Les ultrasons ont trouvé de nombreuses applications cliniques, de l’échographique diagnostique à l’ablation tumorale et la lithotripsie, lesquelles utilisent principalement des hautes fréquences. À basses fréquences, les ultrasons peuvent perméabiliser temporairement un tissu, par phénomène de cavitation, ce qui peut être exploité pour délivrer des médicaments de façon ciblée.
« Nous avons développé une nouvelle approche pour délivrer des médicaments au tube digestif. L’application d’ultrasons permet la délivrance très rapide au tube digestif de médicaments, qu’ils soient constitués par des petites molécules ou des macromolécules », explique au « Quotidien » le Dr Giovanni Traverso, chercheur au MIT (Cambridge) et gastro-entérologue a la Harvard Medical School (Boston). Ce travail, mené par l’équipe des Prs Robert Langer et Daniel Blanschtein au MIT, est décrit dans la revue « Science Translational Medicine ».
Tissu ex vivo
Les chercheurs ont d’abord montré que les ultrasons à basse fréquence augmentent l’absorption de mésalazine et de corticoides dans du tissu ex vivo de toutes les parties du tube digestif, et il suffit pour cela d’une seule minute d’exposition. Ils ont développé une petite sonde à ultrasons dont l’insertion par voie rectale est bien tolérée dans deux modèles animaux (cochon et souris). L’application d’ultrasons est combinée à l’injection rectale d’un médicament.
Ainsi, chez le cochon, cette approche a permis la délivrance systémique d’une macromolécule, l’insuline, qui entraîne la réponse hypoglycémique attendue. Chez la souris présentant une colite aiguë induite chimiquement, l’administration de mésalazine en lavement réduit plus rapidement l’activité (clinique et histologique) de la colite lorsqu’elle est combinée aux ultrasons, sans effet néfaste observé.
Évaluer la sécurité
« Nous poursuivons nos études pour évaluer la sécurité et l’efficacité sur des modèles animaux plus larges (y compris des modèles de colite avec dysbiose), avec l’espoir de débuter les premiers essais cliniques humains dans 2 a 3 ans », précise le Dr Traverso.
La première application pourrait concerner les patients souffrant de rectocolite hémorragique (RCH), et plus particulièrement de proctite ; ils pourraient utiliser à domicile une sonde à ultrasons pour accélérer l’absorption rectale de mésalazine et augmenter son efficacité. Cette U-sonde pourrait aussi être utilisée pour la délivrance locale des anti-TNF dans la RCH.
D’autres applications sont déjà envisagées, comme « la proctite radique, le cancer anal et rectal, ainsi que le traitement d’infections y compris les vaccinations contre les infections gastro-intestinales », fait entrevoir le Dr Traverso.
Enfin, l’équipe travaille également à une forme ingérable de cette technologie, dont la description devrait être publiée dans l’année à venir. Cette approche pourrait être prometteuse pour améliorer les traitements chez les patients atteints de maladies inflammatoires chroniques intestinales (MICI).
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