Un an après le suicide d'un interne, ses parents demandent la sanction disciplinaire d'un chef de service

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Publié le 01/03/2021

Crédit photo : PHANIE

Un an après le suicide de Florian Rodaro, interne en anesthésie-réanimation de 27 ans en deuxième année d'internat au CHU de Reims, ses parents ont porté plainte auprès de l'Ordre départemental des médecins, indique France Bleu.

Le grief vise un chef de service de l'hôpital de Troyes. Le couple reproche essentiellement à ce médecin d'avoir eu « un comportement blessant à l'égard de leur fils qui aurait contribué en partie à cette décision de mettre fin à ses jours », relate au « Quotidien », Emmanuel Ludot, avocat de la famille. Une conciliation organisée en septembre 2020 par la chambre disciplinaire départementale de l'Ordre a échoué. Cette instance doit décider, d'ici à quelques semaines, de transmettre ou non le dossier à la chambre disciplinaire de l'Ordre régional des médecins.

Tandis qu'une enquête pénale, confiée au service régional de police judiciaire (SRPJ) de Reims, est en cours, Me Ludot assure qu'il y a eu des signaux avant le geste fatal. Les parents de Florian, tous deux médecins, avaient reçu des mails de leur fils expliquant que « le chef de service avait mis en place des scènes blessantes ». « Il obligeait le jeune Florian à refaire, en présence des patients et des autres internes, des gestes malheureux pour lui montrer qu'il ne fallait faire cela. C'est un comportement pervers que le jeune homme avait très mal vécu », ajoute Me Ludot. La famille, qui ne veut pas faire de ce procès « celui des chefs de service », souhaite à tout le moins « une sanction symbolique de l'Ordre. Un blâme suffirait », dit-il.

Pour Me Gérard Chemla, l'avocat de la défense, « aucun élément ne permet de raccrocher le suicide avec le stage. Alors que ce jeune homme s'est mal comporté et qu'il a été rappelé à l'ordre ». « À ce stade, je n'ai pas de trace d'élément écrit qui dit que le conseil départemental de l'Ordre a transféré la plainte », ajoute-t-il au « Quotidien ».

Cellule d'alerte et délit spécifique

Touché par la multiplication des suicides d'internes ces derniers mois, l'avocat rémois a  rédigé une proposition de loi afin de compléter le code de la santé publique et le code pénal. Car selon lui, « les conclusions du rapport du Dr Donata Marra sur la qualité de vie des étudiants en santé (à l'origine de la création du Centre National d'appui, NDLR), se révèlent insuffisantes ».

Le texte, qui a été déposé à l'Assemblée nationale par le député de l'Essonne (Debout la France) Nicolas Dupont-Aignan, suggère de créer « une cellule d'alerte chargée de recueillir nommément ou anonymement toutes informations relatives à des difficultés psychologiques, comportements suicidaires d'étudiants en santé et internes au sein de chaque hôpital public ou privé ». Le personnel encadrant les internes en médecine, chefs de service ou autres, seraient tenus de déposer mensuellement, auprès de cette cellule, « un rapport succinct faisant état d’éventuelles difficultés, de souffrances ou des comportements à risque des étudiants en santé et internes quels qu’ils soient ».

Un délit spécifique est aussi envisagé afin de punir (jusqu'à 6 mois d'emprisonnement et 7 500 euros d'amende) « tout personnel hospitalier encadrant, au cours de l’exercice de ses fonctions de formation, qui, par des paroles ou des actes, humilie, dégrade ou blesse un étudiant en santé ou un interne ».


Source : lequotidiendumedecin.fr