Dans une population de primates non humains infectés par le virus Zika, 26 % des cas se sont soldés par un avortement spontané, un décès in utero ou un décès à la naissance, selon une étude américaine. Les résultats sont publiés dans « Nature Medicine ».
« Les taux élevés de décès fœtaux chez les primates non humains infectées par le virus Zika font craindre que l'interruption de grossesse associée au virus chez les humains soit plus fréquente qu'on ne le pense actuellement », soulignent les auteurs, précisant que ce phénomène est sans doute sous-estimé en raison du caractère asymptomatique fréquent de l'infection. Une récente étude a montré un taux d'avortement spontané de 6 % dans une cohorte de femmes symptomatiques.
Un risque accru en cas d'infection au début de la gestation
Sur 50 gestations de singes femelles (43 macaques rhésus, 5 macaques à queue-de-cochon et 2 marmousets), 13 avortements spontanés ont été observés (26 %), auxquels s'ajoutent trois décès de nouveau-nés survenus peu après la naissance. Le taux de décès fœtal varie de 4 à 10,9 % parmi les macaques non exposés,
Chez les macaques rhésus infectées par le virus (11 décès sur 40 gestations, 3 animaux n'ayant pas pu être comparés aux contrôles), le risque de décès fœtal est multiplié par quatre par rapport à leurs congénères non infectées. Dans plus de la moitié des cas, la mort du fœtus survient dans la deuxième moitié de la gestation. « Une étape où le taux naturel d'interruption de grossesse chez la femme est très faible à 0,1 % », précisent les auteurs.
Chez les macaques à queue-de-cochon, aucun décès n'a été observé chez les cinq infectées, alors que le taux de décès parmi les non infectées était de 10,9 %. En revanche, les deux gestations chez des marmousets gestantes ont conduit à des décès chez le fœtus, le taux de décès étant de 4,4 % chez les femelles non infectées.
Le moment de l'infection est par ailleurs un facteur important. En effet, parmi les macaques dont le virus a été inoculé après le 55e jour de gestation, aucun décès n'a été observé. En revanche, 37,8 % de décès sont à noter parmi celles infectées avant. Un constat cohérent avec les observations faites chez l'Homme, pour lequel le premier trimestre est particulièrement à risque.
Complication aussi fréquente que les malformations congénitales ?
L'autopsie des tissus fœtaux ainsi que des tissus maternels et extra-embryonnaires (c'est-à-dire tous les tissus impliqués dans l'interface materno-fœtale dont le placenta et le liquide amniotique) a mis en évidence dans de nombreux cas la présence de l'ARN du virus, ainsi qu'une inflammation des tissus. L'histopathologie a de plus révélé des pathologies oculaires et pulmonaires notamment. Trois décès ont été associés à une rupture prématurée des membranes, et un cas a été associé à une dilatation cervicale prématurée.
Les examens échographiques révèlent aussi une augmentation de la calcification placentaire. « Ces résultats suggèrent que la pathologie placentaire peut être liée au décès fœtal, et la fonction placentaire doit être soigneusement évaluée dans les cas de décès fœtaux liés à l'infection par le virus Zika », soulignent les auteurs.
« Nous avons encore beaucoup à apprendre sur le virus Zika. Les décès fœtaux sont étonnamment fréquents chez les singes infectés au cours du premier trimestre de gestation », indique au « Quotidien » Dave O'Connor, un des auteurs de l'étude. II conclut : « Il est possible que pour les femmes vivant dans des zones endémiques, l'infection par le virus Zika augmente significativement le risque de fausse couche et que cela soit une complication au moins aussi fréquente que les malformations congénitales plus largement reconnues résultant de l'infection congénitale par le virus Zika ».
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