Recadrant la pratique de la téléconsultation – largement dérégulée pendant la crise Covid – l’avenant 9 à la convention médicale prévoyait aussi la publication d’une « charte de bonnes pratiques » à destination des confrères. C’est chose faite. L’Assurance-maladie, les syndicats signataires et l’Ordre des médecins ont mis en ligne un document de dix pages reprenant les principes d’une téléconsultation réussie.
« L’objectif de cette charte est de faire connaître aux médecins les recommandations et obligations essentielles au regard de la pratique de l’activité à distance », souligne la Cnam. Le document, en accès libre sur le site Ameli, condense des recos en termes de matériel informatique, de sécurité des données, de consentement du patient et d'exigences déontologiques.
Pas d'exercice exclusif
À toutes fins utiles, la Cnam rappelle ce que l'Ordre martelait déjà depuis l’été face aux demandes de certains praticiens d’exercer à 100 % à distance : « la pratique de téléconsultation ne peut être un exercice exclusif au regard de la pratique médicale et de la déontologie ». Et ce malgré les appels du pied des plateformes commerciales, l’Ordre ayant déjà indiqué de son côté avoir entamé de nombreuses plaintes à leur encontre. « La pratique exclusive de la téléconsultation génère, si elle est durable, une perte d’expérience clinique susceptible de placer le médecin en situation d’insuffisance professionnelle », argumente la charte.
À cet effet, l’avenant 9 a prévu que les médecins ne pouvaient réaliser plus de 20 % de leur volume d’activité globale conventionnée à distance – téléconsultations et téléexpertise comprises. « Le seuil est calculé par année civile, soit du 1er janvier au 31 décembre » et « par médecin libéral selon son activité globale, au titre de l’activité libérale conventionnée de l’ensemble des cabinets où il exerce (principaux et secondaires) », précise la Cnam.
Risques de récupérations d'indus
Cette limitation de pratique à distance est entrée en vigueur en avril 2022. À noter qu'entre janvier et décembre 2021, environ 3 % des généralistes avaient déjà dépassé ce plafond de 20 %, de même que 15 % des psychiatres, 8 % des allergologues et 5 % des endocrinologues, selon des chiffres présentés le 23 mars en commission paritaire nationale (CPN). Les médecins qui ne se plient pas à ce quota s’exposeront « à la récupération des sommes indûment versées, dans le respect du contradictoire, après avertissement du professionnel », met en garde l’avenant.
Pour éviter les mauvaises surprises, la Cnam prévoit de mettre en place l’affichage du taux d’activité à distance, pour chaque médecin, sur Amelipro. Elle enjoint également les plateformes à respecter ce seuil maximal, faute de quoi « les téléconsultations ne respectant pas ce cadre ne pourront donner lieu à prise en charge par l’Assurance-maladie ».
Le parcours de soins … sauf exceptions
Second avertissement en forme de rappel à l'ordre : la charte rappelle que la téléconsultation doit « toujours » s’inscrire « dans le respect du parcours de soins coordonné, ce qui suppose, si le médecin téléconsultant n’est pas le médecin traitant, une orientation initiale du patient par ce dernier ».
Toutefois, la Cnam rappelle plusieurs exceptions pouvant conduire à une prise en charge hors parcours de soins : si le patient n’a pas de médecin traitant, si ce dernier n'est pas disponible dans un délai compatible avec l’état de santé du patient, en cas d’urgence ou pour les patients détenus. Dans ces cas, « une téléconsultation de proximité peut être proposée au patient dans le cadre d’une organisation coordonnée territoriale de télémédecine », via une CPTS ou une MSP par exemple. À défaut, une prise en charge en dehors du territoire peut être envisagée, uniquement pour les patients « résidant en zone caractérisée par une offre de soins insuffisante », précise la charte.
La Cnam met à nouveau l’accent sur le principe de territorialité des consultations à distance. « Le médecin téléconsultant doit se situer à proximité du domicile du patient. Cette proximité permet d’assurer un suivi régulier de l’état de santé de ce dernier et d’organiser une consultation en présentiel si celle-ci s’avère nécessaire », est-il mentionné. Mais là encore, il y a des exceptions puisque cette territorialité ne s’applique pas aux zones classées sous-denses – zones d'intervention prioritaire (Zip) – ou aux patients n’ayant pas de médecin traitant.
Vigilance des praticiens démarchés
Attention, la charte ne délivre aucun blanc-seing à ces dérogations, dans lesquelles pourraient s’engouffrer les plateformes. Elle rappelle que « les sociétés d’offre de téléconsultation sont tenues d’orienter prioritairement les patients qui les consultent vers des praticiens pouvant les recevoir dans des délais adaptés en proximité de leur résidence ».
En guise de conclusion, la charte invite les praticiens démarchés par les opérateurs et plateformes à « faire preuve de vigilance ». La Cnam met en garde contre les « publicités commerciales », qui pourraient faire croire que la population peut avoir accès à la téléconsultation, partout, tout le temps, en faisant fi du parcours du soin.
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