Pierre 58 ans consulte pour des vertiges apparus récemment qui l’angoissent. Jusqu’à présent en bonne santé, il est traité pour une hypertension artérielle bien contrôlée 135/80 mm Hg. Il se plaint régulièrement de douleurs cervicales depuis quatre ans. Il ne fume pas, n’est pas en surpoids. Il a été champion de tennis et continue à pratiquer régulièrement.
Vertiges ou sensation vertigineuse ?
L’interrogatoire recherche une origine vestibulaire, visuelle ou neurologique des symptômes. Pierre décrit des sensations d’instabilité le matin au réveil, lors de mouvement de rotation de la tête quand il s’assied dans son lit, avec une impression de tête vide, déclarant « ça tourne dans ma tête ». En langage du nord « ça berloque ». Ces sensations se produisent aussi à la marche, lors d’un mouvement de tête et obligent Pierre à prendre appui. Il n’existe ni impression giratoire des objets, ni nausées, ni acouphènes, ni sensation de diminution de l’audition. Ainsi, il s’agit d’une sensation vertigineuse, ce qui élimine a priori une origine vestibulaire. Pierre ne se plaint pas de problèmes visuels et n’a pas changé de lunettes récemment, ce qui exclut une origine visuelle. Enfin, il ne se plaint ni de céphalées, ni d’une diminution de la force musculaire des membres inférieurs ni de fourmillements évoquant une origine neurologique. Il n’a eu aucun accident mettant en jeu rachis cervical, ni manipulation vertébrale du cou.
Examen clinique de débrouillage simple
Le test de Romberg est négatif ce qui est en défaveur d’une origine vestibulaire ou neurologique du trouble.
-› Ce test est positif lorsque le patient debout bras tendus devant lui, yeux ouverts ou yeux fermés perd l’équilibre. Le test des index négatif montre également l’intégrité du système vestibulaire. Le test est positif lorsque l’on observe une déviation des index, après avoir demandé au patient de pointer bras tendus ses index devant ceux de l’examinateur.
-› Le test de piétinement de Fukuda est également négatif. Pour ce test, on demande au patient de piétiner sur place 50 fois de suite, yeux fermés, bras tendus devant lui, en élevant le genou à environ 45°. L'angle de rotation du corps entre la position initiale et finale ne doit pas excéder 60°.
-› L’épreuve doigt-nez, yeux ouverts et fermés recherche une origine cérébelleuse. La négativité du test de Romberg et de l’épreuve doigt-nez permet d’éliminer avec une grande probabilité une origine neurologique des symptômes.
La positivité d’un de ces tests doit conduire à une consultation spécialisée selon la sémiologie neurologue ou ORL pouvant réaliser un examen vestibulaire.
Le rachis cervical est-il en cause ?
Pierre désigne une douleur cervicale en C2-C3 prédominant à gauche. La palpation perçoit une contracture et la pression déclenche une douleur. La palpation controlatérale est normale (absence de contracture et pression peu sensible). La palpation révèle également une contracture des muscles sous occipitaux gauches en position couchée et du muscle trapèze gauche en position assise. Les mobilités active et passive sont limitées en rotation gauche et déclenchent la sensation vertigineuse. Le patient améliore cette sensation en maintenant son cou avec la main lors des changements de position, notamment le matin au lever.
La radiographie cervicale montre une discarthrose cervicale et une arthrose des interarticulaires postérieures, sans sténose foraminale (cliché de 3/4), ni malformation de la charnière cervico-occipitale (clichés « C1C1 bouche ouverte » et profil).
L’explication physiopathologique la plus admise concernant les sensations vertigineuses d’origine cervicale est la perte de la stabilisation cervico-céphalique, par déficit proprioceptif cervical. Celui-ci est secondaire aux contractures, dérangements intervertébraux mineurs, raideur, du rachis cervical. La perte de la stabilisation cervico-céphalique perturbe le réflexe oculo-vestibulaire. L’image n’est plus stabilisée sur la rétine. Les sensations vertigineuses et d’instabilité apparaissent.
Eliminer une dissection artère vertébrale
Pierre présente une cervicalgie chronique objectivable. Avant d’affirmer qu’elle est à l’origine de la sensation vertigineuse, le diagnostic de dissection de l’artère vertébrale doit être éliminé. Il doit être envisagé en présence d’antécédent de traumatisme cervical direct ou indirect par accident de la voie publique ou sportif ou de manipulation à ce niveau. La pratique du tennis de compétition, origine possible de traumatismes à répétition du rachis cervical, oblige à des examens complémentaires. L’écho-doppler des vaisseaux du cou est utile, mais ne permet pas d’éliminer totalement le diagnostic. En pratique, l’IRM cérébrale couplée avec une ARM (angiographie par résonance magnétique) ou, en cas de contre indication, l’angioscanner spiralé, sont les seuls examens à pouvoir éliminer formellement la dissection de l’artère vertébrale. Il s’agit néanmoins d’examens spécialisés. Ici l’IRM est normale, le diagnostic de vertige d’origine cervicale est retenu.
Collier cervical mousse temporaire
Des antalgiques et/ou des AINS sont toujours utiles, associés à des myorelaxants.
Un collier cervical mousse type C1, porté uniquement quelques jours ou simplement la nuit, confirme le diagnostic si le patient est soulagé.
La kinésithérapie (une quinzaine de séances), hors manipulation, est nécessaire pour lever les contractures musculaires et rétablir la fonction des mécano-récepteurs proprioceptifs cervicaux. Les techniques utilisées sont : les massages décontracturants, les techniques proprioceptives cervicales, la reprogrammation oculo-cervicale selon le protocole de Revel. L’absence d’amélioration doit remettre en cause le diagnostic.
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