Malades chroniques : le droit aux vacances

Après allogreffe de moelle, le départ avec un fil à la patte

Publié le 02/04/2003
Article réservé aux abonnés

Le temps de la médecine

Une différence fondamentale entre l'allogreffé de moelle et le greffé d'organe change radicalement la vision des vacances de ces patients, explique le Pr Jean-Paul Vernant (hôpital de la Pitié-Salpêtrière, Paris).

« Le greffé d'organe dispose d'un système immunitaire normal que l'on tente de déprimer. Chez l'allogreffé, ce système a été détruit ; il vit avec celui du donneur, qui prend le relais et ne devient compétent qu'au bout d'un an environ. Le greffé d'organe est soumis à une immunodépression définitive, alors que ce traitement est interrompu au bout de quelques mois ou années, chez le greffé de moelle. »
En outre, les précautions à prendre vont dépendre en grande partie de l'importance du déficit immunitaire. Est-il habituel ou prolongé, notamment par une réaction du greffon contre l'hôte avec son traitement immunosuppresseur ?
Schématiquement, trois périodes peuvent être déterminées : de la greffe à six mois, mieux vaut ne pas s'éloigner du centre de greffe, du fait du risque d'infection à cytomégalovirus, à HHV6, et de poussées possibles de GVH aiguë ; de six mois à un an, des séjours sont possibles en France (moyennant certaines précautions) ; au-delà de la première année, des séjours à l'étranger deviennent accessibles. Une dernière étape autorisée uniquement si le patient va bien, « notamment en l'absence de réaction du greffon contre l'hôte chronique ou de corticothérapie au long cours ».

Un service spécialisé proche de la villégiature

Lorsqu'il s'éloigne de son domicile, le transplanté de moins d'un an « garde un fil à la patte avec son hôpital ». Il doit conserver un contact téléphonique avec le centre de greffe, qui lui fournit, avant le départ, les coordonnées d'un service spécialisé proche de sa villégiature. Il lui adresse les principaux éléments du dossier du patient. En cas de problème, le greffé prévient en priorité son centre de transplantation, qui informe le service local.
L'allogreffé court deux risques majeurs : contracter une infection virale banale saisonnière ou déclarer un zona. Il est informé que devant tout signe inquiétant (toux, fièvre, dyspnée ou douleur), il doit prendre contact avec son centre de transplantation. Ce risque infectieux justifie d'éviter la foule, les lieux pollués, les transports en commun. De même, les baignades (mer ou piscine) ne sont pas recommandées au cours de deux premières années. Dans le même esprit, certaines précautions alimentaires sont indiquées, surtout au cours du premier semestre : il faut éviter les produits non cuits (salades, crudités, fruits de mer).
Les vacances, c'est aussi le soleil. L'exposition solaire est interdite pendant deux ans au moins, voire davantage en cas de réaction du greffon contre l'hôte chronique (poussées déclenchées par les UV). Tous les moyens de prévention doivent être mis en œuvre : écran total, chapeau, manches longues. Les séances de bronzage sont interdites. Le Pr Vernant précise en outre que l'irradiation totale qu'a pu subir le patient semble majorer le risque de cancer cutané.
Le départ en vacances peut fournir l'occasion de revacciner le patient, qui « a perdu son immunité d'origine vaccinale à la suite de la greffe. Mais attention, les vaccins vivants atténués sont proscrits, notamment la fièvre jaune, la polio orale et, dans le contexte actuel, la variole ».

Dr Guy BENZADON

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7308