HPST, tarification à l’activité, secteur privé, palmarès....

Vision croisée sur l’hôpital d’un psychiatre et d’un sociologue

Publié le 27/09/2012
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Le Pr Bernard Granger, psychiatre à l’AP-HP, et le sociologue Frédéric Pierru, chercheur au CNRS, publient « L’hôpital en sursis - idées reçues sur le système hospitalier », aux éditions le Cavalier bleu. Les auteurs dissèquent le fonctionnement de l’hôpital public, son financement, sa gestion, et les rapports de force qui font parfois tanguer le navire. Au final, un réquisitoire contre les orientations prises depuis 2002 (tarification à l’activité, loi HPST...).

Fermeture des hôpitaux de proximité, fonctionnement des urgences, étendue du pouvoir médical : certaines idées reçues sont battues en brèche. Et les discours, parfois, s’adaptent au fil du temps. Sur le secteur privé à l’hôpital, par exemple : Frédéric Pierru, coauteur du manifeste pour une santé égalitaire et solidaire, en réclamait la suppression l’an passé. Une requête qui ne figure pas dans le livre, et c’est sans doute la plume du Pr Granger, PU-PH doté d’une activité libérale, qu’il faut reconnaître ici : « L’activité libérale à l’hôpital (...) a persisté car elle a permis de maintenir, notamment dans certaines disciplines comme la chirurgie, l’attractivité des carrières hospitalières ». Les abus ? Ils n’ont « quasiment jamais été punis par ceux qui s’en offusquaient alors qu’ils avaient le pouvoir de le faire ». S’il se trouve des praticiens, à l’hôpital, pour décrier le secteur privé, ce sont « des médecins qui exercent des spécialités où la pratique de l’activité libérale n’est pas aisée, comme la biologie par exemple, ou bien des médecins qui ont par ailleurs d’autres formes de ressources », est-il précisé. Comprendre, en creux, des revenus tirés de l’industrie via la recherche clinique.

Stakhanovistes à l’acte.

Comment prendre les palmarès des hôpitaux ? Avec des pincettes, poursuivent le Pr Granger et Frédéric Pierru dans un autre chapitre : « Ces palmarès reposent sur l’hypothèse, largement contestée, selon laquelle un chirurgien (par exemple) est d’autant plus performant, qu’il opère beaucoup ». Palmarès, T2A, même combat : « Ils récompensent les stakhanovistes à l’acte et pénalisent des praticiens qui opèrent à bon escient ». Gare aux effets pervers engendrés (manipulation de données, sélection des patients pour être bien noté, renforcement de « l’isolationnisme » des hôpitaux, alors que la qualité des soins « dépend aussi et surtout de la qualité des relations » entretenue avec l’amont et l’aval...).

L’hôpital « n’est pas une entreprise comme une autre », et « l’hôpital de demain, où les séjours seront plus courts et les exigences de sécurité plus élevées, n’est pas encore véritablement né », concluent le psychiatre et le sociologue.

D. CH.

Source : Le Quotidien du Médecin: 9165