Les internes de médecine générale travaillent 52 h par semaine en moyenne, plus que la limite légale

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Publié le 14/05/2020
Interne en médecine générale

Interne en médecine générale
Crédit photo : GARO/PHANIE

Le respect du temps de travail des internes est un problème qui ne date pas d’hier, mais qui ne s’arrange pas. Officiellement, depuis un décret de février 2015, les futurs médecins ne doivent pas dépasser la limite de 48 heures hebdomadaires. Mais dans les faits, elle n’a jamais pu être respectée. Et d’après la dernière enquête de l’Intersyndicale nationale des internes (Isni), les choses ne s’améliorent pas. Entre mai et juillet 2019, le syndicat a interrogé les internes de toutes les spécialités sur leur temps et conditions de travail et de formation. Le résultat est sans appel, en moyenne les internes travaillent 58,4 heures par semaine sur leur terrain de stage. Le problème est général puisque selon l’enquête 70 % des internes dépassent le maximum légal. 40 % travaillent plus de 60 heures par semaine et 10 % plus de 79 heures.

La quasi-totalité des spécialités dépassent le cadre réglementaire

Presque toutes les spécialités sont touchées. En médecine générale, les internes travaillent 52,27 heures par semaine. Déjà en 2019, une enquête de l’Intersyndicale des internes en médecine générale (Isnar-IMG) montrait que la moitié des IMG dépassait le temps de travail hebdomadaire réglementaire, particulièrement lorsqu’ils étaient en stage à l’hôpital (64,5 %) et moins en stage ambulatoire (15,3 %). En début d’année, une enquête du Collège national des généralistes enseignants (CNGE) révélait, qu’alors qu’un IMG est censé être huit demi-journées hebdomadaire en stage, ils y passent en réalité 9,54 demi-journées. Encore une fois, cet emploi du temps est plus chargé à l’hôpital (10,44 demi-journées) qu’en ambulatoire (7,88).

L’enquête de l’Isni montre que les spécialités où le temps de travail dérape le plus, sont celles de chirurgie. Les internes y travaillent 70,7 heures en moyenne. Seulement six spécialités parviennent à rester dans la limite des 48 heures légales : biologie médicale, santé publique et médecine sociale, génétique médicale, médecine et santé au travail, psychiatrie et médecine légale et expertises médicales. « Il faut rappeler qu’en France les compensations face au dépassement de cette limite légale, les heures supplémentaires et le repos compensateur, sont deux options aujourd’hui inaccessibles aux internes », souligne Léonard Corti, secrétaire générale de l'Isni. 

Toujours des infractions sur le repos de sécurité

Ce dépassement du temps de travail a également un impact sur le temps de formation, puisqu’une majorité d’internes (51 %) répondent qu’ils ne prennent jamais ou presque jamais leur demi-journée personnelle de formation hors du service. Encore plus inquiétant, le repos de sécurité obligatoire n’est toujours pas respecté. 29 % des internes interrogés expliquent ne pas pouvoir le prendre systématiquement. Une proportion qui augmente puisque dans la dernière enquête de l’Isni sur le sujet en 2012, ils n’étaient « que » 21 % dans ce cas-là.

Face à ce constat alarmant, les solutions avancées par les uns et les autres divergent parfois, mais la principale revendication de l’Isni est claire, le syndicat demande un décompte horaire du temps de travail des internes. « C’est la seule solution pour connaître précisément les excès et les sanctionner », estime Léonard Corti. Sur le sujet des conditions de travail des futurs médecins, Agnès Buzyn à l’époque avait annoncé qu’elle allait demander aux commissions médicales d’établissement (CME) un bilan annuel du temps de travail des internes, une promesse à nouveau formulée par Olivier Véran en février dernier. Mais pour l’Isni, « cette mesure est complètement insuffisante et cela n’en est même pas une. Le problème est que le temps de travail des internes est décompté en demi-journées, donc vous ne pouvez pas déclarer quand vous terminez de manière tardive, idem quand vous travaillez sur un repos de sécurité. Donc le temps de travail des internes est fortement minimisé. À partir du moment où il n’y a pas de décompte fiable, nous ne pourrons rien tirer de ces bilans », explique Justin Breysse, président de l’Isni, qui ajoute que les CME ont un rôle consultatif et donc aucun pouvoir pour agir sur le sujet.


Source : lequotidiendumedecin.fr