Le gouvernement en arbitre de la rivalité hospitalière

Aux assises des CHU, Touraine salue le public mais lui demande des efforts

Publié le 10/12/2012
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Crédit photo : AFP

« Injustifiées et improductives » : c’est ainsi que Marisol Touraine, en déplacement jeudi à Bordeaux, a qualifié les « attaques » dont l’hôpital a été la cible ces dernières années.

Dans la ligne de mire de la ministre, l’ancien gouvernement, mais aussi les cliniques, qu’elle appelle séance tenante à baisser d’un ton. « Je ne crois pas que ce soit l’intérêt du privé de mettre en accusation le service public », a-t-elle lancé. Son absence aux journées de la FHP (lire ci-dessous) ? Peut être une façon d’enfoncer le clou - elle n’a pas souhaité s’en expliquer.

Pacte social.

Le discours prononcé devant les responsables de CHU - directeurs généraux, doyens et présidents de CME - s’est voulu flatteur et aiguillon à la fois. Les 32 CHU (20 millions de consultations par an, 319 000 salariés, 25 milliards d’euros de budget et un déficit prévisionnel de 300 millions fin 2012, en baisse pour la 3ème année consécutive), sont « l’un des piliers de notre pacte social », a lancé Marisol Touraine. Qui appelle la fine fleur hospitalière du pays à d’importants changements. Décloisonnement, parcours de soins, coopérations... Autant de mots clés répétés à chaque table ronde. Tout l’enjeu, résume Alain Hériaud, président de la Conférence des DG de CHU, consiste à conserver l’excellence sans sombrer dans le conservatisme.

Pour Marisol Touraine, les CHU ont une responsabilité territoriale. Les postes d’assistants partagés? « Trop peu partagés ». Pris « dans les filets des CHU ». Les hôpitaux universitaires sont conviés à lâcher du lest en matière de formation : la ministre souhaite porter à 100% les stages en médecine générale ambulatoire dès la rentrée 2013 (contre 75% aujourd’hui).

Avec les médecins de ville.

La contribution des CHU à la lutte contre la désertification médicale passera aussi, c’est du moins l’idée de la ministre, par la création de maisons de santé universitaires. Le Pr Guy Moulin, président de la Conférence des présidents de CME de CHU, et président de la CME de l’AP-HM, acquiesce : le service public hospitalier peut aider au retour de l’Etat « dans des zones désertées par l’Etat lui même », fait-il valoir. L’AP-HM s’apprête justement à sortir de ses murs pour aider au fonctionnement de structures en projet dans des quartiers défavorisés. Pour l’heure, la France compte une seule maison de santé universitaire labellisée, à Coulommiers. Un projet est également à l’étude à Avoine, en Indre-et-Loire. « Notre souhait est de travailler avec les médecins de ville », précise le Pr Dominique Perrotin, président de la Conférence des doyens, et doyen à Tours. Le Pr Perrotin estime que l’enseignement à la faculté doit lui aussi prendre un virage, afin de valoriser davantage l’esprit collectif et la capacité à prendre les bonnes décisions. L’existence des deux concours sont à ses yeux un frein aux évolutions en cours du système de santé.

Alain Hériaud a pour sa part insisté sur la nécessaire institutionnalisation des relations entre la ville et l’hôpital - à Bordeaux par exemple un comité de liaison regroupant les gériatres du CHU et les médecins libéraux permet d’éviter des hospitalisations inutiles, tout en facilitant les retours à domicile.

Marisol Touraine a pris acte des 15 propositions formulées par les trois Conférences. Avec l’espoir que les belles paroles ne resteront pas creuses. « Les CHU ont un rôle important à jouer contre les déserts médicaux », a-t-elle insisté.

 DELPHINE CHARDON

Source : Le Quotidien du Médecin: 9203