Honoraires : la CNAM se défend d'avoir oublié les spécialistes

La nouvelle convention, signée par trois syndicats (MG France, FMF et Le BLOC), ne se contente pas de revaloriser la médecine générale, explique aujourd'hui la CNAM en riposte aux centrales polycatégorielles qui l'ont accusée d'avoir totalement négligé les spécialités.  

Certes, les médecins de famille bénéficieront d'une hausse de deux euros sur leur consultation de base en mai 2017 et d'un bonus total annuel estimé à 16 000 euros de recettes en secteur I. Mais selon les projections de l'assurance-maladie, que « le Quotidien » révèle en exclusivité, les médecins spécialistes verront eux aussi leur chiffre d'affaires augmenter significativement en régime de croisière, certes dans des proportions diverses selon la discipline et le secteur d'exercice (voir le détail des gains par spécialités).

Pas d'impasse, clame la CNAM

L'assurance-maladie a ainsi calculé le montant des honoraires supplémentaires (recettes avant toutes les charges) versés aux spécialistes par ses soins et par les complémentaires en année pleine, et à activité constante. Ces rémunérations seront effectives lorsque toutes les revalorisations programmées s'appliqueront : hausses de l'acte de consultant de 46 à 48 puis 50 euros (la dernière hausse en juin 2018), majoration de coordination MCS de 3 à 5 euros, nouvelles consultations complexes (46 euros) et très complexes (60 euros), actes d'urgence, hausse des indicateurs J et K des chirurgiens, forfait structure…

La facture totale (en dépenses remboursables) est loin d'être anecdotique. « L'impact global des revalorisations des médecins spécialistes sera en année pleine de 437,4 millions d'euros sur le 1,318 milliard d'investissement, ce qui représente une part non négligeable de 33,2 % du total », confie le directeur de la CNAM, Nicolas Revel. « La convention n'a jamais eu pour but exclusif de revaloriser la médecine générale seule, même si cela a été une priorité, poursuit-il. Nous avons assumé des choix mais les chiffres démontrent qu'il n'y a pas eu d'impasse sur les spécialités. »

Les cliniciens favorisés

Toujours selon la caisse, la nouvelle convention aura un impact plus significatif pour les « cliniciens », au bas de l'échelle des revenus. Pédiatres, endocrinologues, dermatologues ou neurologues toucheront entre 9 000 et 16 000 euros par an supplémentaires (avant charges) en secteur I ou CAS. La hausse des modificateurs J et K bénéficiera en revanche aux plateaux techniques lourds (chirurgiens et obstétriciens) mais le niveau de leurs dépassements devrait se restreindre. Spécialistes médico-techniques, les cardiologues, gastroentérologues et ophtalmologues percevront un surcroît de rémunération compris entre 5 000 et 7 500 euros.

Ces projections n'ont pas suffi à convaincre la CSMF et le SML de signer la convention cet été. Le SML, qui a rejeté l'accord à 95 %, avait fustigé la « discrimination du secteur II ». L'UMESPE, branche spécialiste de la CSMF, avait regretté la mise en place de « mesures de valorisation très dissymétriques et, donc, difficilement acceptables entre les spécialités ». « L’élaboration de cette convention va conduire, inévitablement, à opposer les secteurs I et II, les généralistes et les spécialistes, les spécialités médicales et médicotechniques », analyse toujours son président, le Dr Patrick Gasser.

S'il ne nie pas que la convention comporte des avancées tarifaires, le leader syndical regrette que la hiérarchisation des consultations ait été dénaturée. Et il redoute que certaines spécialités subissent une baisse d'activité à l'instar des pédiatres avec le médecin traitant de l'enfant. Surtout, la moindre revalorisation des spécialités techniques, dont le poids est très important à la CSMF, a pesé lourd dans le refus de cette centrale de porter l'accord.

* Ce chiffre intègre les 60 millions des nouvelles options de modération tarifaire OPTAM et OPTAM-CO.