche, il n’a pas montré son efficacité dans la réduction du taux de mortalité ni du recours à la ventilation mécanique (critères principaux de jugement), bien qu’une légère baisse ait été observée chez les patients à risque.
Les auteurs de cette étude publiée dans le Jama ont de plus pointé l’intérêt d’un biomarqueur sanguin, le niveau d’hémoglobine acellulaire, pour détecter à leur admission les patients qui pourraient bénéficier d’un traitement par paracétamol. En effet, un taux élevé d’hémoglobine acellulaire circulant est caractéristique d’un sepsis chez la majorité des patients et indépendamment associé avec la progression de la défaillance d’organes, comme le SDRA par exemple, et la mortalité.
« Nous espérons que ces résultats souligneront la valeur thérapeutique potentielle de l'utilisation d'un biomarqueur pour aider à trouver un traitement efficace au moment où les patients en ont le plus besoin », commente le Pr Michael Matthay, auteur principal de l’étude, relevant que les patients se dégradent rapidement en soins intensifs sans laisser le temps d’utiliser des biomarqueurs pour déterminer le traitement le plus adéquat.
Un foyer infectieux pulmonaire dans 44 % des cas
Cette étude multicentrique en double aveugle a inclus 477 patients adultes avec un sepsis et une dysfonction des organes respiratoires ou circulatoires admis en soins intensifs dans les 36 heures après avoir déclaré un sepsis. Les patients avaient en moyenne 64 ans, étaient à 51 % des femmes et avaient un score SOFA (Sequentiel Organ Failure Assessment) moyen de 5,4 ; le foyer d’infection initial était pulmonaire (environ 44 % du groupe) et 9 % de la cohorte avaient été infectés par le Covid-19 + dans les trois semaines précédant l’inclusion. Les participants étaient randomisés pour recevoir, soit du paracétamol en intraveineuse (IV) à la dose de 1 g toutes les 6 heures pendant 5 jours (n = 227), soit le placebo selon le même schéma posologique (n = 220).
L’objectif était de déterminer si le paracétamol pouvait augmenter le nombre de jours vivants et sans défaillance d’organes dans le sepsis, par rapport au placebo. Le critère secondaire était d’évaluer l’effet du paracétamol en fonction du taux d’hémoglobine acellulaire à l’inclusion afin d’apprécier son intérêt pronostique. Les scientifiques ont également réalisé une analyse spécifique sur les patients présentant un niveau élevé d’hémoglobine acellulaire. Les patients ont ensuite été suivis durant 28 jours.
Le critère de jugement principal était le nombre de jours en vie et sans assistance d’organe (ventilatoire, rénale, vasopresseurs) à 28 jours. Les critères de jugement secondaires étaient au nombre de 15, comprenant les lésions organiques, le risque de SDRA dans les 7 jours suivant l’inclusion, la mise en place d’une dialyse… La modification de l'effet du traitement a été évaluée pour le paracétamol par des taux d'hémoglobine plasmatique acellulaire supérieurs à 10 mg/dl avant la randomisation (44 % des patients).
Des bénéfices à confirmer
Ainsi, l’équipe a retrouvé des taux de survie et d'absence de défaillance d’organe au 28e jour non significativement différents pour le paracétamol (20,2 jours) par rapport au placebo (19,6 jours). Parmi les 15 critères secondaires, les scores SOFA totaux, respiratoires et de coagulation étaient significativement plus bas à J2 à J4 dans le groupe paracétamol, tout comme le taux d’apparition d'un SDRA dans les 7 jours (2,2 % pour le paracétamol versus 8,5 % pour le placebo). Les patients du groupe paracétamol avaient moins besoin de ventilation que ceux du groupe placebo. Les autres critères secondaires n’étaient pas significativement différents dans les deux bras.
Le paracétamol a été bien toléré par tous les patients ayant un sepsis comparés au groupe placebo. Enfin, 8 % des patients dont les taux d’hémoglobine acellulaire étaient élevés dans le groupe paracétamol ont eu besoin d’une assistance contre 23 % dans le groupe placebo. « Bien que les effets escomptés du traitement par paracétamol ne se soient pas concrétisés pour tous les patients atteints d’un sepsis, cette étude montre qu'il reste prometteur pour les patients les plus graves, a conclu le Dr James Kiley, directeur de la division des maladies pulmonaires au National Heart, Lung, and Blood Institute des NIH. Cependant, des recherches sont nécessaires pour découvrir les mécanismes à l’œuvre et valider ces résultats ». Les auteurs ont déclaré souhaiter commencer un nouvel essai clinique incluant les patients avec les taux d’hémoglobine acellulaire élevés.
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