Études de santé : le numerus clausus des redoublants suspendu par le Conseil d’État, la polémique relancée

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Publié le 29/04/2021

Crédit photo : Phanie

C’est un nouveau rebondissement dans cette première année de médecine déjà largement bousculée par la mise en place de la réforme des études de santé. Le Conseil d’État a suspendu, ce mercredi, un arrêté fixant le nombre d’étudiants autorisé à passer en deuxième année de médecine, dentaire, pharmacie ou sage-femme. Publié le 25 janvier dernier, il fixait le numerus clausus 2021, applicable uniquement aux redoublants – dernière génération de PACES (première année commune aux études de santé).

Le Conseil d’État répond ainsi favorablement au recours porté par une quarantaine d’étudiants en première année, PASS (parcours spécifique à dominante santé), qui se sentaient lésé dans leurs chances. Les étudiants reprochent notamment à l’arrêté de réserver la grande majorité des places en deuxième année aux redoublants.

En effet, les 6 500 places du numerus clausus réservées d'office aux doublants, ont été annoncées bien avant les places accordées aux nouveaux inscrits, ne leur laissant que « des places résiduelles », juge le Conseil d'État. 

Le constat est d’autant plus amer pour ces étudiants que le numerus apertus aurait dû être communiqué en mars 2020 au plus tard. Or, la sentence est finalement tombée en cours d'année 2021 pour beaucoup de facs : en février à Montpellier, fin mars à Marseille... 

Une injustice

En cette année – marquée par les cafouillages autour de la mise en place de la réforme – coexiste donc à la fois l’ancien numerus clausus et le numerus apertus, s’appliquant aux PASS et LAS (licence avec une option santé), fixé selon les désidératas de chaque fac. Une injustice pour les Collectifs Pass/Las qui regroupent étudiants et parents : « 50 % des places du numerus clausus de 2020 hors passerelle sont réservées aux redoublants », regrette Victor, père d’un étudiant en PASS.

Du côté de la fac de Montpellier, le constat des parents est le même, à l’instar de Christelle, qui détaille : « En médecine, il y a 172 places pour les PACES, 104 places pour les PASS et 29 pour les LAS. » Une répartition qui, selon elle, rend inégales les chances d’accès aux études de santé entre primant et doublant : « Le taux de réussite d’un PASS en médecine sera de moins de 6 %, sans possibilité de redoublement, contre 14 % pour un PACES. Et de 0,38 % en dentaire et maïeutique, 2,3 % en pharmacie. »

« J’ai vu d’un très bon œil la suppression du numerus clausus et la possibilité de former plus de médecins, mais cette réforme, à ce stade, ne tient pas encore toutes ses promesses », abonde Céline Brulin, sénatrice PCF de Seine-Maritime, qui a rencontré la semaine dernière les membres du Collectif. « Les redoublants PACES et les nouveaux inscrits se partagent un nombre de places insuffisant », regrette la sénatrice, qui a adressé dans la foulée un courrier à la ministre Frédérique Vidal dénonçant « les injustices » de cette première année.

Des effets d'annonce

Pour essuyer les plâtres de la réforme, une augmentation de 30 % des places avait été avancée l’année dernière. Frédérique Vidal a finalement annoncé 2 000 places supplémentaires. Les collectifs Pass/Las réclament, eux, le double. « La loi précisait qu’une augmentation exceptionnelle du nombre de places serait mise en place pour absorber cette première année ; ça n’a pas été fait », regrette Christelle, qui déplore « des effets d’annonce qui ont eu un impact catastrophique sur le moral des étudiants. Les 2 000 places supplémentaires sont celles déjà demandées par les ARS dans le cadre de la démographie médicale ».

Victor poursuit : « Nous demandons simplement ce qui avait été prévu par le travail législatif : une sanctuarisation des places pour les primants et une augmentation exceptionnelle spécifique dédiée au PACES. » De son côté, le ministère garantit une augmentation de 10 % des places par rapport à 2020 et que « le nombre de places offertes pour les primants soit au moins équivalent à celui qui était proposé dans le cadre de la PACES sur les trois années précédentes, qui variait de 8 % de reçus à 23 % ». Sauf que les PASS n’ont plus la possibilité de redoubler et doivent, en cas d’échec, s’orienter vers des filières LAS 2.

La contrainte des capacités de formation 

Pour Patrice Diot, président par la Conférence des doyens de médecine, le quota d’étudiants acceptés en deuxième année doit rimer avec qualité de la formation : « Nous sommes responsables de la qualité de la formation, et nous sommes contraints par les capacités de formation, notamment en stage. » « Il faut donner aux universités les moyens d’accueillir ces jeunes », demande pour sa part Céline Brulin.

Avec une augmentation du nombre d’étudiants inscrits cette année en PASS et LAS, « il ne faut pas regarder le taux de réussite en pourcentage, qui est relatif au nombre d’inscrits, mais plutôt le nombre de places, qui lui a augmenté », analyse Patrice Diot.

Suite à la décision du Conseil d’État, « un nouvel arrêté sera publié dans les plus brefs délais » ont assuré Olivier Véran et Frédérique Vidal dans un communiqué commun. « Les capacités d'accueil ouvertes aux étudiants inscrits dans l'ensemble des filières permettant l'accès aux études de santé seront garanties aux étudiants en cours de formation », ont-ils ajouté, précisant que le calendrier des examens était maintenu.

 

 


Source : lequotidiendumedecin.fr