À Opio (sans Buzyn…), le SML se fait le chantre de l'esprit libéral face au risque de dérive forfaitaire et technocratique

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Publié le 13/10/2018
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Crédit photo : S. Toubon

Un discours politique musclé en forme de mise en garde : intervenant ce samedi devant une centaine de cadres remontés réunis en congrès à Opio, le Dr Philippe Vermesh, président du Syndicat des médecins libéraux (SML) s’est montré offensif, n'hésitant pas épingler la tournure de la politique de santé et à pointer les menaces qui se profilent.

Dès l'ouverture de ce 9e congrès du syndicat, le stomatologue de Saint-Raphaël s'est dit très déçu de l'absence de la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, qui a préféré rendre visite aux internes (ce samedi) et surtout aux centres de santé, symboles de la médecine salariée (hier vendredi). « Cette année, notre syndicat ayant rejoint la convention médicale, nul obstacle ne pouvait être prétexté, s'est agacé le patron du SML. Mais, sans doute, au ministère préfère-t-on s'attarder auprès de ceux qui ont déjà fait le deuil de la médecine libérale en conduisant la rémunération à l'acte et l'indépendance du médecin au bûcher de leur propre vanité ».

Indépendance, défense de l'exercice libéral, esprit entrepreneurial : c'est autour de ces valeurs cardinales que le SML entend se démarquer. « Nous ne sommes pas convaincus, contrairement à d'autres, qu'il soit possible d'être rémunéré majoritairement au forfait et somme toute d’une certaine manière à la capitation, tout en conservant notre statut libéral et notre indépendance », a martelé le Dr Vermesch sous les applaudissements de ses troupes. Une prise de position claire alors que le gouvernement cherche des alternatives au paiement à l'acte (paiement à l'épisode de soins, forfaits populationnels, dotations conventionnelles au regroupement, etc.) dans le cadre de la réforme des rémunérations mais aussi de la nouvelle donne territoriale. 

La vraie valeur de l'acte, remède anti-déserts

Un peu plus tard, face à Nicolas Revel, directeur général de l’assurance-maladie, le Dr Vermesch a de nouveau accusé les choix politiques passés. « Si l’acte médical avait été honoré correctement depuis plus de vingt ans, on aurait beaucoup plus de jeunes qui seraient incités à s’installer ».

Dans une salle bondée, le patron de la CNAM a lui aussi joué cartes sur table. «  L’acte n’est pas sans inconvénient, c’est un système qui ne favorise pas l’exercice coordonné ni la prévention, ni la qualité de la prise en charge, a plaidé Nicolas Revel. C’est un système qui encourage la course aux volumes. Comment doit-on mettre les acteurs dans un schéma d’organisation qui encourage la prévention, la coordination plutôt que le couloir de l’acte seul ? Il faudra qu’on puisse parler de cela ! On va conserver une part majoritaire de valorisation des actes mais il faudra aussi intégrer une diversification qui laisse davantage de place à des éléments d’exercice coordonné de suivi de patients sur une durée de prise en charge ». La définition de ces paramètres de rémunération coordonnée sera discutée dans le cadre conventionnel, a promis Nicolas Revel. 

Le médecin isolé, victime de la nouvelle donne ?

Cette problématique de la liberté est au cœur des préoccupations du SML. Y aura-t-il, demain, un modèle unique d'exercice ? Les praticiens libéraux qui ne sont pas engagés dans une forme figée d'exercice coordonné (communautés territoriales - CPTS)  risquent-ils d'être pénalisés, voire exclus des revalorisations ou des financements conventionnels ? Il faut laisser aux praticiens le choix des armes, a plaidé le patron du SML.  

Nicolas Revel n’a pas évincé cette question. « C’est un sujet sensible mais on doit aussi l’aborder. Est-ce que les rémunérations versées à un médecin en exercice isolé doivent être strictement les mêmes que pour les autres médecins qui ont bougé vers l’exercice coordonné ? C’est une question légitime d’autant plus qu’on va investir dans l’exercice coordonné ». Selon le patron de la CNAM, cette question des financements sera discutée en début d’année prochaine dans le cadre interprofessionnel (ACI) ou monoprofessionnel.

Nicolas Revel s'est employé à rassurer les cadres syndicaux, et à travers eux la profession. Il y aura de nouveaux investissements pour ces communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) mais aussi pour le recrutement des assistants médicaux qui doivent venir épauler les libéraux regroupés. Sans vraiment convaincre... « Il suffit d’augmenter l’acte pour que les cabinets médicaux puissent recruter les assistants médicaux ! », a crié un cadre du SML, à l’adresse de Nicolas Revel. « Non je ne le crois pas, monsieur », a rétorqué le DG de la CNAM.


Source : lequotidiendumedecin.fr