Vous avez participé à l'élaboration de l'enquête sur l'état de santé des soignants. Avez-vous été surprise des résultats ?
Dr Marine Crest-Guilluy : Oui, j'ai été surprise. Même si les chiffres confirment les tendances des études précédentes, les réponses que nous avons récoltées montrent que les professionnels de santé vont globalement mal. Nous avons reçu au total les réponses de 50 000 soignants issus de toute la France. Ce qui est étonnant, c'est que la majorité se déclarent en état de stress, avec des troubles de concentration ou encore des troubles du sommeil. Mais, paradoxalement, certains s'estiment plutôt en « bon état de santé ». Cela montre que finalement, il y a très souvent un fossé entre la perception des soignants sur leur état de santé et la réalité. Nous attendons maintenant que les résultats de l'enquête soient affinés par Opinion Way afin d'analyser les chiffres profession par profession.
Sur quels autres axes travaille la mission ?
Dr M. C.-G. : Le rôle de cette mission ministérielle est de recueillir des idées et projets d'acteurs engagés dans la santé des professionnels de santé ou qui veulent s'investir davantage, de centraliser tout ce qui existe pour, in fine, coordonner et développer sur le territoire les actions et dispositifs qui fonctionnent. Nous souhaitons également identifier des projets porteurs qui ont du mal à se développer par manque de moyens, de communication ou de connaissances. Nous avons créé, fin mars, avec le Dr Philippe Denormandie, chirurgien neuro-orthopédique, et Alexis Bataille-Hembert, infirmier, qui font tous deux partie de la mission, une adresse mail pour centraliser toutes ces contributions. Nous en avons déjà reçu une centaine. Depuis, le ministère de la Santé a créé une page dédiée, sur laquelle tout le monde peut apporter sa contribution.
Certaines pistes pour améliorer la santé des soignants se dégagent-elles déjà ?
Dr M. C.-G. : Les idées fusent et les contributions sont toutes très riches. Mais au vu des résultats de l'enquête et de par mon expérience au sein de l'association Guérir en mer, où je rencontre de nombreux soignants en état d'épuisement professionnel, je pense qu'un travail de sensibilisation va s'imposer. On remarque en effet que les soignants n'ont souvent pas conscience qu'ils ne vont pas bien. C'est problématique. Le train de mesures que nous proposerons portera donc sur l'éducation en santé mais aussi sur la façon dont les soignants sont soignés. Nous allons notamment travailler sur l'accès à la médecine du travail pour les hospitaliers et nous concentrer sur les différents moyens d'inciter les professionnels de santé de ville à déclarer un médecin traitant. Je pense aussi que nous devons trouver des solutions pour réduire la charge administrative des médecins. Toute cette stratégie devra être détaillée fin juin par Agnès Firmin Le Bodo. Une fois la feuille de route établie, des actions à plus ou moins long terme seront engagées. Mais une chose est sûre : nous n'avons plus le temps d'attendre !
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