Neuro-vasculaire

CONDUITE À TENIR DANS LES PREMIÈRES HEURES DE l'AVC

Publié le 18/05/2012
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Tout AVC constituant une urgence, l'appel au 15 est la règle. La prise en charge des premières heures conditionne en effet le pronostic, y compris en cas d'accident ischémique transitoire.

Crédit photo : ©BSIP/NEIL BORDEN

L’accident vasculaire cérébral (AVC) ne concerne pas que le grand âge : le quart des 130 000 nouveaux cas d’AVC qui surviennent en France chaque année concernent des patients de moins de 65 ans ; plus de la moitié affecte les plus de 75 ans (1). C’est la première cause de handicap acquis de l'adulte, 2e cause de démence après la maladie d'Alzheimer et 3e cause de mortalité dans notre pays (2e cause de mortalité dans le monde). Après un premier AVC, le risque de récidive dans les 5 ans est estimé entre 30 et 43 %.

S'agissant des séquelles, le pourcentage de patients très dépendants physiquement à la fin du séjour hospitalier reste de 43,2 % (1). Et selon les enquêtes "Handicap santé ménages" (2008) et "Handicap santé institution" (2009), 2/3 des personnes ayant déclaré un antécédent d'AVC rapportent la présence de séquelles, le plus souvent des troubles de l'équilibre et des troubles de la mémoire (2).

Huit AVC sur dix sont d'origine ischémique, les principales causes étant l'athérosclérose, les embolies d'origine cardiaque et la maladie des petites artères (infarctus la-cunaires). L'importance des facteurs de risque cardio-neurovasculaire, dont certains sont modifiables, dans la survenue d'un premier AVC, est évidente : le contrôle strict de l’hypertension artérielle et du diabète de type 2 réduit en effet le risque d’AVC mortels et non mortels de 44 % (1).

LA PHASE PRE-HOSPITALIERE

Un mot d'ordre : appeler le 15

Tout AVC ou AIT (accident ischémique transitoire) constitue une urgence dont le délai de prise en charge doit être le plus court possible. À ce titre, la HAS recommande (3) au médecin traitant recevant un appel direct à son cabinet d’un patient présentant des signes évocateurs d'AVC de transférer l'appel au SAMU Centre 15, et au mieux de rester en ligne pour établir une conférence à trois (appelant, médecin traitant, médecin régulateur).

En amont de l'AVC, le médecin doit informer les patients à risque (antécédents vasculaires, HTA, diabète, artériopathie des membres inférieurs...) et leur entourage des principaux signes de l’AVC (Voir encadré 1), et préconiser dans ce cas l’appel immédiat au SAMU Centre 15 avant même tout appel à son cabinet. Il doit également expliquer l’importance de noter l’heure des premiers symptômes.

Demander à une personne de l’entourage d’accompagner le patient ou communiquer le numéro de téléphone de cette personne au SAMU Centre 15.

Lorsque le médecin est sur place

L'interrogatoire du patient ou de son entourage et l'examen clinique peuvent orienter vers l'origine vasculaire du trouble neurologique (Voir encadré 2).

Bien que les symptômes soient très variables selon le siège de la lésion et ne soient pas toujours typiques, la réunion des 4 critères suivants permet d'en affirmer avec certitude la nature vasculaire (5) :

- Installation brutale,
- Caractère focal du déficit neurologique, les symptômes et les signes pouvant tous s’expliquer par une seule lésion anatomique,
- Caractère "déficitaire" des symptômes (hémiplégie, aphasie, hémianopsie etc.), et non pas "positif" (paresthésies, scotome scintillant…),
- Intensité d’emblée maximale.

À faire

- Prévenir le SAMU Centre 15, même si les symptômes ont régressé : préciser les constatations cliniques en mentionnant l'heure de début des symptômes ; informer le médecin régulateur de la présence d'éventuels facteurs de risque cardiovasculaires, des antécédents du patient et des traitements en cours (en particulier les anticoagulants). Mentionner la présence d'un éventuel pace maker.

- Laisser le patient allongé.

- Respecter une éventuelle élévation des chiffres tensionnels : au stade initial de l'AVC (1e semaine), la baisse de la pression artérielle expose en effet à une baisse du débit sanguin cérébral. "En pratique, et même si l'AMM européenne de l'altéplase ne revient pas sur ce point, nous traitons par thrombolyse des patients de plus de 80 ans. Nous nous appuyons pour cela sur les données de certains registres, qui ont montré des résultats favorables à la thrombolyse entre 80 et 90 ans. Ces conclusions sont beaucoup moins évidentes au-delà de 90 ans".

La posologie de l'altéplase est de 0,9 mg/kg de poids corporel en perfusion intraveineuse sur 60 minutes, en commençant par injection intraveineuse directe de 10 % de la dose totale. Le délai d'amélioration de l'état neurologique après l'administration du fibrinolytique est variable, de quelques minutes à 24 heures.

Le risque principal lié à la thrombolyse est le risque hémorragique. Celui-ci augmente notamment avec le délai d'intervention. La destruction de la barrière hémato-encéphalique dans la zone occluse s'aggravant à mesure que le temps passe, la reperméabilisation de l'artère lésée expose à un risque accru de diffusion sanguine au niveau cérébral, d'autant plus important qu'il s'y trouve une grande quantité de thrombolytique. Même chose en cas d'AVC ischémique étendu.

L'existence d'une hyperglycémie majore également le risque hémorragique. Une glycémie supérieure à 4 g/l constitue d'ailleurs une contre-indication à la thrombolyse en cas d'AVC (Vidal 2012).

Par ailleurs, toutes les situations associées à un risque hémorragique élevé (ulcère gastro-intestinal, coagulopathie…) contre-indiquent la thrombolyse.

La prise d'un anti-agrégant plaquettaire au long cours antérieure à la survenue de l'AVC ne constitue pas une contre-indication.

La thrombolyse est actuellement contre-indiquée en cas d'AIT ou d'AVC mineur. "Cependant, on sait que certains patients récupèrent alors même que persiste en imagerie l'occlusion d'une artère intra-crânienne. Pour ceux-là, la question de la thrombolyse peut se poser, raison pour laquelle il importe de diriger rapidement tout AIT récent vers une UNV, en passant par le Centre 15".

La thrombectomie mécanique

Il s'agit d'une technique de revascularisation endovasculaire, basée sur l'ablation mécanique du caillot au moyen de divers dispositifs introduits dans l'artère lésée. Plusieurs études sont en cours, avec thrombolyse en première intention, puis thrombectomie secondaire. "À noter que l'étude ISM III, (Interventional Management of Stroke) comparant la thrombolyse intraveineuse à la thrombolyse IV associée à la désobstruction intra-arterielle, soit par thrombolyse intra-artérielle, soit par thrombectomie mécanique, a été arrêtée en l'absence de bénéfice clinique pour le patient. D’autres études sont en cours, en particulier l’étude THRACE menée en France".
 

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Dr Pascale Naudin-Rousselle (rédactrice, fmc@legeneraliste.fr) sous la responsabilité scientifique du Dr France Woimant (Service de Neurologie, Hôpital Lariboisière, 2 rue Ambroise - Paré 75010 Paris ; courriel : france.woimant@lrb.aphp.fr)

Source : lequotidiendumedecin.fr