Polyarthrite rhumatoïde : de nouvelles alternatives thérapeutiques

Les anti-TNF alpha : une avancée majeure

Publié le 03/01/2001
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L es anti-TNF alpha ont été développés spécifiquement pour agir contre le TNF (Tumor Necrosis Factor) alpha dont on connaît le rôle pathogène dans la PR, selon deux approches : la première qui consiste à bloquer le TNF circulant, c'est l'infliximab ou Rémicade (développé par les Laboratoires Schering-Plough, utilisé en perfusion intraveineuse) commercialisé en France depuis le mois d'août, et la seconde qui est fondée sur l'utilisation de récepteurs solubles du TNF, c'est le principe de l'étanercept ou Enbrel (des Laboratoires Wyeth-Ayerst, utilisé sous forme d'injection sous-cutanée à raison de 25 mg deux fois par semaine).

Une réponse clinique parfois spectaculaire

L'action de l'étanercept est fondée sur l'injection de récepteurs solubles en quantité suffisante, afin de bloquer l'action du TNF avant qu'il n'atteigne les cellules. « C'est un produit extrêmement puissant, souligne le Pr J. Sany (service d'immunorhumatologie, hôpital Lapeyronie, Montpellier)  : schématiquement, de 60 à 70 % des patients répondent au traitement et 10 à 15 % d'entre eux sont transformés dans les semaines, voire dans les jours qui suivent les premières injections. » La réponse clinique peut donc être parfois spectaculaire. La fatigue disparaît rapidement, la qualité de vie se transforme parfois radicalement dans certains cas, avec retour à la normale et reprise de l'activité professionnelle. Parallèlement à cette réponse clinique, les constantes biologiques s'améliorent, ainsi que, à plus long terme, les lésions radiologiques : l'étanercept, comme l'infliximab (voir encadré), semble capable de stopper ou de limiter l'évolution radiologique après un an de traitement.
Environ quatre-vingt mille patients sont traités par l'étanercept aux Etats-Unis, où il a obtenu l'AMM en 1998. Actuellement commercialisé dans certains pays européens, il est indiqué dans la polyarthrite active résistante à au moins un autre traitement de fond, notamment le méthotrexate, et dans la polyarthrite active et sévère de l'enfant.

Un suivi régulier

La prescription d'étanercept est pour l'instant réservée au rhumatologue et disponible en France sur ATU* à l'hôpital. Le TNF jouant un rôle important dans la défense anti-infectieuse et néoplasique, le suivi régulier du patient est fondamental, avec des bilans cliniques, biologiques et radiologiques approfondis, surtout pendant les trois premiers mois, et le respect de certaines contre-indications (absolues ou relatives : antécédents néoplasiques ou hématologiques, maladies chroniques, comme le diabète, susceptible de favoriser la survenue d'infections...).
« Si les anti-TNF semblent représenter une réelle avancée dans la prise en charge de certaines PR sévères et invalidantes, leur coût reste élevé : environ 85 000 F• par an et par patient pour l'étanercept, précise le Pr Sany. Mais leur efficacité est telle qu'ils permettent probablement d'éviter certaines hospitalisations et gestes chirurgicaux, sans oublier le retour à la vie professionnelle de certains patients. »

* Autorisation temporaire d'utilisation, délivrée par l'Agence du médicament, à l'hôpital, dans certains cas de PR actives et sévères.

Rémicade, indiqué dans les formes réfractaires de la PR

Rémicade (infliximab) est un anticorps monoclonal chimérique dirigé contre le TNF alpha, dont l'efficacité a été démontrée chez les patients souffrant de PR active et ne répondant pas aux traitements de fond conventionnels, notamment par l'étude ATTRACT (Anti-TNF Trial in Rheumatoid Arthritis with Concomitant Therapy). Cette étude multicentrique, randomisée, contrôlée, contre placebo, a été menée par R. N. Maini et coll. (hôpital Charring Cross, Londres) chez 428 patients souffrant de PR active pour comparer l'efficacité de Rémicade, administré en association avec le méthotrexate, à celle d'une association placebo-méthotrexate. Tous les patients avaient une PR insuffisamment contrôlée par plusieurs traitements de fond, y compris le méthotrexate administré à la dose moyenne de 15 mg/semaine. Deux doses ont été testées : 3 mg/kg et 10 mg/kg administrés toutes les quatre ou huit semaines. Après trente semaines de traitement, 50 et 52 % des patients recevant respectivement 3 mg/kg et 10 mg/kg de Rémicade associé au méthotrexate étaient répondeurs, contre 20 % dans le groupe méthotrexate seul. Avec Rémicade, l'amélioration observée dès la 3e semaine s'est prolongée pendant plus de cinquante-quatre semaines.
L'étude ATTRACT montre également une nette amélioration des capacités fonctionnelles et de la qualité de vie des patients traités par Rémicade et méthotrexate, significativement plus élevée que chez les patients recevant du méthotrexate seul (23 % contre 4 %).
Enfin, après un suivi de 1 440 patients-années, le traitement par Rémicade est apparu bien toléré. Les effets indésirables les plus fréquents étant les infections des voies aériennes supérieures et les réactions dermatologiques aux points d'injection, l'incidence des infections sévères n'étaient, semble-t-il, pas plus élevée que dans le groupe placebo. De même, le pourcentage d'affections malignes chez les patients traités par Rémicade n'a pas été significativement supérieur à celui attendu dans cette tranche d'âge.

Dr A. DUMONCEAU

Source : lequotidiendumedecin.fr: 6828