Comment mieux protéger les mineurs contre les violences sexuelles ? Un rapport d'évaluation de la loi Schiappa de 2018 rendu ce 4 décembre au gouvernement, par la députée LREM Alexandra Louis, propose de revoir la législation, pour mieux lutter contre les viols sur les moins de 15 ans.
L'article 2 avait longuement fait polémique à l'époque. Le gouvernement avait d'abord évoqué l'introduction d'un seuil, fixé à 15 ans, en deçà duquel on ne pouvait parler de consentement, après que deux fillettes de 11 ans avaient été considérées comme consentantes dans deux procès différents. L'objectif était d’amener les juridictions à retenir plus aisément la qualification de viol ou d’agression sexuelle en cas de rapports entre un majeur et un mineur de moins de 15 ans.
Mais le gouvernement avait ensuite reculé - notamment par crainte d'inconstitutionnalité. La version finale de la loi se limite à intégrer l'idée d'une présomption de contrainte, dès lors que l'acte est commis sur une personne de 15 ans, avec des peines plus lourdes. « Lorsque les faits sont commis sur la personne d'un mineur de quinze ans, la contrainte morale ou la surprise sont caractérisées par l'abus de la vulnérabilité de la victime ne disposant pas du discernement nécessaire pour ces actes », lit-on.
« Force est de constater que les avis sur ce texte restent encore aujourd’hui très partagés », constate Alexandra Louis. « De nombreux professionnels du droit se satisfont de cette modification qui, tout en laissant une marge d’interprétation aux juges, notamment pour tenir compte des couples d’adolescents, permet de sécuriser la pratique judiciaire. Toutefois, du point de vue sociétal, cet article est considéré comme insuffisant en ce qu’il ne marque pas un interdit assez fort dans la loi pénale et ouvre encore trop le débat autour du discernement », analyse la rapporteure, avocate de profession. Et de fait, le Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes (HCE) juge la loi « pas suffisamment claire et protectrice pour l'enfant ».
Interdire par principe les relations avec les moins de 15 ans
L'auteure propose de créer dans le Code pénal une partie spécifique pour les infractions sur mineurs, qui intègre l'interdiction par principe d'une relation sexuelle entre majeur et un mineur de moins de 15 ans. Deux infractions autonomes y figureraient : un crime en cas de pénétration, un délit en son absence. Et le débat sur la question du consentement serait de facto évacué.
Une exception serait en revanche possible « afin de ne pas sanctionner de manière déraisonnée les relations amoureuses et sexuelles des couples d'adolescents dont l'un des deux serait un très jeune majeur ». Pour ce faire, la loi pourrait par exemple préciser une différence d'âge maximale admissible, et/ou une exception dans le cas où la relation a débuté alors que les deux partenaires étaient encore mineurs.
Faire évoluer la loi sur l'exhibition sexuelle, pas sur la prescription
La députée recommande par ailleurs de refondre le délit d'exhibition sexuelle : selon elle, celui-ci devrait viser explicitement les gestes obscènes et non pas l'exhibition du corps.
D'un côté, la loi actuelle ne s'applique pas au cas d'un homme qui se masturbe en public à travers son pantalon car son sexe n'est pas visible. De l'autre, elle a pu être utilisée contre des militantes Femen qui avaient exhibé leurs seins nus, et ce même si leur geste était politique et n'avait rien de sexuel. « Ce qui est sanctionné est plus la nudité que l'obscénité », regrette Alexandra Louis.
En revanche, Alexandra Louis estime que la réforme ayant allongé en 2018 la prescription des faits de viols sur mineurs, pour la porter à 30 ans après la majorité de la victime, « est largement perçue comme une solution d'équilibre ». Elle ne préconise donc pas d'intégrer la possibilité - demandée par certaines associations - de suspendre le délai de prescription en cas d'« amnésie traumatique ». En revanche, elle suggère de consacrer dans la loi un mécanisme de prescription glissante qui permettrait de suspendre certains délais de prescription dans le cas de crimes sériels (afin que dans les procès, certaines victimes ne soient pas exclues de la procédure).
Toujours mieux informer et soigner
Enfin, la députée préconise de renforcer l'éducation à la vie sexuelle et affective dans le cadre scolaire et périscolaire, de mettre en place une grande campagne d'information sur le consentement, notamment dans le couple (viol conjugal), mais aussi dans les sphères publiques et festives, et de mieux former les personnes encadrant les enfants ou accueillant les victimes. Elle attire enfin l'attention sur la nécessité de mieux former les psychologues et les psychiatres à traiter et à accompagner les auteurs de violences sexuelles.
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