Le 13 novembre vu par le « New England Journal of Medicine »

Publié le 04/12/2015

Quelques jours après « The Lancet », c’est cette fois sous la plume délicate de Charlotte Haug, médecin et correspondante internationale du « New Journal England of Medicine », que nous découvrons par les regards de médecins de l’hôpital Saint Louis le déroulement de cette funèbre soirée du 13 novembre dernier.

Ce récit, intimiste, intitulé sobrement « Report from Paris », débute par le témoignage de Carl Ogereau, médecin aux urgences. Il se souvient de cette collègue, arrivant en courant dans le service à 9 h 30, hurlant qu’une fusillade avait lieu, qu’elle voulait un brancard. Tous essaient alors de la rassurer et la convaincre de laisser SAMU et ambulanciers intervenir. « La situation était bizarre mais elle était tellement insistante que j’ai fini par lui laisser le brancard », raconte le témoin.

Des blessés arrivent à pied

Et puis, la première victime, un jeune homme, accompagné par des amis (les restaurants Le Carillon et le Petit Cambodge étant si proches des urgences que bon nombre des blessés sont venus à pied ou portés par des amis). Il ne comprend même pas ce qu’il lui arrive : « Je ressens de drôles de choses, j’ai mal, je ne peux plus marcher » (touché par balle dans le dos et dans la jambe).

La deuxième patiente, une grand-mère, blessée également par balle en se penchant pour protéger son petit-fils. Et puis d’autres victimes, d’autres brancards, par dizaines…

Le témoignage émouvant de Jean-Paul Fontaine, chef de service des urgences, qui, en pleine séance de zapping à la mi-temps du match France-Allemagne, reconnaît les rues indiquées sur une carte à l’écran mais peine à réaliser les événements en cours. Nous le suivons sur sa moto dans Paris, imaginant son entrée aux urgences, le chaos, les pleurs, les cris, puis sa surprise lors de son arrivée par le silence quasi total malgré le grand nombre de brancards.

En salle de réveil

Matthieu Legrand, anesthésiste réanimateur, évoque les détails de la coordination de la salle de réveil, les arrivées spontanées et informelles des collègues anesthésistes réanimateurs résidant à proximité, des infirmières de bloc par chance réunies pour un dîner de service à quelques rues de là. Ils ont même dû refuser du monde.

9 h 42  : premier patient au bloc opératoire (2 balles dans l’abdomen imposant une colectomie de 60 cm en 30 minutes), 9 h 50  : déjà 5 patients en salle de réveil, 10 h 34 déclenchement du plan blanc. Les horaires s’enchaînent, avec précision. Humilité, efficacité, solidarité, maîtrise de soi, la profession a rarement reçu un tel hommage.

Dr Guillaume Gras

Source : lequotidiendumedecin.fr