Vieillissement de la population

Le gouvernement donne quelques gages au secteur du grand âge

Par
Publié le 22/09/2023
Article réservé aux abonnés
Lors des assises nationales des Ehpad, les acteurs du secteur, exaspérés par les atermoiements politiques, ont réclamé des actes. La proposition de loi « Bien vieillir » de la majorité présidentielle, qui avait été reportée sine die en juillet, sera à l'ordre du jour de l'Assemblée le 20 novembre.

Crédit photo : DR

En cette rentrée, l'exécutif s'emploie à montrer qu'il prend conscience des graves difficultés du secteur du grand âge. Lors des assises nationales des Ehpad, réunies à Paris, la nouvelle ministre des Solidarités, Aurore Bergé, n'a certes pas fait d'annonces financières fracassantes mais s'est employée à donner quelques gages à un secteur qui ne cache pas son exaspération. 

Elle a d'abord confirmé que la revalorisation (travail de nuit, week-end) accordée aux paramédicaux des hôpitaux (infirmiers, aides-soignants) serait étendue aux Ehpad publics, et que le secteur bénéficierait de mesures financières de compensation à la faveur du bouclier énergétique.

Bas salaires

Elle maintient aussi l'objectif ambitieux de créer 50 000 postes en Ehpad d'ici à 2027 (3 000 seulement à ce jour) et met l'accent sur la progression en cours des carrières (hausse du point d'indice). Et pour faire face à la crise immédiate, le gouvernement a annoncé, fin juillet, débloquer 100 millions d'euros en urgence, une « rustine » pour les acteurs du secteur.

Selon la ministre aussi, les travaux autour de la convention collective amélioreront la mobilité des professionnels concernés et rendront les carrières plus attractives, à la faveur d'une augmentation des bas salaires du médico-social. Point sensible, l'État s'engage à financer une partie des revalorisations en accord avec les départements. Et toujours sur le versant RH, le plan de résorption des « faisant-fonction » (15 à 20 % des personnels des établissements) devrait être achevé d'ici à la fin de l'automne, dans le cadre d'un accompagnement pour une meilleure qualification des professionnels.

Repérer la maltraitance 

Mais la ministre a surtout déroulé un calendrier plus précis. La proposition de loi (PPL) « Bien vieillir » de la majorité (reportée sine die en juillet) est désormais inscrite à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale du 20 novembre. La ministre des Solidarités espère que le texte sera adopté d'ici à la fin de l'année. Il prévoit notamment de faciliter le repérage des personnes âgées isolées, en autorisant les échanges de données entre les mairies et les services sociaux et sanitaires. Le texte crée un dispositif permettant de mieux signaler les cas de maltraitance ou encore une carte professionnelle pour les aides à domicile. Par ailleurs, la feuille de route pluriannuelle pour accélérer la préparation de la société à son vieillissement sera présentée en octobre, a indiqué la ministre.

Pas de quoi rassurer le secteur, qui réclame toujours une vraie loi « grand âge » à la hauteur des espoirs levés par la création de la cinquième branche de la Sécu. Selon Arnaud Robinet, président de la Fédération hospitalière de France (FHF), 80 % des Ehpad publics ont des difficultés de trésorerie. « Les questions de financement et de gouvernance restent posées », insiste-t-il, poussant l'idée d'un « service public » du grand âge. Et le député socialiste Jérôme Guedj d'enfoncer le clou : « On a l'impression de parler dans le vide et de courir derrière l'ampleur des besoins à couvrir. On va vers une petite loi grand âge. Ce n'est pas à la hauteur. »

Culture de la transparence 

Sophie Boissard, directrice générale du groupe Korian, pointe carrément « l'impasse financière » des Ehpad, accélérée par la pandémie, le livre-enquête Les Fossoyeurs et l'inflation. De 2019 à 2022, alors qu'un lit occupé voyait sa rémunération augmenter de 10 %, la masse salariale croissait de 25 %, le coût de l'alimentation de 20 % et l'énergie de 60 %. Dans le même temps, la dotation de soins était relevée de 3 % tandis que les coûts globaux étaient multipliés par deux, voire trois. « Il faut remettre à plat le modèle économique, avance-t-elle. Car l'analyse présentée par le rapport Libault avant la crise n'est plus valable. »

Face aux attentes, Aurore Bergé a souhaité déminer le terrain. « Mon enjeu n'est pas d'inscrire mon nom sur une loi, mais de garantir des changements concrets dans le secteur. » Le processus de contrôle des Ehpad devrait être finalisé pour 2024. « Cette culture de la transparence ne concernera pas que les Ehpad, promet la ministre, mais tous les lieux où il y aura de la vulnérabilité. »


Source : Le Quotidien du médecin