Pendant la grossesse

La peur c’est le Covid-19, pas le vaccin !

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Publié le 24/06/2022
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Les femmes enceintes présentent une vulnérabilité particulière vis-à-vis du Covid. Il existe un risque maternel et fœtal. La vaccination anti-Covid a aujourd’hui largement fait les preuves d’efficacité et de bonne tolérance et elle est vivement recommandée quel que soit le stade de la grossesse.
Le risque d’admission en soins intensif est quatre fois supérieur lors d’une grossesse

Le risque d’admission en soins intensif est quatre fois supérieur lors d’une grossesse
Crédit photo : phanie

Le Covid est une maladie potentiellement grave pendant la grossesse. « On s’en doutait depuis le début, car nous savons déjà que toute infection respiratoire est plus grave pendant la grossesse (comme c’est le cas de la grippe). Et, effectivement, cela a été confirmé par de nombreuses études en France et à l’étranger », souligne le Pr Olivier Picone (Colombes), président du Groupe de recherche sur les infections pendant la grossesse (Grig).

Risque d’hospitalisations

Les femmes enceintes ont été reconnues comme groupe à risque de formes graves par le Haut Conseil de la santé publique (HCPS) et la Haute autorité de santé (HAS), avec à la fois un risque augmenté de Covid sévère nécessitant une hospitalisation en unité de soins intensifs et des risques de complications de la grossesse.

En cas de Covid, les femmes enceintes ont quatre fois plus de risque d’être admises en soins intensifs que celles du même âge qui ne sont pas enceintes ; ce risque augmente au fil de la grossesse.

Pour le fœtus, l’infection s’accompagne d’un risque de mort in utero, près de trois fois supérieur, et d’un doublement du nombre de naissances prématurées qu’elles soient spontanées ou induites.

« Il n’y a pas de doute, la maladie est plus grave, même si la plupart des formes sont peu ou pas symptomatiques, le surrisque est réel. Il faut donc prendre des précautions et développer tous les moyens de prévention dont nous disposons : distanciation physique (adaptation des postes de travail pour les femmes enceintes exposées au public), hygiène des mains et, surtout, vaccination… insiste le Pr Picone. Une métaanalyse de référence, parue dans le BMJ, a mis en évidence quatre facteurs de risque de formes graves pour les femmes enceintes : un âge supérieur à 35 ans, un IMC supérieur à 30, une hypertension artérielle chronique et un diabète préexistant. Il n’est pas rare que nos patientes cumulent ces facteurs de risque. »

Sans danger pour le fœtus

La vaccination anti-Sars-CoV-2 est recommandée à toutes les femmes enceintes, quel que soit le terme de la grossesse, y compris au premier trimestre. Les femmes enceintes qui se font vacciner transmettent des anticorps au fœtus, (comme lors de la vaccination contre la grippe ou la coqueluche) qui protègent ainsi le nouveau-né contre le virus dans les premières semaines de vie.

L’ARNm du vaccin est éliminé rapidement et ne peut pas traverser le placenta. Seuls les anticorps produits par le système immunitaire de la mère le traversent.

Au début de la campagne vaccinale, par mesure de précaution, la vaccination a été déconseillée au cours du premier trimestre de la grossesse. En effet, la fausse couche spontanée étant un évènement fréquent en début de grossesse (environ 20 %), le Conseil vaccinal ne souhaitait pas créer de confusion avec la vaccination. « C’était pour éviter que l’on fasse un lien erroné de causalité entre les deux », explique le Pr Picone.

Depuis, les études ont récusé ce lien entre vaccination et fausse couche. Aucune augmentation de fausses couches ou de malformations n’a été constatée par suite de la vaccination.

On bénéficie désormais de beaucoup de recul et les femmes enceintes peuvent se faire vacciner au plus tôt, en particulier si elles présentent des comorbidités (obésité, hypertension, diabète). Elles peuvent aussi se faire vacciner avant la grossesse bien sûr, puisqu’il n’y a aucun impact de la vaccination sur la fertilité (lire p. XX).

Peu de réfractaires

Les données de la pharmacovigilance confirment que la vaccination pendant la grossesse est bien tolérée. L’examen de la littérature scientifique internationale ne montre également aucun risque pour la femme enceinte et le futur enfant.

Les effets secondaires potentiels sont les mêmes que ceux d’une femme non enceinte et du reste de la population : rougeur, douleur au point d’injection, maux de tête, courbatures, fièvre… Les contre-indications sont similaires à celles qui concernent la population générale.

« Les femmes enceintes semblent avoir bien compris l’enjeu. Les réfractaires à la vaccination sont se font de plus en plus rares. Le taux de femmes enceintes n’ayant reçu aucun vaccin contre le Covid-19 était de 25,4 % début mars 2022 contre 31,6 % début janvier 2022 », indique le Pr Picone. Lorsque le schéma initial date de plus de 6 mois, il faut désormais ne pas oublier de conseiller le rappel.

Exergue : Le premier trimestre avait été initialement écarté pour éviter des amalgames avec les fausses couches spontanées

Entretien avec le Pr Olivier Picone, Hôpital Louis-Mourier, Colombes, président du Groupe de recherche sur les infections pendant la grossesse (Grig)

Dr Christine Fallet

Source : lequotidiendumedecin.fr