« Organisation anarchique », « conditions déplorables » : des internes alertent sur l’état des urgences du CHU du Kremlin-Bicêtre

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Publié le 02/07/2021

Crédit photo : Phanie

« Tous les jours, j’espère passer une garde sans tuer personne. Toutes les conditions sont réunies pour que quelque chose de grave arrive. » Certains témoignages d’internes des urgences du CHU du Kremlin-Bicêtre (Val-de-Marne, AP-HP) sont accablants. Dans un courrier adressé à l’ARS Île-de-France, deux syndicats d’internes alertent sur la situation « préoccupante » du service des urgences adultes du CHU.

« Nous vous demandons de prendre des mesures d’urgences pour faire cesser la mise en danger de nos internes », signent conjointement le Syndicat des internes des hôpitaux de Paris (SIHP) et le Syndicat représentatif parisien des internes de médecine générale (SRP-IMG).

« Je déteste la médecine qu’on pratique là-bas »

Depuis plusieurs semestres, ces internes qui assurent la permanence des soins font part d’une « organisation anarchique » du service. Examens cliniques parfois dans les couloirs, manque de coordination entre soignants, difficulté à localiser les patients… « Les internes font parfois trois ou quatre fois le tour du service pour trouver un patient, sans savoir s’il est sorti, qui l’a pris en charge », relate Leïla Bouzlafa, présidente du SRP-IMG. « Il y a un manque de supervision des dossiers par les chefs, les internes sont laissés complètement livrés à eux-mêmes », ajoute-t-elle. « Nous demandons un recrutement de chefs formés à l’encadrement des internes, pour l’instant ce sont surtout des intérimaires », poursuit-elle. « Tous les jours, je relis les dossiers de la veille pour vérifier que je n’ai pas pu faire une erreur fatale », abonde un interne.

Par manque de personnel formé, les internes doivent parfois brancarder eux-mêmes les patients dans les box. « Je déteste la médecine qu’on pratique là-bas, j’appréhende chaque garde », confie un autre interne.

La situation a été jugée suffisamment grave par le président des internes de l'ISNI pour taper du poing sur la table ce vendredi et réclamer une enquête de l'agence régionale de santé (ARS).

Mise en danger du patient 

Les juniors dénoncent par ailleurs des « conditions déplorables de repos ». Certaines chambres de garde sont situées à côté de machineries bruyantes, « et certains internes préfèrent dormir dans l’escalier », assure Leïla Bouzlafa. D'autres témoignages rapportent un « sentiment d’insécurité voire de mise en danger des patients lors des prises en charge du fait de cette désorganisation ». Les juniors craignent de faire face à « des situations humaines parfois tragiques ».

Les deux syndicats d’internes demandent le retrait de l’agrément de terrain de stage pour ce service. Sa « dangerosité » avait déjà été signalée au cours de la commission d’agrément en mai 2021. « Notre demande a été refusée », regrette Leïla Bouzlafa.


Source : lequotidiendumedecin.fr