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LE SUICIDE EST TRÈS RARE CHEZ L’ENFANT

Publié le 28/01/2011
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Le suicide récent par défenestration d’une petite fille de 9 ans diabétique interroge sur la réalité du risque suicidaire chez l’enfant. Y a t-il un lien entre pathologie chronique ou grave de l’enfant et risque suicidaire ? Existe t-il des situations à risques ? Si le suicide de l’adolescent fait l’objet de travaux réguliers, que sait-on du suicide de l’enfant ? Dans une étude parue en 2007, l’équipe de pédopsychiatres du CHU de Saint- Etienne montre que la tentative de suicide chez l'enfant de moins de 13 ans est un phénomène rare (1). Aux auteurs de poursuivre que la tentative de suicide est rarement le premier signe d'une souffrance chez l'enfant. Ces conduites suicidaires viennent signifier un vécu existentiel dépressif, sur fond de grande fragilité narcissique, lié le plus souvent à un contexte environnemental particulier. L'environnement sociofamilial de l'enfant est remarquable par son caractère peu sécurisant et peu contenant.

« Le décès par suicide est un phénomène très rare chez l’enfant », confirme le Pr Xavier Pommereau (psychiatre, CHU Bordeaux, chef du pôle aquitain de l’adolescent). Et nous ne constatons pas de lien entre l’existence d’une pathologie chronique ou grave comme un cancer et le risque de suicide. Presqu’au contraire, les enfants qui souffrent d’une pathologie lourde sont plutôt combatifs. Dans notre expérience, les adolescents diabétiques qui ont commis une TS souffrent d’un mal être plus général à l’origine du passage à l’acte et le diabète n’est qu’un facteur parmi d’autres plus déterminants. »

Le Pr Pommereau constate par ailleurs un rajeunissement de la population admise pour TS depuis le début des années 2000 avec une nette accélération du phénomène depuis 2005. « En 1992, la moyenne d’âge des TS chez les adolescents était de 17-18 ans, elle est passée à 14-15 ans ces toutes dernières années. » Les troubles du comportement, les ivresses prononcées, l’usage banalisé du cannabis touchent des adolescents de plus en plus jeunes. « Ce n’est plus la puberté qui signale l’entrée dans l’adolescence. Dans une société de l’image et de l’hypercommunication, la nébuleuse de l’adolescence capture les enfants plus tôt et les garde plus longtemps en son sein. C’est comme si l’adolescence s’était dilatée.»

Parmi les facteurs de risque de passage à l’acte, il convient de distinguer les écarts de conduite modérés et réversibles - normaux et typiques de cet âge – de ceux plus graves, qui sont d’authentiques ruptures. Les signaux d’alarme typiques sont les fugues, l’absentéisme scolaire, le retrait relationnel, la scarification, les conduites alimentaires boulimiques ou anorexiques ou les ivresses pathologiques du « binge drinking ».

« Les jeunes qui vont mal émettent des signaux suffisamment visibles. Aux adultes de les repérer pour permettre la prise en compte du mal être et enclencher une prise en charge médicale. »

1- Delamare C et col. La tentative de suicide chez l'enfant de moins de 13 ans est un phénomène rare. Neuropsychiatrie de l'Enfance et de l'adolescence. 2007. Volume 55, numéro 1, pages 41-51 (avril 2007).

Dr Linda Sitruk (fmc@legeneraliste.fr)

Source : Le Généraliste: 2550