Incontinence urinaire chez les seniors

Un bilan urologique, mais aussi général

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Publié le 06/06/2017
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INCONTINANCE

INCONTINANCE
Crédit photo : PHANIE

La miction met en jeu des phénomènes complexes. Sur le plan anatomique, la mécanique locale fournie par les structures de soutien des viscères pelviens équilibre la pression des sphincters, de la vessie et du périnée (1).

Sur le plan neurologique, un bon fonctionnement du SNC et un équilibre du système nerveux végétatif sont indispensables, de même que la sécrétion de l’hormone antidiurétique commandée par l’hypophyse.
La définition de l’incontinence urinaire a été précisée dans un rapport sur la standardisation de la terminologie des fonctions du bas appareil urinaire (1). Il s’agit de « toute perte involontaire d’urine dont se plaint le patient ». Les auteurs distinguent l’incontinence urinaire d’effort, ou perte involontaire d’urine survenant lors d’un effort musculaire, et l’incontinence urinaire par impériosité ou « urgenturie », à la suite d’une envie pressante non maîtrisable. L’incontinence urinaire peut également être mixte. Enfin, l’incontinence par regorgement correspond aux débordements par trop-plein de certaines vessies.

Il est difficile d’estimer la prévalence exacte de l’incontinence car tous les patients ne consultent pas. Néanmoins, dans la population féminine, elle varie, selon les études, de 10 à 57 %. Cette prévalence augmente avec l’âge.

Chez l’homme, cette prévalence a été moins étudiée. Concernant l’hyperactivité vésicale, ou incontinence par urgenturie, on ne retrouve pas de différence notable entre les deux sexes, avec une augmentation de la prévalence liée au vieillissement. Quant à l’incontinence urinaire d’effort chez l’homme, elle est consécutive à la prise en charge d’une pathologie prostatique dans la majorité des cas. Ainsi, après prostatectomie totale pour cancer de la prostate, l’incidence de l’incontinence persistante au-delà de 6 mois est d’environ 25 %, 3 à 5 % des patients ayant une incontinence totale permanente justifiant une prise en charge chirurgicale.
Avec l’âge, le vieillissement des tissus et du système nerveux entraîne une perte d’élasticité de la vessie et une perte de contractilité. Ainsi, chez les hommes comme chez les femmes, la continence est menacée avec l’âge, la femme étant concernée plus précocement et plus souvent pour des raisons morphologiques.

Réduire le surpoids, réguler la diurèse

Bien que de nombreux facteurs de risque aient été évoqués pour l’incontinence urinaire, il y en a peu pour lesquels le lien de causalité soit certain et pour lesquels une intervention visant à réduire ce facteur de risque permette de réduire le risque d’incontinence urinaire. Le facteur le mieux étudié est le surpoids, clairement associé à l’incontinence et dont la réduction réduit d’environ 50 % les épisodes d’incontinence. Les prolapsus génitaux sont également associés à l’incontinence urinaire. Leur traitement chirurgical réduit l’incontinence. Les données concernant plusieurs autres facteurs de risque classiquement associés à l’incontinence, comme la ménopause, l’hypoestrogénie et l’accouchement par voie basse, sont contradictoires. En revanche la polyurie nocturne d’origine multifactorielle et diagnostiquée sur le calendrier mictionnel est clairement un facteur aggravant.

La prise en charge de l’incontinence varie selon son type, la gêne induite, l’âge du patient, son état général et ses comorbidités (3). Un bilan complet, urologique mais aussi général, est donc nécessaire.
La personne âgée peut bénéficier des mêmes traitements que le sujet jeune, sous réserve de son état général. La rééducation périnéale est proposée à des patients motivés aux fonctions cognitives préservées. Les médicaments doivent être prescrits à bon escient chez la personne âgée polymédicamentée.
Les traitements chirurgicaux peuvent être décidés si l’état général le permet. Cependant, leurs résultats dépendent de la qualité des tissus structures de soutien des viscères pelviens. Les sphincters artificiels sont proposés en dernier recours en cas d’incontinence urinaire sévère d’origine sphinctérienne.

(1) Yiou R, Costa P, Haab F, Delmas V. Anatomie fonctionnelle du plancher pelvien. Prog Urol 2009; 19(13): 1-9916-925.
(2) Haab F, Amarenco G, Coloby P, et al. [Terminology of lower urinary tract dysfunction: French adaptation of the terminology of the International Continence Society]. Prog Urol 2004;14(6):1103-11.
(3) Thuroff JW, Abrams P, Andersson KE, et al. EAU guidelines on urinary incontinence. Eur Urol 2011; 59(3): 387-400.

Dr Gérard Bozet

Source : Le Quotidien du médecin: 9586