Événements indésirables graves liés aux soins : déclarations en hausse, la culture de sécurité progresse à petits pas

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Publié le 24/11/2022
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Crédit photo : S.Toubon

Pour la cinquième année consécutive, la Haute Autorité de santé (HAS) publie son bilan sur les évènements indésirables graves associés à des soins (EIGS) qui montre une nette augmentation des déclarations en 2021, reflet à ses yeux d'une « meilleure intégration de la gestion des risques dans la pratique ».

Ainsi, ce sont 1 874 nouvelles déclarations qui ont été répertoriées en 2021, contre 1 081 cas en 2020 – année exceptionnelle en raison de la crise sanitaire – et 1 187 en 2019, 532 en 2018 et 288 en 2017. Au total, ce sont donc près de 5 000 déclarations d'EIGS qui ont été stockées en cinq ans. « Cette augmentation traduit une meilleure connaissance du dispositif et une plus forte adhésion des professionnels à l’intérêt de déclarer, salue la HAS. On observe cependant un très faible taux de déclarations réalisées en ville qui traduit une culture de sécurité encore trop faible dans ce secteur. »

De fait, sur les 4 962 déclarations précisément reçues depuis la mise en place du dispositif en 2017, seulement 62 proviennent de la médecine de ville. En 2021 encore, les déclarations d’EIGS proviennent très majoritairement des établissements de santé (80 %), puis du secteur médico-social (15 %) et enfin de la ville et domicile (< 5 %). La moitié des déclarations de l’année 2021 (50 %) sont issues des services de médecine, chirurgie et obstétrique.

Par ailleurs, certaines régions ont une culture de la déclaration plus forte que d'autres. En tête de classe, on retrouve La Réunion (101,6 déclarations par million d'habitants) suivie par Auvergne Rhône-Alpes (54,2), la Bretagne (49,9) et la Bourgogne Franche-Comté (46,2).

 

La moitié des EIGS évitables

Sur le fond, la situation reste très préoccupante puisque, dans un cas sur deux, l'EIGS est jugé évitable – l'évitabilité étant définie comme un évènement qui ne serait pas survenu si les soins avaient été conformes à la prise en charge jugée comme satisfaisante.

Comme les années précédentes, les suicides et tentatives de suicide, les chutes de patients et les erreurs médicamenteuses constituent les trois thématiques les plus fréquemment déclarées, loin devant les défauts de diagnostic.

Mais cette présentation ne reflète pas nécessairement la réalité exacte, en raison d'un probable biais de déclaration. « Ces trois types d’évènements pourraient être plus souvent déclarés car peut-être plus médiatiques, plus visibles, et pour les erreurs médicamenteuses, parce que les professionnels sont historiquement plus acculturés à les déclarer », suggère la HAS.

S'agissant des erreurs médicamenteuses, ce sont les erreurs de dosage qui sont les plus répertoriées.

Près d'un tiers des déclarations sur le Covid

Cette année, la HAS publie deux analyses spécifiques, l'une sur les risques autour de l'accouchement et l'autre en lien avec le Covid.

Ainsi, 269 EIGS survenus avant, pendant ou juste après la naissance entre mars 2017 et décembre 2021 ont été examinés. La moitié a conduit à un décès et ils sont majoritairement liés à un défaut de prise en charge ou de diagnostic. Les causes profondes de ces événements ont permis à la HAS de formuler plusieurs recommandations notamment celle de former les professionnels en continu sur la lecture des rythmes cardiaques fœtaux « complexes » ou « douteux » et d’actualiser et d’harmoniser les protocoles de prise en charge d’une hémorragie du post-partum.

Quant à la pandémie de Covid, elle a donné lieu à elle seule à 1 341 déclarations (sur les trois grandes vagues de 2020 et 2021) dont la moitié font état de décès. Au total, ces EIGS « Covid » représentent donc un peu moins du tiers de l'ensemble des déclarations colligées depuis 2017. Sur ce volet de la pandémie, là encore, « les défauts de prise en charge ou de diagnostic, mais également les erreurs médicamenteuses figurent parmi les causes d’EIGS le plus souvent recensées », décrivent les auteurs du rapport. Ils invitent à former les soignants, notamment par la simulation en santé, « aux gestes d'urgence et à la gestion des risques » et rappellent « la nécessité de former l'équipe à la transmission d’informations factuelles et explicites ». La HAS recommande aussi de favoriser la télémédecine pour pouvoir bénéficier d'avis spécialisés dans les plus brefs délais. 


Source : lequotidiendumedecin.fr