Aix-en-Provence : menaces sur le centre hospitalier, en grande difficulté financière

Publié le 07/04/2003
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De notre correspondante

Comme un certain nombre d'hôpitaux de la région, le centre hospitalier d'Aix-en-Provence souffre d'abord d'être situé dans une région jugée pléthorique par les pouvoirs publics. Il est donc systématiquement sous-doté sur le plan budgétaire.

Après avoir traqué les éventuels abus dans leurs services, puis limité tous les frais qui pouvaient l'être, ces établissements se trouvent obligés de recourir à « la débrouille ».
La situation de l'hôpital d'Aix a été aggravée du fait, dit-on, d'une certaine mégalomanie de quelques-uns de ses responsables, mais surtout d'un accroissement d'activité qui l'a obligé à mettre les bouchées doubles en matière d'agrandissement. Au milieu des années quatre-vingt-dix, le conseil d'administration avait programmé la construction de nouveaux locaux et d'un nouveau plateau technique prévu en deux tranches dont la première était évaluée à l'époque à 120 millions de francs, soit, aujourd'hui, un peu plus de 18 millions d'euros. Mais, pour faire face aux besoins, le conseil d'administration avait décidé en 1995 de réaliser les travaux en une seule tranche. Une partie des services de l'ancien hôpital Pasteur, connu pour sa vétusté, ont pu emménager dans des locaux neufs et disposer d'une « galette technique » de haut niveau. Mais pour cela, il a fallu faire face à une dépense globale de 300 millions de francs, soit 45,7 millions d'euros.
En 1999, un accord de financement a été passé avec l'agence régionale d'hospitalisation (ARH), mais les crédits ne pouvant être versés rapidement, l'ARH aurait demandé à l'hôpital d'assurer lui-même une partie du financement « de manière transitoire ». Le seul moyen était de puiser dans les réserves de trésorerie. Le déficit cumulé est ainsi de 16 millions d'euros auxquels s'ajoute un déficit structurel annuel de 4 millions d'euros.
Tout en reconnaissant que la décision de fusionner les deux tranches de travaux pouvait être « techniquement fondée », la Cour régionale des comptes estime que ce constat « ne dispensait pas pour autant d'analyser et d'acter sa faisabilité financière ». Elle reproche également au conseil d'administration de ne pas avoir anticipé « l'effet quasi structurel » de l'ouverture de nouveaux locaux sur l'activité de l'établissement (voir encadré).

L'inquiétude de la municipalité

Même si l'agence régionale d'hospitalisation, à l'intérieur de l'enveloppe qui est la sienne, peut donner des budgets plus importants à certains établissements de la région, l'augmentation de dotation n'a pu suivre l'accroissement des besoins : en six ans, entre 1995 et 20O1, cette dotation n'a augmenté que de 23,38 %. Interrogée par les magistrats de la Cour des comptes, le directeur de l'ARH a d'ailleurs souligné : « La question est de savoir si un établissement peut et doit limiter son offre de soins, alors qu'il dispose de l'équipement, des compétences et de la demande des populations pour développer son activité. ».
Une question qui se pose notamment pour la maternité : l'hôpital a obtenu l'autorisation d'une extension de 20 lits pour faire face à l'augmentation de la demande. Mais, « pour le moment, je n'ai pas le financement », déplore l'actuel directeur du centre hospitalier, Jean-Claude Pozzo di Borgo, entré en fonctions en 2001.
La municipalité, qui a également changé entre-temps, déplore l'absence de marge de manœuvre. Elle souligne qu'il n'est « pas question de fermer des services », mais redoute l'arrêt probable de nouveaux investissements en matière médicale. Elle dénonce la responsabilité de l'équipe précédente et des autorités, et demande donc au ministre de la Santé un plan de financement permettant de résorber le déficit et d'envisager de nouveaux investissements, « faute de quoi, l'hôpital sera obsolète d'ici à cinq ans et sa modernisation n'aura servi à rien ».

Une activité pourtant croissante

Avec 804 lits et près de 28 000 entrées par an pour un bassin de population de 500 000 habitants, le centre hospitalier du pays d'Aix occupe une place prépondérante dans le paysage hospitalier de la région et son activité augmente d'année en année : 14,4 % de plus au cours des trois dernières années pour l'hospitalisation classique et 11,1 % pour l'hospitalisation de jour. Depuis plusieurs années, sa maternité connaît aussi un accroissement d'activité, au fur et à mesure de l'augmentation de population et des fermetures ou suppressions de service d'obstétrique dans les cliniques privées des environs.

Françoise CORDIER

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7311