Trois modalités thérapeutiques sont proposées au patient, le plus souvent en association, et après avis d’une réunion de concertation pluridisciplinaire oncologique ORL (RCP) : la chimiothérapie, la radiothérapie et la chirurgie. Le travail de l’équipe de cancérologie ORL se fait en collaboration étroite avec les oncologues médicaux, les radiologues, les médecins de la douleur, les internistes, les anesthésistes, le centre de diététique, les kinésithérapeutes et l’unité de soins palliatifs.
La mise en route du traitement doit comprendre plusieurs objectifs :
• expliquer au patient les avantages et les risques respectifs des divers schémas thérapeutiques proposés. Une consultation d’annonce structurée est indispensable (Plan Cancer). Pour de nombreuses localisations, il n'existe pas de protocole unique, unanimement admis : plusieurs options thérapeutiques sont souvent possibles ; elles imposent une discussion ouverte avec le patient ;
• Améliorer la survie du patient ;
• Préserver au mieux les fonctions physiologiques cervico-faciales (phonation, respiration, déglutition) et limiter les conséquences esthétiques du traitement ;
• Préserver les options thérapeutiques pour le traitement d’une éventuelle seconde localisation métachrone ;
• Accompagner le patient quand un traitement palliatif est la seule option envisagée ;
• Travailler en collaboration étroite avec le médecin et l’ORL référents.
Première option thérapeutique : la chimiothérapie
La chimiothérapie des carcinomes épidermoïdes ORL repose actuellement sur les sels de platine, le fluoro-uracile, les taxanes et les thérapeutiques ciblées. L’introduction de la chimiothérapie en cancérologie ORL dans les années 1980, puis son essor durant les 20 dernières années a permis d’améliorer la survie à moyen terme et de préserver certaines fonctions physiologiques en évitant une chirurgie mutilante (protocoles de préservation d’organe).
Quatre modalités thérapeutiques sont le plus souvent utilisées :
• Un protocole de chimiothérapie « néo-adjuvante » comprenant des associations médicamenteuses, prescrites sous forme de cures de 4 à 6 jours, séparées de 21 jours de repos, précédant un traitement principal soit chirurgical, soit radiothérapique ;
• Un protocole de radio-chimiothérapie associant la chimiothérapie et la radiothérapie durant les mêmes séquences ;
• Un protocole de chimiothérapie complémentaire, après un traitement chirurgical ou radiothérapique ;
• Un protocole de chimiothérapie palliative.
Le médecin référent a un rôle clé dans la surveillance et la prise en charge des effets secondaires de la chimiothérapie car ceux-ci surviennent le plus souvent lorsque le patient est retourné à son domicile et n’est plus hospitalisé au sein de la structure de soin où travaille l’équipe carcinologique qui gère le traitement.
Deuxième option thérapeutique : la chirurgie
Malgré les progrès de la chimiothérapie et de la radiothérapie, la chirurgie reste le traitement de base en cancérologie ORL (certains disent le « gold standard ») car elle permet d’obtenir le meilleur taux de contrôle loco-régional qui est la clef de la survie à long terme. Les techniques chirurgicales se sont multipliées ces vingt dernières années imposant la prise en charge du patient par une équipe de cancérologie ORL expérimentée.
On distingue deux types de chirurgie :
• Une chirurgie partielle, permettant le plus souvent de garder les fonctions physiologiques du carrefour aéro-digestif : laryngectomie partielle, pharyngectomie partielle, chirurgie partielle de la cavité orale. Certains actes de chirurgie partielle sont actuellement réalisés au laser par voie endoscopique ; la place de la chirurgie par robot est actuellement évaluée.
• Une chirurgie totale, conduisant à une ablation de l’organe, comme la laryngectomie totale imposant la réalisation d’un trachéostome définitif.
De nombreuses techniques de reconstruction ont été développées lorsque des résections étendues ont été nécessaires.
Troisième option thérapeutique : la radiothérapie
La radiothérapie est actuellement assistée par ordinateur (IMRT OU RCMI). Deux types de protocoles de radiothérapie sont possibles en cancérologie ORL :
• Une radiothérapie première, alternative à un acte chirurgical. Les doses usuelles sont voisines de 70 Gy. Une chirurgie de rattrapage après radiothérapie première est toujours une chirurgie à risque en raison des difficultés de cicatrisation sur un cou irradié ;
• Une radiothérapie complémentaire après un traitement chirurgical. Les doses usuelles sont entre 46 et 66 Gy selon les analyses anatomo-pathologiques.
Les complications de la radiothérapie cervicale sont :
• Une diminution avec acidification de la salive générant un risque accru de caries dentaires, souvent situées au niveau du collet des dents. Ceci impose non seulement une mise en état de la dentition avant le début de la radiothérapie mais aussi une surveillance stricte de l’état dentaire des patients ayant bénéficié d'une radiothérapie cervicale. La décision d’effectuer des soins ou des extractions dentaires impose l’accord du radiothérapeute et de l’ORL ;
• Les brûlures muqueuses (stomatites) sont fréquentes durant la radiothérapie. Elles conduisent souvent le patient à limiter son alimentation induisant une perte de poids parfois importante qu’il convient de surveiller attentivement. Des soins de bouche sont souvent nécessaires (sérum bicarbonaté avec un antifongique, un antiseptique et un anesthésique de contact).
• L’ostéoradionécrose après radiothérapie est une complication grave. Les douleurs sont souvent importantes imposant l'utilisation d'antalgiques centraux, voire l’exérèse des zones nécrotiques.
• D'autres complications moins fréquentes doivent être détectées : hypothyroïdie, sténoses des vaisseaux du cou.
Les suites du traitement
Une fois le traitement terminé, les suites sont souvent difficiles à gérer du fait du terrain : patients alcoolo-tabagiques, souvent de niveau socioculturel faible.
La reprise de la vie professionnelle est un problème considérable : 70 % des laryngectomisés ne reprennent pas le travail. Certains employeurs refusent d'embaucher des patients laryngectomisés pour des raisons d'hygiène liées à la présence du trachéostome. Les laryngectomisés ont également souvent des difficultés à faire des efforts importants en raison de l'impossibilité de bloquer la respiration du fait du trachéostome. Les problèmes psychologiques liés à la perte (laryngectomie totale) ou aux modifications de la voix induisent des états anxieux et dépressifs avec une irritabilité, des insomnies.
La crainte la plus fréquente est la peur de ne pas retrouver sa place dans sa famille et dans sa vie professionnelle, d’être exclus. La préparation de la famille, en particulier du conjoint, avant une laryngectomie totale est importante ; elle peut être facilitée par la visite d'anciens laryngectomisés (Association Française des Laryngectomisés et des Mutilés de la Voix [UFMV]). Le rôle du médecin référent est essentiel dans cette phase initiale du retour en famille. La réintégration sociale doit être encouragée et surveillée attentivement par la famille et par le médecin référent.
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