Si les enquêtes nationales de prévalence des maladies nosocomiales, réalisées sous la houlette des cinq centres interrégionaux de coordination des comités de lutte contre les infections nosocomiales (CCLIN), au sein du RAISIN, ont déjà donné lieu à plusieurs publications (voir encadré), l'étude du même RAISIN, publiée par l'Institut de veille sanitaire (InVS), au sujet des infections de site opératoire est sans antécédent*.
Ses données proviennent des deux années de surveillance (1999 et 2000) effectuées dans les services de chirurgie volontaires dans toute la France, sur une large base de volontariat. Cette participation massive, quoique hétérogène, reflète, selon les auteurs, « un réel engagement des équipes dans la lutte contre les infections nosocomiales et une participation active à la démarche de surveillance ».
Au total, 3 129 patients ont été victimes d'une ISO, soit 1,93 % des opérés ; 59 % de ces infections étaient superficielles, 26 %, profondes, et 14 % concernaient un organe, une cavité ou un os.
Ces chiffres sont à moduler selon la catégorie de risques à laquelle appartiennent les patients et la nature de l'acte opératoire qu'ils ont subi.
C'est ainsi que, chez les patients à faible risque, soit 60 % des sujets, le taux d'incidence des ISO est estimé à 1 %, soit la limite inférieure des résultats enregistrés dans les autres pays d'Europe et en Amérique du Nord.
L'importance de la population étudiée permet de corréler les risques au type d'intervention : en haut de l'échelle des risques, la chirurgie digestive (3,89 %) est suivie par la chirurgie polytraumatisée (3,57 %), la chirurgie thoracique (3,04 %) et la chirurgie urologique (2,87 %). Viennent ensuite la chirurgie cardiaque (2,21 %), la chirurgie gynéco-obstétricale (1,81 %), la chirurgie vasculaire (1,76 %), la neurochirurgie (1,74 %) et la chirurgie du système lymphatique (1,67 %).
S'en tirent le mieux les patients en chirurgie ophtalmologique (0,27 %), en chirurgie du système endocrinien (1,03 %), en chirurgie orthopédie (1,08 %), en chirurgie ORL et stomato (1,19 %) et en chirurgie de la peau et des tissus mous (1,52 %).
Hors catégorie, bien sûr, les transplantations d'organes, avec une incidence qui culmine à 8,7 %.
Ces résultats montrent encore que les ISO profondes représentent une proportion comparable aux données américaines ; leurs localisations témoignent de la gravité potentielle, avec de fréquentes reprises opératoires, un allongement de la durée d'hospitalisation et une létalité accrue. En chirurgie propre programmée, la prothèse totale de la hanche est jugée « particulièrement préoccupante » (85 % de l'ensemble des infections sur prothèse), ce qui constitue « un bon indicateur probable de la qualité des soins et un bon traceur des infections qu'il faudrait absolument éviter ».
Dans les 17 jours
Les auteurs soulignent qu'ils se sont heurtés dans ce recueil à une difficulté principale : le suivi des patients dans les 30 jours postopératoires, conformément aux méthodologies édictées par les CCLIN ; cela dit, les résultats montrent que 75 % des ISO surviennent dans les 17 jours qui suivent l'intervention. Mais le suivi après la sortie reste recommandé, avec une visite systématique par le chirurgien qui doit être programmée dès la sortie du patient. Une démarche difficile à mettre en uvre quand le patient a subi une intervention légère ou ambulatoire.
Cette première mouture des données françaises sur les ISO permet, quoi qu'il en soit, de vérifier que le score enregistré dans les structures hospitalières françaises, publiques ou privées, ne démérite pas par rapport aux données internationales déjà publiées. Elle promet surtout, pour les enquêtes à venir, de disposer d'un outil de référence pour évaluer la politique de lutte contre les ISO, comme on en dispose pour les maladies nosocomiales, en général.
* Analyse et rédaction du rapport : F. Goliot, A. Gresle ; coordination : P. Astagneau.
Les infections nosocomiales ont chuté de 12 % en 5 ans
Deux enquêtes nationales ont déjà été menées sur la prévalence des maladies nosocomiales en 1996 et 2001, mobilisant 1 533 établissements hospitaliers et 78 % des lits disponibles en France (« le Quotidien » du 6 mars 2002). Elles permettent d'observer une diminution de 12 % du taux des patients infectés et de 16 % du taux d'infection. Ces chiffres moyens recouvrent en fait une très grande diversité, entre les patients présentant peu d'antécédents médicaux (1 % de prévalence) et les sujets immunodéprimés âgés (16 %).
On monte même à un taux de 22 % d'infections chez les patients admis en réanimation, les voies urinaires et respiratoires étant les sièges les plus exposés.
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