La Fédération de l'hospitalisation privée (FHP) a réclamé mercredi une hausse de 10 % du budget des établissements hospitaliers pour 2021 (ce qui représenterait une rallonge de 8,5 milliards d'euros sur la base de l'enveloppe 2020 de 85 milliards accordée aux hôpitaux et aux cliniques), dans le cadre du Ségur de la santé.
Lors d'un point presse, le président de la FHP Lamine Gharbi a exposé les desiderata des cliniques à but lucratif en réaffirmant – contrairement à la Fédération hospitalière de France (FHF) quelques heures plus tôt – sa « confiance » dans le gouvernement à mener des négociations « équitables » entre secteurs public et privé.
« Nous demandons une hausse de 10 % en 2021, ça peut paraître totalement farfelu de passer d'un ONDAM de 2,4 % [la progression des dépenses annuelles prévue avant la crise sanitaire, NDLR] à 10 % mais non, c'est juste un retour à l'équilibre par rapport à nos tarifs qui sont ceux d'il y a dix ans », a justifié Lamine Gharbi. L'enveloppe du budget hospitalier pourrait ensuite progresser de 6 % « à compter de 2022 » (soit 5,5 milliards d'euros supplémentaires), plaide la fédération.
Une clinique sur trois dans le rouge
En 2021, assure la FHP, cette rallonge budgétaire serait « immédiatement appliquée » dans l'investissement et dans la revalorisation des salaires des 113 850 soignants en cliniques. Cet effort équivaut selon la FHP à un investissement de 825 millions d'euros sur les rémunérations dans le privé sur la base d'une augmentation générale de « 300 euros net par mois » revendiquée par les syndicats de personnels.
La FHP suggère aussi au gouvernement de supprimer la taxe sur les salaires (de 474 millions d'euros par an pour les cliniques) pour accompagner cette politique salariale. « Nous avons pu tenir et distribuer les salaires pendant la crise grâce aux aides Covid mais 30 % des cliniques sont aujourd'hui dans le rouge », précise Lamine Gharbi.
La FHP fait valoir que l'écart de rémunération entre public et privé atteint 13 % pour une aide-soignante et 8 % pour une infirmière (au détriment des cliniques). « Le Ségur doit déboucher sur une transposition au privé des revalorisations salariales sur le modèle de la prime Covid et rattraper les écarts de salaires », martèle Lamine Gharbi.
Plan massif sur les métiers
L'augmentation franche du budget des cliniques permettrait également d'abonder un « plan massif de formation » de 2 milliards d'euros pour doubler le nombre d'élèves infirmiers et aides-soignants.
Toujours dans une optique d'égalité de traitement avec les hôpitaux publics, les cliniques réclament elles aussi une reprise de leur dette (le gouvernement ayant débloqué 13 milliards d'euros à ce titre pour l'hôpital public).
La FHP appelle de ses vœux un ONDAM pluriannuel et « médicalisé » qui serait construit « sur la base d’objectifs de santé » : prévention des crises sanitaires, numérique et systèmes d’information, accès aux soins et permanence des soins, prise en charge des personnes âgées, prévention et précarité.
Concernant le modèle de financement hospitalier, Lamine Gharbi a alerté sur la tentation du gouvernement de revenir au budget global, à vouloir trop tirer sur la tarification à l'activité (T2A). « La T2A ne doit pas servir de bouc émissaire, c’est une garantie d’efficience. Elle ne doit pas être abandonnée mais doit être incluse dans un financement mixte prenant en compte la qualité et la pertinence des soins. Un lit vide en T2A ne coûte rien, mais en dotation globale, si ! »
Des autorisations à durée indéterminée
Autre requête : simplifier le régime d'autorisations sur les activités de soins, délivrées par les ARS pour cinq ans aux établissements. La FHP propose ici de mettre en place des autorisations à durée indéterminée. « Pendant la crise, des autorisations en réanimation ont été délivrées en quelques jours alors qu'en temps normal, ça prend des mois. Une clinique qui possède des activités de médecine, chirurgie et obstétrique (MCO), de psychiatrie et de soins de suite et de réadaptation (SSR) doit tous les cinq ans déposer une vingtaine de dossiers, c'est trop long et trop compliqué. C'est comme si on vous réclamait de repasser votre permis de conduire tous les cinq ans ! », plaide Lamine Gharbi.
Pour autant, le patron de la FHP refuse de critiquer le travail des ARS pendant la crise. « Le procès des ARS est injuste, le travail a été fait et ceux qui ont critiqué la gestion de crise des tutelles le faisaient souvent de leurs petits bureaux, commente-t-il. Avec 800 patients Covid en réanimation, on peut demander aujourd'hui la levée du plan blanc et la fin de la préemption par l'État des molécules nécessaires à l'anesthésie. Certains ont pu considérer que les ARS ont fait preuve d'un excès de précaution sur ce sujet, mais je le redis, c'est toujours facile de refaire le match après coup. »
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