Penser au couple et au nouveau-né

La contraception dans le post-partum

Publié le 25/02/2010
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Crédit photo : S Toubon

Principes généraux

Si le couple a le désir de reprendre une activité sexuelle en post-partum, le choix de la méthode contraceptive dépend de plusieurs critères : souhait de la patiente mode d’alimentation du nouveau-né, antécédents médical de la parturiente et facteurs culturels.

La contraception du post-partum peut être délivrée par le généraliste ou le spécialiste mais aussi par les sages-femmes qui sont autorisées à prescrire la contraception hormonale.

Quelles possibilités ? (1,2,3)

Avec les estroprogestatifs (EP) les risques principaux sont le risque cardio vasculaire et ceux liés au passage hormonal dans le lait.

En l’absence d’allaitement et de contre-indication aux EP, pour tenir compte du risque thrombogène, l’OMS indique que la contraception estroprogestative ne doit pas être débutée avant 21 jours suivant l’accouchement.

En cas d’allaitement, l’OMS recommande d’éviter les EP pendant les six premières semaines du post-partum et d’une manière générale durant les six premiers mois, arguant d’une diminution de la durée de la lactation et d’un passage hormonal dans le lait maternel qui pourrait avoir des effets indésirables sur la croissance du nouveau-né, ce qui est contesté par certains auteurs. De 1 à 2 % des stéroïdes passent dans le lait, et 0,02 % des estrogènes et 0,1 % des progestatifs se retrouvent chez le nourrisson. La prudence et le bon sens populaire impliquent de ne pas les utiliser. Dans le cas contraire, il faudra privilégier les formes les plus minidosés après six semaines si d’autres moyens ne sont pas acceptables, associés au début à une autre méthode contraceptive (préservatifs, spermicides).

L’anneau vaginal délivre des EP et est de ce fait soumis aux recommandations ci-dessus. Pour des raisons anatomiques ou cicatricielles, il est utilisable à partir de 6 à 8 semaines après l’accouchement (4).

Les microprogestatifs oraux n’ont pas de répercussions systémiques notables à partir des 7e-10e jours. L’effet est nul sur la lactation et probablement négligeable sur l’enfant d’où leur intérêt pendant l’allaitement même si l’OMS, dans ce cas, ne les recommande qu’au-delà de 6 semaines.

L’implant à l’étonogestrel a les mêmes avantages théoriques mais ne trouve pas dans le post-partum son indication élective.

Les progestatifs macrodosés sont peu conseillés, du fait de leurs effets secondaires ; ils sont par ailleurs trop dosés en cas d’allaitement.

Les progestatifs injectables (acétate de médroxyprogestérone) entraînent des métrorragies et des prises de poids, mais leur prescription, utile dans des indications psychosociales, est acceptable au cas par cas, à partir de la sixième semaine du post-partum en cas d’allaitement, avant dans le cas contraire, dès le 7e jour.

Les dispositifs intra-utérins peuvent être mis en place, par un médecin, après 6 semaines, à l’occasion par exemple de la visite postnatale. Après césarienne il n’y a pas d’argumentation scientifique pour exiger un délai empirique de 3 mois. En cas d’allaitement, l’insertion du stérilet au lévonorgestrel n’est préconisée qu’après quatre semaines après l’accouchement.

Les préservatifs représentent un moyen de contraception efficace dans cette période où la fécondité est faible et utilisable d’emblée, d’autant qu’ils sont souvent bien acceptés dans cette période.

Les diaphragmes nécessitent d’attendre la fin de l’involution utérovaginale au bout de 6 à 8 semaines, et s’appliquent mal à notre culture et à la demande des femmes.

Les spermicides voient dans le post-partum une indication privilégiée. Il n’y a pas de passage dans le lait maternel du chlorure de benzalkonium ou du miristalkonium et les spermicides à base de ces principes actifs ne sont pas contre-indiqués en cas d’allaitement.

