L'accord-cadre interprofessionnel (ACIP), ou socle du nouveau système conventionnel issu de la loi du 6 mars 2002, ressemble décidément à un navire qui s'échoue sur un écueil chaque fois qu'il semble arriver au port. Pour la deuxième fois, le conseil d'administration du Centre national des professions de santé (CNPS, auquel adhèrent 25 syndicats de professionnels libéraux) a refusé de donner mandat à son président, le chirurgien-dentiste Jacques Reignault, pour qu'il signe l'ACIP avec les caisses d'assurance-maladie.
Le président Reignault a manqué le feu vert du conseil d'administration du CNPS à une voix près. Il n'a obtenu en effet que 69 voix pour, alors qu'il lui en fallait 70, soit les deux tiers des 105 voix de l'ensemble des administrateurs.
En décembre, une précédente version de l'ACIP avait recueilli seulement 64 voix.
Au fil de multiples remaniements (« le Quotidien » du 1er avril), l'ACIP s'est vidé des principaux sujets qui fâchent, comme la télétransmission ou la formation continue, renvoyant les modalités détaillées à des commissions ultérieures ou aux conventions spécifiques des professions de santé libérales (médecins, biologistes, chirurgiens-dentistes, kinés, infirmiers, sages-femmes, orthophonistes, orthoptistes, transporteurs sanitaires). Le texte qui était soumis au vote « n'est plus contesté sur le fond », souligne le masseur-kinésithérapeute François Maignien, vice-président du CNPS. « Mais il y a une articulation de l'ACIP avec les conventions spécifiques et cela a suffi pour constituer une minorité de blocage », poursuit François Maignien.
Au sein de cette minorité de refus figurent notamment les syndicats de médecins libéraux CSMF, SML, FMF et la Fédération nationale des infirmiers (FNI). « La tentative de contournement de l'opposition des médecins a échoué », commente le Dr Michel Chassang, président de la CSMF. Pour lui, il ne peut y avoir d'ACIP en l'absence de convention spécifique pour l'ensemble des médecins (généralistes et spécialistes). « On n'a pas envie de faire plaisir aux caisses qui tiennent, en termes d'affichage, à un accord avec l'ensemble des professionnels de santé », ajoute le président de la CSMF.
Rendez-vous le 24 avril
Une ambiance délétère est perceptible au sein même du CNPS, où les uns accusent un syndicat d' « acheter des voix », tandis que d'autres déplorent le refus d'une procuration donnée in extremis par la Fédération des audioprothésistes pour cause de grève de transport...
Quoi qu'il en soit, un autre conseil d'administration du CNPS est prévu le 24 avril. François Maignien ne sait pas encore si l'ACIP sera à nouveau soumis au vote ce jour-là. Mais si un nouveau scrutin ne permet pas au conseil d'administration de se prononcer, le vice-président du CNPS redoute une reprise en main par le gouvernement du socle conventionnel, dans le cadre de la réforme pour une « nouvelle gouvernance » de l'assurance-maladie.
Quant au Dr Pierre Costes, président de MG-France, favorable à l'ACIP depuis le début, il reste confiant car « le groupe de refus s'étiole » au fil du temps. Après tout, fait-il remarquer, « il a fallu deux ou trois reférendums avant que certains pays n'adhèrent à la construction européenne ».
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