Maladie génétique rare, une naissance/20000, le syndrome de Prader-Willi (SPW) se traduit chez le nouveau-né par une hypotonie et des troubles de la succion-déglutition, avant que n'apparaissent vers l 'âge de deux ans une obésité avec hyperphagie et troubles de la satiété.
Pendant longtemps mal explicitée, la physiopathologie du SPW est aujourd'hui mieux comprise grâce aux travaux réalisés ces dernières années qui reposent sur une meilleure connaissance de l’histoire naturelle de la maladie et une description fine en particulier du phénotype précoce.
Deux anomalies hormonales découvertes
Des travaux récents ont permis de mettre en évidence des taux élevés de ghréline (hormone orexigénique) dès la période néonatale, taux qui restent régulés et tendent à baisser avec l'indice de masse corporelle et l'âge. Ces données, rapportées en 2008, ont été complétées par des résultats récents, qui font état d'une élévation de la ghréline acylée, donc de la forme active, avec un déficit relatif en ghréline désacylée (1) chez les patients avec un SPW après les 3 premières années. "Nous avons récemment montré qu’à l’inverse, chez le nourrisson avec un SPW, les taux de ghréline désacyléee sont très hauts et expliquent l’anorexie de cette période", indique le Pr Maïthé Tauber. Les mécanismes expliquant le switch entre ces deux phases sont encore inconnus.(2)
Autre piste de recherche explorée: celle des anomalies du système ocytocinergique, observées sur deux modèles murins de SPW: souris necdine KO et souris MAGEL 2 KO (du nom de deux gènes de la région SPW) et chez l'homme.
Parallèlement, grâce à l'utilisation de cellules souches pluripotentes induites (iPS), les recherches ont montré qu'il existe une anomalie de la régulation de la proconvertase 1, qui entraîne un défaut de maturation hormonale, notamment de l'insuline, de la ghréline et de l'ocytocine.
"La mise au jour de ces deux anomalies hormonales -l'hyperghrélinémie totale et le défaut du système ocytocinergique, ouvre des perspectives thérapeutiques innovantes ", souligne le Pr Tauber.
Un laboratoire français a produit un analogue de la ghréline désacylée (AZP 531), dont le potentiel thérapeutique parait se confirmer au terme d'une étude de phase 2a européenne. Après 14 jours de traitement chez des patients âgés de 13 à 46 ans, une amélioration du comportement alimentaire a été rapportée.
La voie de l'ocytocine fait également l'objet de recherches en particulier au CHU de Toulouse . Après des premières données expérimentales (3,4,), une étude de phase 2 montre en effet que l'administration précoce d'ocytocine, chez des nourrissons de moins de 6 mois, améliore la succion et la relation avec la maman et son entourage (5).
Un modèle d'étude des troubles alimentaires
"Le SPW est un bon modèle pour étudier les troubles du comportement alimentaire à début précoce, notamment la succession anorexie, boulimie et obésité secondaire, souligne le Pr Tauber. C'est une maladie du neurodéveloppement, avec des dysfonctions hypothalamiques et endocriniennes , ce qui permet d’envisager des traitements correcteurs. Ce syndrome peut sans doute servir de modèle de prise en charge des obésités sévères, qui nécessiteront très certainement un traitement combiné et différentes molécules, dont l'ocytocine, sont actuellement évaluées dans l'obésité chez l'adulte".
Le diagnostic très précoce de la maladie, fait à 17 jours de vie en France aujourd’hui, permet d’envisager la mise en place de traitements ultra précoces modificateurs de la maladie, associée à une prise en charge précoce et multidisciplinaire, souligne le Pr Tauber.
La France est l'un des pays leaders dans la recherche et le soin sur cette maladie rare, recherche qui se nourrit de la clinique et vice versa."
D'après un entretien avec le Pr Maïthé Tauber, CHU, Toulouse.
(1) Kuppens RJ et al. Endocrine. 2015 Dec;50(3):633-42.
(2) Beauloye V et al. Orphanet Journal of Rare Diseases201611:56
(3) Schaller F et al. Hum Mol Genet. 2010 Dec 15;19(24):4895-905.
(4) Meziane H et al. Biol Psychiatry. 2015 Jul 15;78(2):85-94.(45 Tauber M et al. Pediatrics. 2017 Feb;139(2). doi: 10.1542/peds.2016-2976.
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