Quelle est votre réaction suite à l'assignation en justice des Chu par les syndicats d'internes ?
Didier Samuel. Dans cette démarche, il y a un manque de confiance et une agressivité envers les institutions et les services hospitaliers que je regrette. Je ne comprends pas exactement s'ils demandent un respect exact des 48 heures ou s'ils souhaitent une rémunération spécifique de leurs heures supplémentaires. Ce point mérite d'être clarifié. Même s'il est nécessaire de respecter le temps de travail des internes, la conférence des doyens n'est pas favorable à la mesure du temps à la minute près. Cela n'a jamais été fait. Cela serait une dérive si l'on arrivait à une situation de badgeage ou de pointage. Quand on enlève les gardes, les repos de sécurité, certains internes notamment en chirurgie disent ne pas suffisamment avoir accès au bloc et donc ne pas être assez formés aux pratiques de leur spécialité. C'est la même situation pour ceux qui doivent assurer un temps de garde, avec le temps de repos obligatoire. Ce point doit être amélioré.
D. S. Faudrait-il généraliser les tableaux de service aux internes, comme leurs représentants le réclament ?
Didier Samuel. Ils sont déjà constitués à partir de demi-journées pour les titulaires. Mais on ne les fait pas à la minute ni à l'heure près. La problématique des chefs de service est qu'ils ne disposent pas de personnel de gestion pour compter le temps de travail. Pour autant, les temps de repos après les gardes doivent être pris. Le manquement à ces pratiques doit cesser. Ensuite, le temps de formation théorique doit être assuré. Enfin, la question se pose de savoir si l'interne est un médecin ou un étudiant. Ce dernier a une responsabilité médicale. La médecine n'est pas un métier comme un autre. Certains syndicats cultivent ce point d'ambiguïté et considèrent que les services médicaux devraient pouvoir fonctionner sans internes. Ceux-ci ne seraient que des étudiants en formation et dont les services peuvent se passer. C'est faux. Ils font partie du fonctionnement même du service. Nous devons tous ensemble être vigilants dans notre qualité de prise en charge du patient. Nous devons également respecter le repos de sécurité et nous rapprocher du temps de travail de 48 heures.
D. S. Les internes souffrent-ils d'un manque de reconnaissance, notamment en termes de rémunération ?
Didier Samuel. Leur salaire de base est certes trop faible par rapport à leur niveau d'études, leurs compétences, leurs responsabilités et leur représentation dans la société. Le Ségur leur a octroyé une revalorisation qui n'a pas été suffisante.
D. S. Quelle est la responsabilité des chefs de services et des directeurs d'hôpitaux ? Quid de leur formation en management ?
Didier Samuel. Les recommandations données par les directeurs d'hôpitaux à leurs chefs de service sur le temps de travail des internes sont primordiales. Côté management, nombre de directeurs d'établissements sont passés par l'EHESP de Rennes. Les chefs de service sont avant tout des médecins. Certains d'entre eux ont été formés dans des écoles de management en parallèle de leur activité professionnelle. Mais cet aspect n'est pas forcément lié à leur qualité de managers. Organiser un service, c'est complexe. Il faut éviter que tout le monde soit sur le pont en même temps. Certains chefs de service auraient peut-être besoin d'être accompagnés, ce qui souvent n'est pas le cas. Il faut garder le principe selon lequel le travail doit être organisé au mieux pour les patients au sein d'un service. Mais une réflexion sur ce sujet doit être opérée au moment des temps de réunion et de staff. De plus, l'administration hospitalière devrait déléguer une aide administrative plutôt que tout demander au chef de service. En témoigne au sein des urgences le besoin de coordinateur pour aider à la logistique dans la prise en charge des patients. Le personnel paramédical via des infirmiers de coordination ou spécialisés ou IPA, serait à même également de soulager la prise en charge des médecins. Ceux-ci devraient pouvoir plus et mieux déléguer.
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