Réquisitions cet hiver, plan blanc et PDS renforcée : le DGS-Urgent qui exaspère la profession

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Publié le 18/11/2021

Crédit photo : S.Toubon

Il n'est pas si fréquent qu'un « DGS-Urgent » du ministère mette le feu aux poudres. Mais celui adressé mercredi 17 novembre à l’ensemble des professionnels de santé a provoqué en quelques heures une vague de réactions inquiètes, irritées, voire indignées, aussi bien chez les hospitaliers que chez les libéraux. 

L'objet du délit ? Un (long) message adressé aux blouses blanches – signé par Katia Julienne, directrice générale de l’offre de soins et le Pr Jérôme Salomon directeur général de la Santé – énumérant la feuille de route relative à « l'anticipation et à l'adaptation de la réponse de l'offre de soins aux situations de tensions », et ce jusqu'à janvier 2022. 

Assorti de deux solides annexes – l'une sur les réponses aux situations de tension aux urgences, l'autre sur l'organisation de la permanence des soins ambulatoires (PDS-A) cet hiver – il énumère une panoplie d'actions à appliquer sans délai pour « anticiper », « planifier », « organiser » ou « adapter » notre système de santé, en pleine recrudescence de l’épidémie de Covid et de circulation « active et précoce » des virus hivernaux… 

Obligation de résultat

Au-delà des paragraphes indolores (lancement d’une enquête mensuelle pour analyser la situation de tous les établissements, rappel des dispositifs nationaux de soutien à la mobilisation RH des soignants, activation des cellules territoriales de suivi des tensions de l’offre, etc.), les praticiens attentifs ont retenu les passages les plus irritants. 

Sous la houlette des ARS, dans les structures de médecine d’urgence, le message évoque ouvertement des « mesures plus coercitives » selon les besoins locaux : « plan blanc de l’établissement » (avec assignations par le directeur de l’établissement par ordre de priorité…), « réquisition des intérimaires » par demande de l'ARS auprès du préfet et « réquisition des libéraux », selon la même méthode. « Nous nous permettons d’insister sur la nécessité d’obligation de résultat quant au maintien le plus large possible de l’ouverture des services (...) », peut-on lire au passage. 

La PDS-A et la continuité des soins en ville font l'objet d'une attention spécifique. « Face à la reprise des épidémies hivernales et du Covid (...), il convient d’être particulièrement vigilant sur l’organisation de la PDS-A et le maintien de la continuité des soins au cours de cet hiver et notamment durant les congés scolaires. », lit-on. Et pour relever le défi, il est demandé, là encore, de recourir « en dernier recours à la procédure de la réquisition si d'importantes difficultés d'organisation de la PDS-A devaient apparaître ».

Message glaçant

Nombre de médecins, épuisés par 18 mois de crise sanitaire, ont peu apprécié de recevoir ces « recos » alarmistes (qui s'adressent au demeurant plutôt aux administrations de la santé, directions des hôpitaux, ARS, Ordre…). D'autant qu'un deuxième DGS-Urgent légèrement modifié a annulé et remplacé le premier… 

« L’ensemble des professionnels de santé reçoit un message glaçant de la part du ministère, ont soupiré d'une seule voix plusieurs syndicats de PH (APH), de jeunes médecins (JM) et d'internes (Isni). La réalité de l’hôpital public, des services à permanence de soins pour les enfants et les adultes, semble enfin crever les yeux du ministère : l’hôpital public ne peut plus soigner correctement tout le monde, les urgences craquent et ferment, et il n’y a pas de plan B. Tout juste un plan blanc ! » « Le Ségur avait une grande ambition pour la Santé, il est un échec cinglant pour l’attractivité hospitalière… pour ne pas écrire total », accusent ces syndicats qui demandent au ministre de prendre en compte ses propositions pour l’attractivité médicale à l’hôpital.

Sur Twitter, praticiens et internes n'ont pas mâché leurs mots.

« Voilà qu’à l’occasion de la cinquième vague et des épidémies hivernales, le ministère réinstaure un plan ORSAN REB (risques épidémiques et biologiques, Ndlr) sur tout le territoire (plan blanc), à la discrétion des ARS et des établissements. Décidément le COVID a bon dos », cingle aussi le Syndicat national des praticiens hospitaliers anesthésistes-réanimateurs élargi aux autres spécialités (SNPHAR-e). 

Ce jeudi après-midi, Olivier Véran a réuni en visioconférence plusieurs centaines  d'urgentistes. Une opération déminage ?  


Source : lequotidiendumedecin.fr