Pourtant les débuts des premiers bêtabloquants furent relativement difficiles, rappelle S. Weber : d'une part, il n'allait pas de soi d'antagoniser les effets de l'adrénaline « hormone de survie » sur le cur. Par ailleurs, les premières molécules commercialisées n'étaient pas parfaites (demi-vie courte, problèmes de biodisponibilité, très forte ASMI...). Mais alors que la durée de vie moyenne d'une classe thérapeutique est de 10-15 ans (en termes de publications scientifiques), les bêtabloquants ont présenté un intérêt croissant, ponctué par des indications nouvelles.
De l'HTA hyperkinétique du sujet jeune, on est passé (timidement) à l'angor (années 1970) puis à l'HTA, au postinfarctus (années 1980), à la dysfonction ventriculaire gauche (années 1990), à l'insuffisance cardiaque (dans des conditions bien précises) et à divers troubles du rythme.
Le système « ABS » du coronarien
En particulier, les bêtabloquants ont été les premières molécules validées dans l'angor, avec des méthodologies modernes. Ils réduisent les besoins en oxygène du myocarde, effet qui se manifeste surtout à l'effort et dans l'angor de stress. Dans le cadre du pronostic vital, le blocage des récepteurs bêta diminuent le risque de troubles du rythme d'origine ischémique et de mort subite et il permet de réduire la taille de l'infarctus quand il survient malgré un traitement.
Comme le souligne le Pr S. Weber, ces démonstrations ont fait des bêtabloquants l'un des composants du système « ABS » (aspirine-bêtabloquants- statines) du coronarien. Ces démonstrations concernent toutes les molécules sans activité sympathomimétique intrinsèque (ASI), en sachant que l'on privilégie celles qui, comme le betaxolol, associent cardiosélectivité, longue demi-vie et une bonne biodisponibilité orale.
Une référence anti-hypertensive
Dans l'HTA, poursuit le Pr S. Laurent (hôpital européen Georges-Pompidou), les bêtabloquants sont toujours avec les diurétiques les références pour le traitement de première intention, même si ces classes perdent progressivement leur monopole.
Mais plutôt que de comparer ces différentes classes d'antihypertenseurs, le Pr S. Laurent préfère insister sur la nécessité d'un contrôle optimal des chiffres tensionnels, ce qui passe souvent par une bi- ou trithérapie. Cela s'applique tout particulièrement aux hypertendus à haut risque que sont les coronariens et/ou les diabétiques.
Les bêtabloquants ont toute leur place dans le cadre des associations d'anti-hypertenseurs qui s'imposent très souvent pour obtenir un bon contrôle des chiffres tensionnels, une stratégie encore trop peu utilisée, déplore le Pr Stéphane Laurent.
Le Pr Jacques Clémenty, de Bordeaux, a enfin évoqué la place des bêtabloquants dans la prise en charge des troubles du rythme cardiaque. Un domaine où la prise en charge a évolué, remarque-t-il, avec la prééminence actuelle des traitements non pharmacologiques (ablation, pacemaker, défibrillateur). Avec la disparition du dogme du retour obligatoire au rythme sinusal et avec la fin de certaines idées reçues en particulier sur les bêtabloquants.
En ce qui concerne ces derniers, les études AFFIRM et RACE ont montré qu'ils pouvaient permettre de contrôler la fréquence cardiaque lorsqu'apparaissait une fibrillation auriculaire. Ces études montrent qu'il est aussi efficace de contrôler la fréquence cardiaque qu'un acharnement à rétablir un rythme sinusal.
Les bêtabloquants connaissent d'autres indications plus rares, en particulier le syndrome du QT long où les bêtabloquants réduisent la fréquence des syncopes, mais le Pr Clémenty insiste surtout sur l'importance de la prescription de bêtabloquants dans le cadre de la cardiopathie ischémique, en particulier dans le postinfarctus : en effet, dans ce contexte, ces médicaments associent à l'effet anti-ischémique un réel rôle antiarythmique.
De nouveaux champs de recherche
Le Pr Simon Weber a enfin insisté sur le champ des recherches qui s'ouvre encore aux bêtabloquants dans de nombreux domaines en particulier dans leur dernière « conquête » l'insuffisance cardiaque. Dans ce domaine, il y a encore beaucoup de questions sans réponse concernant notamment l'importance de l'effet classe, l'efficacité dans les formes sévères (classe IV) ou encore l'attitude pratique à adopter en cas de décompensation d'insuffisance cardiaque chez un patient recevant déjà les bêtabloquants. Ces questions parmi beaucoup d'autres, expliquent pourquoi les bêtabloquants passionnent toujours les cardiologues.
Conférence de presse organisée par Schwarz Pharma.
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