La contraception d’urgence à base de progestatif est utilisable en cas de rapport survenu sans contraception à partir du 21e jour après l’accouchement.

Les méthodes naturelles sont d’emblée utilisables, malgré leur efficacité moindre, nécessitant une parfaite connaissance de ces techniques, afin de garantir une pratique rigoureuse. Parmi elles, l’aménorrhée lactationnelle ou Méthode Allaitement Maternel Aménorrhée (MAMA), est une méthode de choix chez la femme qui effectue un allaitement complet, avec un indice de Pearl à 2 % seulement les 6 premiers mois (2).

En pratique (1,5)

Chez les femmes allaitantes

Le 1er mois, les rapports sont plutôt rares et l’ovulation bien inhibée si l’allaitement est total ; de ce fait la contraception est peu utile : si besoin, les méthodes locales et naturelles sont préconisées mais en cas d’anxiété contraceptive et de souhait exprimé par la patiente, il est possible d’utiliser une micropilule sans réserve.

Le 2e mois, l’ovulation reste presque complètement inhibée et les méthodes locales demeurent préconisées jusqu’à la visite postnatale. On peut sans réserve commencer ou poursuivre une micropilule mais utiliser une pilule EP est possible dès 6 semaines, préférentiellement celle déjà connue de la patiente à la condition qu’il s’agisse d’une minipilule. Un DIU peut idéalement être placé vers 6 semaines à la visite postnatale.

Chez les femmes qui n’allaitent pas

Jusqu’au retour de couches, la plupart des couples ont une préférence pour les méthodes locales (préservatif, ovules), d’autant que l’activité sexuelle est plutôt rare. Si la femme a reçu 14 jours de bromocriptine pour inhiber la lactation, le retour de couches est volontiers précoce, précédé parfois d’ovulation, et il faut sensibiliser les femmes à l’importance de la contraception qui peut faire appel aux méthodes locales mais qui peut aussi utiliser un EP dès le 21e jour si la patiente en exprime le désir et si elle ne fume pas. La micropilule est utilisable sans réserve dès le 10e jour et un DIU peut être posé dés le retour de couches. Chez une patiente qui n’a pas reçu de bromocriptine du fait d’une contre-indication au produit (troubles psychiatriques, HTA…) méthodes naturelles ou micropilule sont à conseiller.

Conclusion

Aborder la contraception peut paraître incongru dans les suites de couches immédiates chez une femme plus à l’écoute de son bébé que de sa sexualité. Le counseling et la démarche éducative ont fait preuve de leur efficacité en matière de contraception. Ils doivent commencer de préférence avant la naissance, quand l’attention de la future mère est encore disponible. Ils font intervenir tous les acteurs de la médecine périnatale dont les patientes attendent écoute et information afin d’arrêter leur choix contraceptif.

BIBLIOGRAPHIE

1. Agence Nationale d’accréditation et d’évaluation de santé (ANAES) Stratégies de choix des méthodes contraceptives chez la femme. dec. 2 004

2. Contraception du post partum. Quéreux C, Graesslin o, Gavillon N. « Contraception » collection abrégés Masson edit 2 007 368-373

3. Faculty of family planning and reproductive health care clinical effectiveness unit : FFPRHC guidance July 2 004 contraceptive choice for breastfeeding women ; « Journal of Family Planning and Reproductive Health Care », 2004 :30 181-7

4. Graesslin O, Dedecker F, Grolier F, Quereux C : Patch, anneaux, implants… : les nouvelles contraceptions hormonales. Mises à jours en Gynécologie Obstétrique2004209-232

5. Quéreux C Contraception Revue du praticien 2003,53 781-789

Pr CHRISTIAN QUÉREUX Dr ODILE MAURICE  Dr NICOLAS GAVILLON Institut Mère Enfant Alix de Champagne 45 rue Cognacq-Jay 51092 ReimsCEDEX.

Source : Le Quotidien du Médecin: 8717