Covid long : l’ANRS-MIE sélectionne 18 recherches supplémentaires

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Publié le 27/06/2022

Crédit photo : S.Toubon

La prise en charge des patients atteints de Covid long représente encore un « challenge », selon le Dr Olivier Robineau, infectiologue au centre hospitalier de Tourcoing et coordinateur de l'action Covid long de l’ANRS – MIE (Agence nationale de recherche sur le sida, les hépatites virales et les maladies infectieuses émergentes), lors d'une présentation des recherches menées en France sur le sujet, ce 23 juin.

Si sa définition fait encore débat, « le phénomène existe », affirme le spécialiste. Les études en population générale font état de « symptômes plus fréquents » chez les patients qui ont été infectés par le Sars-CoV-2 par rapport à ceux qui ne l’ont pas fait, ajoute-t-il. Mais évaluer la prévalence reste complexe. « Il faudrait déjà qu’on ait une valeur fiable du nombre de personnes qui ont fait le Covid », souligne le Dr Robineau. Les modélisations peuvent aider, mais cette donnée reste difficile à obtenir sans dépistage systématique.

Une prévalence encore difficile à établir

Une autre difficulté, d’ordre médical, relève de la diversité des symptômes, qui « pris isolément, sont peu spécifiques », précise l’infectiologue, soulignant des risques de surattribution ou à l’inverse de sous-attribution. « Certains patients ne se savent pas atteints de Covid long », complète Faustine Hélie, cofondatrice de l'association de patients sur le Covid long, #AprèsJ20. Elle pointe notamment un « manque de communication » vers les patients, malgré les bénéfices qu’aurait un recensement précis des cas pour orienter la recherche et la prise en charge.

L’estimation de la prévalence dépend de la définition du Covid long. Une récente estimation britannique, retenant comme définition la persistance de symptômes à un mois, établit qu’« autour de 2 millions de Britanniques ont eu ou ont un Covid long », indique le Dr Robineau, soulignant qu’à un mois, « probablement 20 à 30 % » des patients sont concernés. Selon la définition de l’Organisation de la santé avec une persistance à deux moins, « c’est beaucoup moins », poursuit-il.

Au-delà des enjeux de définition, la compréhension du phénomène et de ses mécanismes reste également balbutiante. Après une effervescence de publications - séries de cas, points de vue, hypothèses, etc. -, « les articles vont se faire plus rares », mais seront désormais « de meilleure qualité », relève le Dr Robineau, rappelant que « la bonne recherche prend un certain temps ».

Environ 10 millions de financement pour 26 projets de recherche

En France, les études sur le Covid long sont coordonnées par l’ANRS, qui vient de sélectionner 18 nouveaux projets sur les 60 dossiers déposés pour la 2e phase de son appel à projets. En 2021, huit premières recherches avaient été retenues lors d’une 1re session. Ces recherches vont bénéficier d’un financement d’environ 10 millions d’euros au total. Elles couvrent l’épidémiologie, les causes physiopathologiques, la prise en charge thérapeutique, mais aussi les dimensions sociales et sociétales de cette affection.

Parmi ces projets, la cohorte CoroPreg de suivi de femmes et d’enfants exposés à une infection maternelle pendant la grossesse, lancée en 2020, se voit prolongée. Le risque de contracter une forme sévère de Covid est 8 % plus élevé chez les femmes enceintes par rapport aux autres femmes, rappelle la Dr Catherine Deneux-Tharaux, épidémiologiste, directrice de recherche à l’Inserm et co-investigatrice de la cohorte. L’impact à long terme pour la mère et l’enfant reste méconnu : une infection pendant la grossesse aura-t-elle des conséquences sur le développement cérébral de l’enfant ?, interroge l’épidémiologiste. Pour répondre, un suivi des couples mère-enfant sera effectué à deux ans et demi et à 4 ans.

Une prise en compte d’aspects non médicaux

Un autre projet se voit prolongé. Après la découverte, publiée dans « Nature Neuroscience », d’un effet direct du Sars-CoV-2 sur les vaisseaux sanguins du cerveau et d’un phénomène de mort cellulaire affectant les cellules endothéliales vasculaires cérébrales, les chercheurs vont explorer la piste de la mélatonine comme protection potentielle du système nerveux central et contre l’infection.

Un essai randomisé multicentrique (SPACO +) va également être lancé pour évaluer l’effet d’un parcours soin dédié pour les 40 ans et plus. Une autre étude s’intéressera aux impacts de long terme pour la physiologie et la fonction musculaire, à partir d’un modèle murin conditionnel humanisé. Une étude cas/témoins multicentrique prospective transversale se penchera sur la persistance du virus dans les muqueuses olfactives de patients ayant des symptômes prolongés avec plaintes neurocognitives.

Pour prendre en compte les aspects sociaux et sociétaux, une cohorte sera lancée dès septembre 2022 en médecine générale et en population générale sur la qualité de vie, l’évolution clinique et le recours aux soins. Le volet économique sera abordé dans une évaluation médico-économique des infections et des stratégies thérapeutiques et préventives.


Source : lequotidiendumedecin.fr