Un numéro vert national pour les étudiants en santé, le retour à la fac par petits groupes, l'accompagnement éventuel lors des résultats de partiels, des consultations gratuites chez le psy… Les idées concrètes pour épauler les carabins en souffrance sortent enfin de terre, alors que la jeune génération ne cesse d'envoyer des signaux de détresse.
Il est temps. Dès novembre, l'Association nationale des étudiants en médecine de France (ANEMF) et les autres fédérations de jeunes ont lancé la campagne emblématique #pronosticmentalengagé pour alerter sur les dommages psychologiques de la crise sanitaire mais aussi de la réforme du premier cycle, mal gérée à leurs yeux.
L'isolement prolongé depuis des mois, avec des cours 100 % numériques, couplé au manque d'informations sur les nouvelles filières – parcours spécifique accès santé (PASS) et licence accès santé (LAS) – ont nourri un sentiment d'abandon en première année. Mi-janvier, une étudiante inscrite en PASS à Sorbonne Université a mis fin à ses jours peu après des résultats de premier semestre.
Sensibiliser, alerter et accompagner
Sur le terrain, les promesses tardent à se concrétiser. Annoncé en décembre, le numéro vert national de soutien arrivera « début février ». Il sera rattaché au Centre national d'appui (CNA), dédié à la qualité de vie des étudiants en santé, qui centralisera les appels de détresse. Autre engagement de l'exécutif : le recrutement de 80 psychologues dans les CROUS et des chèques « psy » pour consulter. La semaine dernière encore, Emmanuel Macron a souhaité que tous les étudiants puissent retourner à la fac un jour par semaine et avoir accès à deux repas par jour à un euro.
Pour le Pr Patrice Diot, patron des doyens de médecine, les « signaux sont préoccupants » sur la santé étudiante même si les filières de santé ne sont pas les seules concernées. « Il y a des passages à l'acte, souligne-t-il. Le mal-être existe et les doyens doivent sensibiliser, alerter et accompagner les étudiants ». Le Pr Diot reconnaît que la période est particulièrement anxiogène en première année. « Après avoir passé la fin du lycée à domicile, puis subi une entrée dans les facs avec de nouvelles modalités d'examens dans les études PASS et LAS, pas forcément bien comprises, ils ont du mal à se repérer », détaille-t-il.
Jauge variable
La conférence des doyens de médecine a donc proposé, en écho à l'annonce de la réouverture partielle des universités, un retour à la fac des étudiants de première année par petits groupes. La jauge sera calculée par rapport à la capacité d'accueil des salles. À Tours par exemple, les amphis de 450 à 600 places accueilleront 80 à 100 étudiants. « Ces séances d'enseignements "dirigés" auront un format plus court pour laisser un temps d'échange étudiants/professeurs afin de parler de la situation et renouer du contact humain », précise le Pr Patrice Diot.
D'autres idées sont à l'étude comme un accompagnement humain lors de l'annonce des résultats du concours PASS ou la création d'un « baromètre de vie et de l'ambiance » dans les facultés, permettant de mieux suivre le moral des étudiants.
Cascade de difficultés
Ce regain de mobilisation des tutelles intervient dans un contexte d'exaspération étudiante. Manifs contre la précarité ou pour réclamer le retour en présentiel, sit-in à Saint-Etienne pour l'ouverture de la bibliothèque universitaire (BU)... : les foyers de crise se sont multipliés.
À l'Université de Paris, les jeunes ont créé #MentalBreakup pour dénoncer sur les réseaux sociaux la dégradation de leurs conditions d'études, à la suite de l'annulation de partiels. Plusieurs carabins ont raconté au « Quotidien » la cascade de couacs depuis la fusion précipitée de Paris-Descartes (Paris V) et Paris Diderot (Paris VII) en septembre. Dans une enquête* réalisée par les élus UFR, dont « Le Quotidien » a pris connaissance, 87 % des étudiants estiment que cette mégafusion a eu un impact négatif sur la vie étudiante et 95 % sur la pédagogie. « On a fait remonter que les cours n'étaient pas harmonisés entre les deux anciennes facs, on a une charge de travail extrêmement importante, illustre Arabelle, membre de l'Association des carabins réunifiés parisiens (ACRP). Et faire des conférences zoom de 8h à 19h ce n’est plus possible ! »
*Enquête en ligne auprès de 2 558 étudiants de 2e et 3e cycle début janvier.
Suspension de l’interne de Tours condamné pour agressions sexuelles : décision fin novembre
À Clermont-Ferrand, un internat où « tout part en ruine »
« Pour la coupe du monde, un ami a proposé quatre fois le prix » : le petit business de la revente de gardes
Temps de travail des internes : le gouvernement rappelle à l’ordre les CHU