En 2001 et 2002, des publications de Stéphane Laurent, Pierre Boutouyrie (INSERM U107) et leurs collaborateurs avaient respectivement montré la valeur prédictive de la rigidité artérielle sur la mortalité générale puis sur la survenue de maladies coronariennes. La même équipe montre maintenant (1) que la rigidité artérielle est associée à un risque accru de mortalité par accident vasculaire cérébral (AVC).
Si l'âge, l'environnement et les facteurs génétiques sont connus pour réduire l'élasticité des parois artérielles, jusqu'à présent, le rôle causal de la rigidité artérielle dans les décès par AVC restait controversé.
Le travail de Stéphane Laurent (directeur de l'équipe INSERM U107) et ses collaborateurs a porté sur une cohorte de 1 715 sujets ayant une hypertension artérielle modérée, qui ont été suivis à partir de 1981. A l'entrée dans l'étude, ces sujets n'avaient pas de symptômes d'AVC, de maladie coronarienne ni de maladie cardio-vasculaire. Tous ont été suivis en moyenne pendant plus de huit ans.
La vitesse de propagation de l'onde de pouls
La rigidité artérielle est mesurée par le calcul de la vitesse de propagation de l'onde de pouls (VOP), c'est-à-dire la vitesse de propagation, le long de l'aorte, de l'onde produite par l'ébranlement de l'aorte lors de l'éjection systolique. Il s'agit de mesurer le décalage de temps écoulé entre la carotide et l'artère fémorale, cela grâce à des capteurs mécanographiques.
Au cours de ce travail, sont survenus 157 décès, dont 25 par AVC et 35 à la suite d'un événement coronarien. Les chercheurs ont calculé le risque relatif de décès par AVC en fonction de la vitesse de propagation de l'onde de pouls. Résultat : ce risque est augmenté de 72 % à chaque variation de la VOP de 4 mètres par seconde.
Il faut préciser que la valeur prédictive de la VOP est significative, indépendamment des facteurs de risque classiques (âge, cholestérol, diabète, tabac, pression artérielle moyenne).
Chercher à améliorer la rigidité artérielle
Comment expliquer cette association ? La perte d'élasticité des parois artérielles entraîne une élévation de la systolique, facteur de remodelage et d'athérosclérose des carotides et des artérioles cérébrales. Par ailleurs, l'insuffisance coronaire et l'insuffisance cardiaque, favorisées par une élévation de la rigidité artérielle, sont aussi des facteurs de risque d'AVC.
Cette étude montre donc l'intérêt du calcul de la VOP dans la détection des patients hypertendus à haut risque d'AVC.
L'équipe de Stéphane Laurent souhaite maintenant trouver les moyens d'améliorer la rigidité artérielle, indépendamment de la baisse de la PA, moyens susceptibles de s'appliquer aux patients non hypertendus.
Cela dit, il faut maintenant vérifier sur un grand échantillon de patients que la prise en compte de la VOP permet d'améliorer le pronostic grâce à une stratégie thérapeutique adaptée.
Enfin, la mesure de la VOP pourrait, à terme, remplacer ou renforcer les scores de risque pour détecter les patients à haut risque cardio-vasculaire.
(1) S. Laurent, S. Katsahian, C. Fassot, A.-I. Tropeano, I. Gautier, B. Laloux et P. Boutouyrie. Etude à paraître en mai dans « Stroke ».
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature