Spironolactone versus placebo, bisoprolol et doxazosine pour évaluer le traitement optimal de l’hypertension artérielle résistante : essai randomisé comparatif en double insu et crossover.
Williams B, MacDonald TM, Morant S et al. pironolactone versus placebo, bisoprolol, and doxazosin to determine the optimal treatment for drug-resistant hypertension (PATHWAY-2): a randomised, double blind, crossover trial Lancet 2015 : http://dx.doi.org/10.1016/S0140-6736(15)00257-3
CONTEXTE
L’HTA résistante est définie par unePA ≥ 140/90 mmHg (ou ≥ 130/80 en automesure) malgré une trithérapie, associant un diurétique thiazidique, un inhibiteur du système rénine angiotensine (inhibiteur de l’enzymede conversion ou antagoniste de l’angiotensine 2) et un inhibiteur calcique à posologies maximales tolérées. Aucun essai randomisé n’avait comparé l’effet d’autres classes pharmacologiques associées à la trithérapie recommandée.
OBJECTIF
Vérifier l’hypothèse que l’HTA résistante est le plus souvent liée à une rétention hydrosodée et qu’à ce titre la spironolactone est plus efficace qu’un placebo, un bêtabloquant ou un alphabloquant.
METHODE
Essai randomisé comparatif randomisé en double insu et en crossover à quatre cycles d’une durée de 3 mois chacun. Avant d’être inclus, tous les patients sous trithérapie standard ont été explorés pour s’assurer du diagnostic d’HTA résistante (observance, automesure à domicile pendant 4 jours, recherche d’HTA blouse blanche, médicaments vasopressifs, etc.).
Après 1 mois de placebo en simple insu pour tous les patients, chacun d’entre eux a reçu tour à tour, et dans une séquence aléatoire, 25mg de spironolactone, 5 mg de bisoprolol, 4 mg de doxazosine (alphabloquant n’ayant pas l’indication HTA en France) et un placebo pendant 1,5 mois ; puis la posologie était doublée pendant 1,5 mois supplémentaire.
L’analyse statistique a été hiérarchisée et faite en intention de traiter. Le critère de jugement principal était la moyenne de PAS en automesure entre la spironolactone et le placebo à 3 mois. En cas de différence significative, la moyenne de PAS de la spironolactone était comparée à celle poolée des deux autres principes actifs, puis, si la différence était encore significative, à celle de chacun d’entre eux. Pour démontrer une différence de PAS de 3 mmHg entre les 3 médicaments et le placebo avec un risque d’erreur de 0,003%, il fallait randomiser 294 patients évalués toutes les 6 semaines.
RESULTATS
Parmi les 436 patients éligibles, 335 ont été randomisés et 21 d’entre eux n’ont pris aucun des médicaments testés et n’ont eu aucun suivi. L’analyse statistique a donc porté sur 314 patients âgés en moyenne de 61,4 ± 9,6 ans, 70% étant des hommes. A l’inclusion, leur PA moyenne était de 157/90mmHg au cabinet médical et de 147,6/ 84,2 mmHg en automesure. Un peu plus de 90% des patients ont reçu les 4 médicaments pendant trois mois.
- La PAS (en automesure) a diminué de 12,8 mmHg avec la spironolactone, 8,7 mmHg avec la doxazosine, 8,3 mmHg avec le bisoprolol et 4,1 mmHg avec le placebo. La différence de PAS entre la spironolactone et le placebo était de 8,70 mmHg, et de 4,26 mmHg entre la spironolactone et la PAS poolée des 2 autres principes actifs. Enfin, la différence de PAS entre la spironolactone et la doxazosine était de 4,03 mmHg et de 4,48 mmHg avec le bisoprolol . Alors que la différence de PAS entre la spironolactone et le placebo était significative dès la faible dose (à 1,5 mois), elle n’était significative entre les 3 principes actifs qu’après le doublement de la dose. En termes d’effets indésirables, tous les médicaments ont été bien tolérés. Six (2,1%) des 285 patients pendant leur cycle de spironolactone ont eu une kaliémie › 6 mmol/L au moins une fois.
COMMENTAIRES
Cet essai randomisé comparatif direct en double insu répond à une vraie question à l’aide d’une méthode très originale dans laquelle chaque patient était son propre témoin. Cet essai montre clairement que la spironolactone (50 mg/j) est le médicament de choix de la quadrithérapie des hypertensions résistantes, et qu’il faut surveiller la kaliémie.
- Au delà de leur significativité statistique, les différences absolues de PAS entre la spironolactone et le placebo ou les autres principes actifs est cliniquement pertinente. Une différence de 5 mmHg sur la PAS, c’est 20% de mortalité CV et d’AVC en moins (1).
- La prévalence de la « vraie » HTA résistante varie de 3,4% à 25% selon les définitions et les études (2). Elle se situe probablement aux alentours de 10% (2). Il ne faut pas confondre HTA non contrôlée et HTA résistante. Avant de parler d’HTA résistante, il faut s’assurer de l’observance du patient, faire une automesure à domicile, évaluer la consommation d’alcool et rechercher celle de médicaments vasopressifs (4).
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