Érosion du volontariat, nuit profonde abandonnée, réquisitions : la PDS toujours très fragile !

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Publié le 25/03/2019
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Crédit photo : S. Toubon

Stabilité ou érosion du volontariat dans une majorité de départements, hausse timide des régulateurs libéraux (grâce aux retraités), nuit profonde désertée, réquisitions stables : le bilan ordinal de la permanence des soins ambulatoires (PDS-A), que détaille « Le Quotidien », montre des signes de fragilité. Etat des lieux. 

Si 62 % des 102 conseils départementaux (CDOM) interrogés déclarent que la permanence des soins fonctionne bien, 22 % pensent le contraire et 16 % ont un avis « mitigé ». Avec des tendances lourdes : réduction du nombre de secteurs, essor des points fixes, arrêt progressif des gardes en nuit profonde, variabilité de la rémunération des astreintes... La participation « fragile » des médecins continue d'inquiéter l'Ordre.

Participation fluctuante

Basée sur le volontariat, la participation des généralistes libéraux à la PDS reste très variable d’un département à l’autre – allant de moins de 10 % pour certains à 100 % pour d’autres. Le taux national de participation s’élève à 39 %, soit 23 197 médecins volontaires pour 60 131 praticiens susceptibles de participer.

L'Ordre recense 19 % des départements où la participation des médecins est en hausse, 37 % où elle est stable et 31 % où elle chute. Surtout, 36 % des territoires sont désormais couverts par moins de dix généralistes volontaires et 18 % par moins de cinq médecins volontaires (271 territoires sur 1 485), soit une hausse de 3 % en un an qui illustre cette fragilisation. 

Le faible taux de volontariat dans certains secteurs menace l’organisation des tours de garde, notamment en cas de départs à la retraite. Néanmoins, le taux de participation ne reflète pas forcément la situation réelle. Certains départements comme Paris (avec la présence d’associations de type SOS) affichent une participation faible « sans pour autant que les tableaux de garde peinent à être complétés ». A contrario, des problématiques organisationnelles peuvent être identifiées au sein de départements où le taux de participation est élevé. C’est le cas du Gers et du Lot où des réquisitions préfectorales ont eu lieu en 2018, malgré un taux de participation supérieur à 75 %.

Médecins régulateurs : moins d'actifs, plus de retraités

L'enquête dénombre 2 535 généralistes libéraux régulateurs en activité régulière, soit une baisse de 1,4 %. C'est uniquement grâce au renfort des médecins retraités (+45 %), salariés ou remplaçants, que le nombre global de médecins libéraux engagés dans la régulation a augmenté modestement de 3 %. L'âge moyen des régulateurs s'affiche à 55,4 ans (mais 66 ans dans le Tarn-et-Garonne). À noter que le nombre global des actes non régulés aux horaires de PDS-A est stable (28 %).

Là encore, la participation à la régulation est hétérogène : 38 % des départements ont connu une hausse du nombre de médecins régulateurs (5 de plus en moyenne), tandis que 37 % accusent une baisse. À l’exception de cinq départements (Lozère, Ardennes, Territoire de Belfort, Guyane et Mayotte), la participation des médecins installés à la régulation est effective partout.

Resectorisation = fin de la nuit profonde ?   

Le nombre de secteurs de garde continue de fléchir, quel que soit le créneau horaire. Cette réduction est de 9 % en soirée de semaine, de 10 % les week-ends et jours fériés et de 8,5 % en nuit profonde (il ne reste plus que 387 territoires sur cette période...).

Malgré cette re-sectorisation à la hussarde, 97 % des territoires restent couverts peu ou prou les week-ends et jours fériés par des effecteurs (ce qui laisse 3 % de zones blanches) et 91 % en soirée de semaine (20H/24H).

En revanche, la nuit profonde (minuit à 8H) est progressivement abandonnée par les effecteurs puisque 23 % seulement des territoires sont encore couverts sur ce créneau de nuit où peu d'actes sont constatés (tableau). Les zones blanches en nuit profonde ont bondi de 6 %. Autre signal d'alerte, 71 % des Ordres départementaux craignent un désengagement en soirée. L'érosion est déjà une réalité dans les Bouches-du-Rhône, Calvados, Charente ou Côte-d’Or . 

 

Rémunération en hausse mais à la tête du client

Déterminé par les ARS, le montant des forfaits horaires d'astreinte pour la régulation téléphonique est variable, entre 70 euros et 125 euros, tous créneaux confondus. L'enquête pointe une « large revalorisation » de ces forfaits en 2018, à la faveur de l'harmonisation dans le cadre de la réforme territoriale. Ainsi, les régions Auvergne Rhône-Alpes, Nouvelle-Aquitaine, Hauts-de-France et Grand Est ont dopé les forfaits d'astreinte des anciennes régions.

Pour les effecteurs (mobiles ou sur site), la revalorisation des forfaits a été moins importante et partagée. S'ils ne peuvent être fixés en deçà de 50 euros pour une garde de quatre heures, ils varient fortement selon la taille des territoires, le nombre de médecins présents et les contraintes… En 2018, ils étaient compris « entre 50 et 600 euros » pour l’effection fixe et entre « 50 et 828 euros » pour l’effection mobile, tous créneaux confondus.

Le 116-117 méconnu

Introduit en 2016, ce numéro est accessible dans trois régions pilotes (Corse, Normandie et Pays de la Loire) et « techniquement opérationnel dans tout le reste de la France ». Mais faute de campagne de communication auprès du public, ce numéro reste « méconnu » et donc pas utilisé. Malgré le retour positif des départements pilotes, un conseil départemental sur deux reste défavorable à ce numéro, jugé peu lisible, trop long.

• Toujours des réquisitions

Les réquisitions préfectorales perdurent dans 22 départements (certes, deux de moins qu'en 2017). Mais l'Ordre relève que ces réquisitions relèvent d'un « régime permanent » en Charente, dans la Marne ou en Vendée! Dans certains départements les carences sont tolérées sans intervention, comme dans le Vaucluse ou la Saône-et-Loire.  

 

Loan Tranthimy

Source : lequotidiendumedecin.fr