Un rapport du Conseil national du sida

Améliorer le dispositif de lutte contre le sida dans les DOM

Publié le 03/04/2003
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Sept ans après son précédent rapport, « Spécificités et inégalités. Le sida dans les départements français d'Amérique », le CNS note que des progrès ont été réalisés ; mais, avec l'arrivée des antirétroviraux, des problèmes se posent aujourd'hui en matière d'accès à des soins qui n'existaient pas il y a quelques années.

« La plupart des DOM sont dans une situation paradoxale, note le rapport : les techniques et les traitements les plus performants en matière de lutte contre le VIH/sida sont disponibles mais les populations les plus précarisées, qui sont aussi les plus touchées, rencontrent de grandes difficultés pour en bénéficier. »
En dépit des progrès, la situation demeure préoccupante. Entre le 1er avril et le 31 mars 2002, les DOM ont enregistré en moyenne 17,09 nouveaux cas de sida pour 100 000 habitants, contre 2,7 dans l'Hexagone. Un taux d'incidence 7 fois plus élevé qu'en métropole.
L'épidémie d'infections à VIH s'inscrit dans un contexte économique et social difficile. C'est particulièrement vrai en Guyane où les obstacles sont nombreux. Il s'agit du département le plus touché, avec 43,8 cas pour 100 000 habitants (18 fois celui de la métropole) entre avril et mars 2002. Pour ce département, la lutte contre le sida doit être prioritaire. La mission du CNS en Guyane a, par ailleurs, mis en évidence « des lacunes du système guyanais dans son ensemble ». Le département fait l'objet d'un avis spécifique dans lequel le CNS « recommande la mise en œuvre d'un plan général, sanitaire et social », au-delà des considérations propres au VIH/sida.
Le nouveau rapport du CNS, suivi de ses recommandations, a été adopté à l'unanimité en séance plénière du 11 mars dernier. Outre un contexte socio-culturel particulier, le CNS tient compte du profil de l'épidémie dans ces régions.
Les DOM se distinguent, en effet, de la moyenne française par une proportion plus élevée de contamination hétérosexuelle et de transmission mère-enfant. Les contaminations homosexuelles ou consécutives à l'usage de drogue injectée par voie intraveineuse sont moindres.
Pour les quatre départements qui ont une population plus jeune qu'en métropole, la proportion de malades âgés touchés par le sida est élevée : les plus de 50 ans représentent 21 % des malades, contre 12 % à Paris. La part des enfants y est également importante : 5 % des patients ont moins de 20 ans, contre 1 % seulement à Paris.

Augmentation des décès

Après une baisse du nombre de décès entre 1996 et 1998, puis une stabilisation, le rapport note une reprise des décès en Guadeloupe et en Guyane à partir de 2000. Cette reprise s'explique par le nombre élevé de personnes non dépistées ou dépistées et non traitées. « En 2001, seulement 7 % des patients sont traités au moment où ils déclarent un sida en Martinique et en Guyane, 14 % à la Réunion et 16 % en Guadeloupe », selon le rapport.
Situés dans des régions peu développées, « les DOM font figure d'îlots de richesse attractif » pour des pays limitrophes : Maurice, le Brésil, le Surinam, la République dominicaine ou le Guyana. « Une attention particulière doit être portée aux migrants ainsi qu'aux programmes de coopération à développer avec leurs pays d'origine », stipule le rapport.
Les recommandations du CNS rappellent l'exigence de voir respectées l'égalité des citoyens français et la défense des droits de chacun à la vie et à la santé. En particulier, l'accès aux soins doit être garanti et la prise en charge sociale assurée, quelle que soit la nationalité de la personne séropositive.
Le CNS souhaite un engagement sérieux de l'Etat qui, avec l'appui des services de Santé, doit promouvoir une politique générale d'éducation à la santé et à la sexualité.
Il appelle les conseils généraux à assumer leur part de responsabilité en matière de santé publique. Il préconise un effort accru de formation des personnels médicaux et une plus grande coordination entre les professionnels libéraux et hospitaliers. Enfin, le CNS suggère la mise en place d'une coopération avec les pays voisins dans la lutte contre le sida.

* Rapport réalisé par une commission dont le responsable était le Pr Jean-Albert Gastaut.

Dr Lydia ARCHIMÈDE

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7309