Soirées étudiantes, week-ends d'intégration : une charte pour éviter les drames

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Publié le 11/10/2018
bal internes

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Crédit photo : S. Toubon

Les soirées festives – week-ends d'intégration, événements de fin de semestre, soirées de « désintégration », etc.) – seront mieux encadrées et sécurisées afin d'éviter les dérives et les drames, a annoncé la ministre de l'Enseignement supérieur, Frédérique Vidal. Réunis mercredi au ministère, les responsables étudiants (FAGE, UNEF, carabins de l'ANEMF, etc.), la conférence des doyens santé, mais aussi des représentants des grandes écoles, ingénieurs, arts et métiers, les rectorats ainsi que les présidents d'université ont signé une charte en ce sens.

Tous s'engagent à partager les responsabilités et à être transparents sur l'organisation des soirées festives. Les acteurs réaffirment l'interdiction du bizutage (pratiques humiliantes, contraintes) et toutes formes de discrimination. 

Anticiper la sécurité 

Chaque événement, à l'intérieur ou extérieur des établissements, devra être discuté entre les associations et la direction des UFR, signalé et préparé en amont. Le type de lieu (bar, discothèque, salle privée, extérieur, université, etc.), l'adresse, la date de la soirée, le nombre de personnes attendues devront être précisés dans un document.

Les jeunes devront donner des indications sur la licence de vente d'alcool (qui la détient et quelle est la catégorie de la licence). Ils auront l'obligation de mentionner s'ils ont suivi une formation relative à l'organisation d'événements festifs et de sensibilisation à la consommation de substances psychoactives. Le programme de l'événement devra être détaillé. Surtout, des éléments liés à la sécurité devront être stipulés : les organisateurs sont-ils détenteurs du brevet de premiers secours ? Des secouristes et des agents professionnels ou des personnels universitaires sont-ils présents ? Un budget global (partie consacrée à l'organisation, l'autre à la sécurité et prévention) devra être défini.

En cas de non-respect de la charte, l'association étudiante signataire pourrait ne plus avoir accès au local, perdre ses allocations et même rembourser certaines subventions. 

Des épisodes tragiques, une prise de conscience

Ce travail est le fruit d'une longue réflexion. Ces dernières années, plusieurs soirées étudiantes ont été marquées par des épisodes tragiques. En 2017 encore, le week-end d'intégration de la fac de médecine de Caen a été annulé après des soupçons de bizutage. En 2015, un bizutage trash de carabins en deuxième année à la fac de Créteil avait défrayé la chronique et abouti à l'annulation du WEI l'année suivante en 2016.

Mais ce sont surtout deux drames qui ont poussé les acteurs à dire « stop » : le décès de Jean-Baptiste Pignède, mort noyé dans un étang du Nord après une soirée étudiante de médecine en 2015 et celui de David Marret, étudiant en dentaire décédé lors d'un week-end d'intégration il y a un an. Les tests avaient révélé une alcoolémie de 3,7 grammes d’alcool par litre de sang. « Lors de la première soirée, il a beaucoup bu comme tous les étudiants sur place, raconte son frère Sébastien Marret, qui milite aujourd'hui pour davantage de sécurité et d’encadrement lors de ces événements festifs. Le lendemain soir, pareil, énormément d'alcool. Il ne s'est pas senti très bien, il est pris en charge par quelques étudiants qui l'ont mis dans une tente jusqu'au petit matin où il a été découvert sans vie (...) David, il a été laissé tout seul, personne n'a appelé le SAMU. »

Formation aux risques

Sa famille se bat pour que les jeunes soient sensibilisés et accompagnés dans l'organisation d'événements. La charte signée au ministère doit y contribuer. Les étudiants devront être formés à la gestion des risques – alcoolisation massive, comportements sexistes, agressions, etc. – à la gestion des crises et à la prévention. Jusqu'alors, « chaque établissement avait pensé à un règlement par-ci par-là, mon objectif était de mettre au point un guide et qu'on passe en revue tout ce qui est important pour former, préparer ces soirées de manière à ce qu'elles restent festives », explicite Frédérique Vidal.

À l'Association nationale des étudiants en médecine de France (ANEMF), des formations sont déjà dispensées auprès des organisateurs d'événements au niveau des corpos des carabins. « On prévient immédiatement qu'on ne cautionne pas toute forme de bizutage, assure au « Quotidien » Clara Bonnavion, présidente de l'ANEMF. Il y a un changement de mentalité, mais ce dont a besoin l'étudiant, c'est une sensibilisation. » 

L'Université a son rôle à jouer. « Avant c'était tabou, les universités ne regardaient pas et les associations faisaient ce qu'elles voulaient, maintenant, l'association sera transparente, plus responsable et l'université accompagnera en échange », veut croire Clara Bonnavion. « Elle peut proposer des formations aux premiers secours qui sont payantes, cite-t-elle, ou encore des moyens matériels et financiers pour organiser des navettes retour ».

La charte nationale sera envoyée à tous les établissements qui pourront la décliner en fonction de leurs particularités.

 


Source : lequotidiendumedecin.fr