Au moins cent à deux cents médecins libéraux devraient manifester cet après-midi sous les fenêtres de la caisse primaire d'assurance-maladie (CPAM) de Pau, à l'appel de la coordination des spécialistes du Béarn, pour exprimer leur soutien à 28 confrères menacés de sanction par la CPAM. Dans une lettre datée du 19 mars, la caisse a reproché à ces 28 médecins spécialistes de secteur I (principalement des ophtalmologistes, des dermatologues, des gynécologues et des rhumatologues) de pratiquer des dépassements d'honoraires sur 20 à 30 % de leur activité.
Les responsables de la caisse doivent recevoir cet après-midi une délégation de médecins, à la demande du Dr Jean Leid, responsable-fondateur de la coordination des médecins spécialistes du Béarn et porte-parole de la Coordination nationale des spécialistes. « Nous allons demander l'annulation des procédures de sanction qui sont impensables en période de négociations conventionnelles », indique le Dr Leid. « Economiquement, aucune profession ne peut survivre à un blocage des tarifs pendant huit ans (CS), voire treize ans (actes en K) », plaide-t-il.
Pour cette manifestation, le Dr Leid a appelé à la rescousse la coordination des médecins généralistes et les syndicats médicaux du Béarn, ainsi que les coordinations de toute la région Sud-Ouest.
Du côté de la CPAM, on souhaite dédramatiser la situation. « Il s'agit d'un débat à caractère national qui nous échappe un peu, mais on est bien obligé de constater les éventuelles dérives au niveau local », déclare Angelo Castelletta, directeur adjoint de la caisse en charge des relations avec les professionnels de santé. Angelo Castelletta tient à souligner qu' « aucune décision de procédure contentieuse n'a été déclenchée : on leur a simplement rappelé la réglementation et demandé des explications par courrier ». Le directeur adjoint de la CPAM de Pau « espère que la raison va l'emporter », d'autant qu'il a déjà reçu lundi matin huit réponses de rhumatologues annonçant qu'ils « arrêtaient de faire des dépassements ».
« Un test national »
Quoi qu'il en soit, les organisations syndicales entendent faire de la manifestation de Pau « un test national », dans un contexte particulièrement houleux. Le Dr Jean-François Rey, président de l'UMESPE, la branche spécialiste de la Confédération des syndicats médicaux français (CSMF), fait aujourd'hui un aller-retour à Pau, en compagnie du président du Syndicat national des dermatologues. « C'est un bon moyen pour montrer la solidarité des médecins spécialistes », explique le Dr Rey. Le président de l'UMESPE rappelle qu'il maintiendra ses mots d'ordre d' « application du DE dans les limites de la légalité », tant qu'une « paix des braves » n'est pas signée au niveau national pour le restant de l'année.
Le Dr Jean-Claude Régi, président de la Fédération des médecins de France (FMF), qui sera aussi présent à Pau aujourd'hui, pense que « la manifestation sera bien suivie », la FMF ayant mobilisé ses quelque « 200 adhérents généralistes et spécialistes » au niveau local, ainsi que « tous (ses) cadres du Sud-Ouest ».
D'autres actions devraient avoir lieu la semaine prochaine. Les Drs Rey et Régi comptent d'ailleurs se rendre également à la manifestation similaire prévue le 17 avril à Valence pour épauler 29 médecins inquiétés par la CPAM de la Drôme. La caisse a déjà notifié à 22 d'entre eux qu'elle cesserait de prendre en charge leurs cotisations sociales à compter du 1er juillet, pour « une durée variable, selon l'ampleur des dépassements pratiqués ».
Une autre mobilisation se déroulera le même jour le 17 avril à Nantes, où la caisse primaire a décidé de déconventionner un ophtalmologiste pendant un an à partir du 1er mai (« le Quotidien » du 31 mars). En réaction à cette sanction qu'elle juge « disproportionnée », l'UMESPE-CSMF a « invité tous les médecins spécialistes de Loire-Atlantique à cesser toutes activités le jeudi 10 avril en signe de solidarité ».
Enfin, le Syndicat des médecins libéraux (SML) regrette que, « de manière générale, les actions de plus en plus nombreuses des CPAM visant à rappeler à l'ordre, voire à sanctionner les médecins qui font usage du DE, entretiennent une situation conflictuelle alors même qu'au niveau national caisses et syndicats de médecins recherchent les conditions d'une paix armée ». Le SML critique surtout, sans la nommer, la CPAM de Seine-et-Marne qui va demander aux patients de lui signaler les praticiens qui appliquent des « dépassements d'honoraires injustifiés » (« le Quotidien » du 7 avril). « Au-delà (du) caractère délateur » de ces appels, le SML estime que, « dans une situation où le feu couve, il n'est pas prudent d'agiter de l'huile au-dessus ».
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