Démographie et permanence des soins : inquiétudes en PACA et en Corse

Publié le 01/04/2003
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De notre correspondante

Ils ne sont pas toujours d'accord sur l'article 77 du code de déontologie (qui aménage l'obligation de continuité des soins) ni sur certaines positions jugées « archaïques » de l'Ordre national qui continue à interdire la médecine foraine, par exemple. Mais ils se retrouvent sur un point : c'est à la profession de trouver des solutions, notamment sur les problèmes démographiques et la permanence des soins, avant que d'autres n'imposent les leurs.

C'était le sens de la réunion entre les représentants des ordres des départements du sud-est de la France et les unions régionales de médecins libéraux (URML) des régions Provence - Alpes - Côte d'Azur et Corse.
D'entrée, le Dr Jean-Claude Gourheux, président de l'URML-PACA, a placé le débat sur la situation démographique paradoxale de ces deux régions : malgré la pléthore démographique générale, certaines zones géographiques manquent déjà de médecins et en manqueront de plus en plus, à cause des évolutions des modes d'exercice.
De son côté, le Dr Sauveur Merlinghi, président de l'URML Corse, voit de son côté la médecine évoluer vers une « phase où les jeunes médecins parlent de qualité de vie et de travail, pour une meilleure qualité des soins, et non plus de sacerdoce », et délaisseront certains régions peu attractives. Et un conseiller ordinal corse souligne la situation déjà difficile des zones rurales ou montagneuses de l'île de Beauté où un seul médecin exerce dans certains secteurs de 2 500 km carrés.
Comment, dans ces conditions, appliquer l'obligation de répondre aux besoins de soins ? Tous les participants ont manifesté le désir d'assouplir règlements et modes d'exercice afin de permettre notamment la mobilité des médecins. Les possibilités de consultations détachées, de médecins « tournants » sur plusieurs cabinets ou de jeunes médecins non installés « exerçant en lieux multiples », y compris dans le département limitrophe, l'introduction de salariat dans l'exercice libéral, ont été évoquées. En même temps, les intervenants ont souligné que ces solutions devaient être débattues au cas par cas, par bassin de vie, en fonction des besoins et des possibilités, avec l'aval de l'Ordre départemental.
Les maisons médicales, dans lesquelles des généralistes viennent prendre des gardes, ont beaucoup intéressé les participants, souvent sollicités par de nouveaux projets mais qui s'interrogent sur les positions que l'Ordre serait amené à prendre en cas de difficultés avec des médecins extérieurs.
Ils ont multiplié les questions sur les maisons de garde qui existent déjà dans la région. Celle de Gap, qui fut la première dans la région, semble la plus aboutie, celle qui fonctionne dans les locaux de l'hôpital Nord de Marseille semble satisfaire les généralistes qui y prennent des gardes mais semble végéter, selon les médecins extérieurs. Dans le Vaucluse, un projet que l'on croyait déjà presque réalisé portait à la fois sur une régulation des appels, sur une maison de garde à Sorgues et une autre dans l'enceinte de l'hôpital d'Avignon. Le président de cet Ordre départemental a regretté leur échec, malgré un travail acharné de deux ans pour monter les dossiers de financement et l'obtention d'un gros budget. L'échec de la maison de Sorgues semble lié à des dissentions internes et celui d'Avigon à un désistement progressif des médecins du secteur, au fur et à mesure de la modification du projet de départ, auquel ils avaient pourtant tous adhéré. Dans ce département où très peu de secteurs disposent d'une garde de nuit, seuls SOS-Médecins et le SMUR répondent donc aux appels : « Il n'y a plus un seul médecin qui veuille être appelé directement par les malades et le centre 15 ne veut pas réguler les gardes libérales », constate l'Ordre, dans ce département comme dans d'autres.
D'où cette mise en garde du Dr Pierre Jouan, secrétaire général adjoint du Conseil national de l'Ordre et président de l'Ordre du Var : « Si la profession n'a pas une réflexion commune, on va à la catastrophe. » Tout en rappelant qu'un décret va très prochainement renforcer la sectorisation de la permanence des soins, il invite à « trouver des solutions secteur par secteur ». Ordres et URML de PACA et Corse se retouveront donc à nouveau, après parution du décret, pour décider des actions concrètes. Mais ils sont déjà tombés d'accord sur le principe d'un volontariat motivé par des incitations financières et d'organisation, reposant sur la reconnaissance du service public ainsi rendu (et donc la nécessité d'une aide des pouvoirs publics) et sur des assouplissements du mode d'exercice.


Françoise CORDIER

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7307