La veille de Noël, les craintes des maîtres de stage des universités (MSU) ont été confirmées. Le ministère de la Santé a opéré un coup de rabot sur la formation à la maîtrise de stage des généralistes, via la publication de deux arrêtés le 24 décembre. Début novembre déjà, au détour d’une réunion, les représentants des enseignants en médecine générale avaient appris que l’agence nationale du DPC envisageait de limiter la formation à l'encadrement des stagiaires et des internes. C’est désormais chose faite.
Jusque-là, les médecins qui souhaitent devenir maîtres de stage bénéficiaient de formations « hors quotas », tout au long de leur carrière, qui ne rognaient pas sur leur forfait DPC classique. Désormais, une unique formation de 10 heures sera autorisée à ces généralistes. « C’est inacceptable, alertait déjà en novembre le Dr Anas Taha, président du Syndicat national des enseignants en médecine générale (Snemg). Cela signifie que les médecins qui souhaitent devenir maîtres de stage devront choisir entre des enseignements biomédicaux classiques et des formations pour encadrer des étudiants. »
« Un signal dangereux »
En réponse, étudiants, internes en médecine générale et généralistes enseignants* ont publié le 5 janvier un communiqué commun affirmant leur ferme opposition à cette mesure. « Une formation unique ne peut être satisfaisante pour espérer une qualité pédagogique continue, renouvelée, et en constante amélioration », fustigent les organisations. D’autant plus que les exigences arrêtées par le ministère sont maigres : trois heures de cours en visio sur les aspects législatifs et administratifs de l’encadrement d’un étudiant et sept heures maximum en présentiel pour le reste de la formation... Cette nouvelle mouture s’appliquera dès la rentrée 2022, précise l’arrêté.
Le ministère « envoie un signal dangereux pour la maîtrise de stage universitaire, et limite la découverte des territoires et de la pratique ambulatoire pour les futurs médecins », s’alarment les quatre organisations, qui regrettent que ces textes aient été négociés sans représentant syndical des MSU.
MSU au rabais ?
Avec « des champs de formation réduits au strict minimum » et des « procédures chronophages pour le renouvellement des agréments », les généralistes enseignants et les étudiants craignent de voir naître des MSU au rabais et de dégrader la formation des futurs omnipraticiens.
[CdP ANEMF - ISNAR-IMG - SNGE - SNEMG]
— ANEMF (@ANEMF) January 5, 2022
?@Sante_Gouv diminue les moyens dédiés à la maîtrise de stage
? Malgré l'opposition des acteurs concernés, @Sante_Gouv a publié le 24/12 les arrêtés relatifs à l'agrément et à la formation des maîtres de #stage universitaires (MSU)
[1/4] pic.twitter.com/xtpuAAwC8p
Économies marginales
Alors que la maîtrise de stage attire de plus en plus – la France compte désormais 12 000 MSU – ces économies budgétaires, jugées « marginales » par les organisations, entrent en contradiction totale avec le souhait de renforcer la filière universitaire, annoncé par Emmanuel Macron à l’automne. Les fédérations n’y voient « aucune cohérence dans l’action du gouvernement et déplorent sa légèreté ».
En parallèle, et alors que le ministère présente ces textes comme une « avancée », « certains progrès méritent effectivement d’être soulignés », concèdent enseignants et étudiants. De fait, un arrêté acte une meilleure protection pour les étudiants, notamment « lorsque le terrain de stage ne garantit pas des conditions de travail respectant ses droits et sa dignité ou altère sa santé physique ou mentale ». Par ailleurs, les terrains de stage de médecine générale pourront faire « l'objet d'une évaluation par les étudiants, communiquée de façon anonyme aux unités de formation et de recherche ».
* L’Association nationale des étudiants en médecine de France (Anemf), l’Intersyndicale nationale autonome représentative des internes de médecine générale (Isnar-IMG), le Syndicat national des enseignants en médecine générale (Snemg) et le Collège national des généralistes enseignants (CNGE)
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