Prévention et santé publique

Rentrée chaotique pour les médecins scolaires

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Publié le 16/09/2022
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En baisse constante, les effectifs de médecins de l'Éducation nationale ne leur permettent plus d'assurer l'intégralité de leurs missions. Des solutions de secours sont nécessaires.

Crédit photo : Phanie

Année après année, les syndicats de médecins scolaires alertent sur la dégradation de leurs conditions de travail et même l'impossibilité d'assurer leurs missions, une situation illustrée par divers rapports publics dont celui de la Cour des comptes en 2020. Le ministère de l'Éducation nationale attend un nouvel état des lieux de son inspection générale, qui doit être rendu prochainement.

Mais en attendant, « pour cette rentrée nous étions à moins de 700 médecins de l'Éducation nationale (en ETP) », se désole la Dr Jocelyne Grousset, co-secrétaire générale du Syndicat national des médecins scolaires et universitaires (SNMSU, majoritaire, rattaché à Unsa Éducation). De maigres effectifs censés suivre plus de 12 millions d'élèves, collégiens et lycéens. Le ministère recensait de son côté officiellement 836 médecins scolaires et 103 médecins conseillers techniques, au 1er février 2020.

« Il y a de plus en plus de départements sans médecins conseillers techniques donc sans pilote de la santé scolaire, souligne la Dr Grousset. Il y a une détérioration réelle alors que la santé des élèves nécessiterait une attention toute particulière. » Il y a deux ans, la Cour des comptes estimait que le taux de réalisation de la visite obligatoire à la sixième année de l’élève, examen clé qui permet souvent le dépistage des troubles du langage et de l'apprentissage, avait chuté de 26 % en 2013 à 18 % en 2018. Un taux encore plus bas aujourd'hui selon la profession, qui l'estime à 10 % ou moins. La situation est d'autant plus difficile que le chef de l'État mise sur l'école pour impulser une nouvelle culture de la prévention avec la généralisation des diagnostics. 

Centre de santé au secours

Dans ce contexte, des solutions sont cherchées tous azimuts pour pallier la pénurie. En Seine-Saint-Denis, à la Courneuve, ville où il n'y a plus aucun médecin scolaire, ce sont les praticiens… du centre de santé municipal qui assurent désormais les missions de prévention et de dépistage dans les écoles, où sont scolarisés quelque 10 000 enfants. Sur les 57 postes de praticiens de l'Éducation nationale ouverts en Seine-Saint-Denis, seuls 17 sont pourvus. Six professionnels du centre de santé se relaient pour assurer un équivalent temps plein en médecine scolaire – l'Éducation Nationale versant à la municipalité l'équivalent d'un salaire complet.

Dans son rapport de 2020, la Cour des comptes proposait plusieurs pistes de réforme. Outre l'urgence « d'améliorer l'attractivité » de la médecine scolaire en valorisant les salaires et en diminuant la charge administrative, elle appelait à décloisonner les métiers d’infirmier et de praticien pour favoriser le travail en équipe. Elle suggérait aussi de créer un service de santé scolaire dans chaque rectorat et chaque direction départementale, capable de contractualiser avec d'autres institutions, ou de créer une articulation avec la médecine de ville ou hospitalière pour le dépistage de la sixième année. 

54 postes, 16 admis

Depuis cet audit, le ministère de l'Éducation nationale assure avoir fait un « effort réel » sur les rémunérations* et mené des actions pour faire connaître la médecine scolaire aux carabins. Une formation de spécialité transversale (FST) a été ouverte pour les internes de médecine générale, de pédiatrie et de santé publique. Malgré ces mesures, on ne se bouscule pas. Cette année, sur les 54 postes ouverts au concours de médecin de l’Éducation nationale, 19 candidats admissibles se sont présentés et 16 ont été admis…

Enfin, dans le cadre de la loi dite « 3DS » sur la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et la simplification de l'action publique locale promulguée en février 2022, un rapport du gouvernement est attendu sur le transfert de la médecine scolaire aux départements. Une énième solution qui, malgré l'urgence, ne ravit pas forcément la profession.

Exemples (hors indemnités) : 2 137 euros brut au grade de médecin de l'Éducation nationale deuxième classe (premier échelon) ; 3 102 euros brut en première classe (premier échelon) ; 3 243 euros au grade de médecin de l'Éducation nationale-conseiller technique (groupe III, premier échelon)   

Marie Foult

Source : Le Quotidien du médecin