Au début de la pandémie, deux facteurs de risque de mortalité liée au Covid-19 ont rapidement été identifiés : l’âge et les comorbidités. Mais d’autres paramètres influencent le pronostic, et notamment le statut socio-économique.
La première alerte est arrivée en France avec les données de mortalité publiées par l’INSEE début avril. Les chiffres faisaient alors apparaître une importante surmortalité liée au Covid-19 en Seine-Saint-Denis, département le plus jeune, mais aussi le plus précaire de France métropolitaine.
Dans ce département, le nombre de décès survenus dans la semaine du 21 au 27 mars était en augmentation de 63 % par rapport à la semaine précédente (du 14 au 20 mars), alors que la moyenne régionale s’établissait à 34 %.
Mi-mai, une étude de l’Observatoire régional de santé d’Île-de-France (ORS-IDF) confirmait une surmortalité plus marquée en Seine-Saint-Denis (+ 118,4 %) que dans d’autres départements de la région (+101,5 % dans les Hauts-de-Seine, +94,1 % dans le Val-de-Marne et +92,6 % à Paris).
« Le cumul d’un ensemble de facteurs (conditions de logements, caractéristiques démographiques et sociales des ménages, état de santé des populations, activité et exposition professionnelles) rend les populations défavorisées plus susceptibles à la fois d’être contaminées par le Covid-19 et de développer une forme grave », s’alarmait alors, auprès du « Quotidien », Isabelle Grémy, directrice de l’ORS-IDF.
Parmi ces populations défavorisées, qui comptent de nombreux « travailleurs clés » (caissières, livreurs, personnel de nettoyage), l’état de santé est, en moyenne, plus mauvais et l’espérance de vie plus courte que dans la population générale. « En Île-de-France, il y a 7 à 8 ans de différence d’espérance de vie d’un canton à l’autre, selon la typologie des territoires, plus ou moins aisés », rappelle Isabelle Grémy.
Ce constat est confirmé par une étude menée par le professeur de géographie urbaine à l’université Paris-Nanterre, Guy Burgel. Il s’est penché sur les données de mortalité de l’INSEE entre janvier et juin pour le territoire du Grand Paris, soit la capitale et les 130 communes de la petite couronne (Seine-Saint-Denis, Hauts-de-Seine et Val-de-Marne).
Des inégalités plus sociales que territoriales
« En comparant la ville de Saint-Denis et le 16e arrondissement de Paris, on observe dans ces deux territoires une surmortalité plus importante des personnes âgées de plus de 65 ans, mais la progression par rapport à 2018-2019 est beaucoup plus forte à Saint-Denis (+67 %) que dans l’arrondissement parisien (+23 %). C’est cette différence importante qui fait soupçonner des contagions intrafamiliales et intergénérationnelles dans des conditions de logement défavorables », explique le chercheur au « Quotidien ».
Son étude, à paraître dans la revue « Villes en parallèle » (Persée, CNRS), met en évidence une surmortalité plus marquée dans la moitié nord et le sud-est de la métropole francilienne, soit les zones les plus défavorisées.
Comparés à la moyenne de la même période pour 2018 et 2019 (base 100), et pour une moyenne de 132, les indices de progression des décès totaux « s’envolent, souvent au-delà de 150 » dans ces territoires, souligne l’étude, alors que « la banlieue ouest et les arrondissements centraux et occidentaux de Paris connaissent une surmortalité beaucoup plus basse (indices souvent inférieurs à 125 et même à 116) ».
La densité urbaine n’est pas en jeu, puisque le centre de Paris, très dense, est moins affecté que la Seine-Saint-Denis. L’étude pointe plutôt la « corrélation spatiale entre surmortalité et conditions de logement et de revenus ». Les zones concentrant logements sociaux et faibles revenus « coïncident presque parfaitement avec les zones géographiques de plus fortes surmortalités », est-il noté. Pour le géographe, l’analyse des dossiers médicaux permettrait de mieux comprendre les vulnérabilités sociales.
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