Méningite à Dijon : une campagne d'une ampleur inédite contre un méningocoque W particulièrement virulent

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Publié le 04/01/2017
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Crédit photo : AFP

C'est une campagne de vaccination d'une ampleur inédite contre la méningite qui a démarré ce mercredi 4 janvier sur le campus de Dijon, après la survenue, entre octobre et décembre 2016, de trois cas de méningite à méningocoque de type W 135, dont deux mortels, chez des étudiants.

Pilotée par l'agence régionale de santé (ARS) de Bourgogne-Franche-Comté, cette campagne se déroule en trois phases : elle cible d'abord du 4 au 6 décembre les étudiants et personnels du pôle où étudiait la jeune fille décédée en décembre (1 000 personnes), puis ceux du bâtiment voisin (8 000 à 10 000 personnes) du 9 au 20 janvier, et enfin le reste du campus de Dijon (20 000 personnes), à partir du 20 janvier. Si les deux premières phases se déroulent dans un centre de vaccination dédié (mise à disposition par l'université), où des binômes médecin/infirmier du centre de vaccination du CHU de Dijon et du centre de médecine préventive universitaire vaccinent gratuitement les volontaires, les modalités de la troisième phase seront affinées courant janvier. L'idée serait de faire appel aux généralistes de ville, mais l'ARS devrait demander aux autorités de santé (ministère et assurance-maladie) de faciliter la prise en charge du vaccin antiméningoccique tétravalent conjugué (contre les 4 souches A, C, Y et W). Deux existent, le Nimenrix et le Menvéo, mais ne sont pas remboursés.

L'ARS a également mis en place un numéro vert (0 805 200 550).

30 000 personnes ciblées

30 000 personnes sont donc concernées par cette campagne préventive, destinée à interrompre la circulation du germe de la méningite entre porteurs sains sur le campus. « Avec ces 3 cas en trois mois, le seuil épidémiologique de 10 cas pour 100 000 personnes a été dépassé », explique le Dr Gilles Leboube, médecin de l'ARS. « En outre, il n'y a pas eu de transmission directe entre ces trois cas ; la contamination est liée à des porteurs sains, d'où l'importance d'une mesure préventive large et durable », poursuit le médecin. L'ARS espère que le taux de couverture vaccinale atteindra 80 % de la cible. Quelque 150 personnes s'étaient fait vacciner à la mi-journée ce 4 janvier. « Si cela continue, en trois jours, on pourrait vacciner 90 % du premier cercle », calcule le Dr Leboube.

Bien sûr, l'ARS a déjà contacté les proches des 3 personnes infectées pour leur recommander une prophylaxie antibiotique ainsi qu'une vaccination.

Un sérogroupe rare, mais avec une tendance à la hausse

« Le sérogroupe W est rare mais nous observons depuis quelques années une tendance à la hausse ; il est lié à un nouveau clone qui a une virulence particulière », explique le Dr Daniel Lévy-Bruhl, épidémiologiste à Santé publique France. En 2015, avec 32 cas notifiés sur 469 infections invasives à méningocoques (IIM), il représentait 7 % des cas, derrière les sérogroupes B (242 cas, 53 %), C (118 cas, 26 %), ou même Y (54 cas, 12 %). « Mais au début des années 2010, ce sérogroupe représentait 2 à 4 % des IIM », note le Dr Lévy-Bruhl.

« Cette souche provient d'Amérique du Sud, et s'est installée en Angleterre. Il semblerait qu'elle s'installe aussi chez nous », poursuit l'épidémiologiste, notant qu'outre la situation très particulière de Dijon, les 32 cas de 2015 étaient répartis sur tout le territoire Français. « Ce qu'elle va devenir reste une question ouverte », juge-t-il, sans cacher son inquiétude face à une souche hypervirulente, à la mortalité élevée, et à la présentation atypique. À Dijon, ont notamment été diagnostiquées une arthrite septique et une septicémie, précise le Dr Leboube.

Néanmoins, « nous sommes à des années-lumière de proposer un vaccin en routine contre cette souche », nuance le Dr Lévy-Bruhl. Aujourd'hui, seuls quelques individus présentant des fragilités à l'égard des IIM sont vaccinés contre le W. La couverture vaccinale contre le méningocoque C en France (recommandé depuis 2010) était de 70 % à 2 ans, mais chute sous les 7 % pour la tranche des plus de 20 ans, regrette l'épidémiologiste.


Source : lequotidiendumedecin.fr