Médecins, radiopharmaciens, physiciens médicaux, manipulateurs en électroradiologie… Les acteurs de la médecine nucléaire sont formels. Cette discipline est à « un tournant décisif de son histoire » et fait déjà ses preuves, notamment dans le traitement des cancers de la prostate, deuxième cause de mortalité par cancer chez les hommes, après le cancer du poumon.
Comment ? En s’appuyant sur la radiothérapie interne vectorisée (RIV). En substance, cette technique permet de cibler de manière très précise les cellules tumorales grâce à l’administration de médicaments radiopharmaceutiques directement dans l’organisme, dans un but diagnostique ou thérapeutique. Cette double application a donné lieu à la création du néologisme médecine « théranostique », contraction de thérapie et diagnostic. Or, selon une vaste étude réalisée par la Société française de médecine nucléaire (SFMN) et conduite au printemps dans 79 établissements volontaires disposant d’un de ces services, « seuls 40 % des besoins en RIV peuvent être satisfaits au niveau national ». « La RIV reste aujourd’hui limitée à une utilisation en troisième ligne des traitements pour les cancers métastatiques », renchérit Olivier Jérôme, président de Cerhom, association française pour la lutte contre le cancer de l'homme.
Hétérogénéité des capacités régionales
En termes chiffrés, la SFMN évalue le besoin national théorique à 34 200 cures pour les 5 700 patients éligibles à la RIV. Mais, sur les 252 services de médecine nucléaire recensés par l’Autorité de sûreté nucléaire, la France ne dispose que d’une quarantaine de centres en mesure de la délivrer, ce qui représente un total de 13 400 cures. Et même si les capacités de traitement devaient augmenter dans les prochaines années, « les projections montrent qu’elles permettront de couvrir seulement 58,5 % des besoins en 2026 », observe la société savante.
Cette insuffisance de ressources est accentuée par l’hétérogénéité des capacités de traitement entre les régions. Ainsi, l’Île-de-France accuse un écart de 3 450 cures entre la capacité déclarée par les centres et le besoin à couvrir. Les régions Auvergne-Rhône-Alpes, Hauts-de-France et Occitanie, quant à elles, font état d’un écart d’environ 2 500 cures manquantes, poursuit le collectif.
« Un choc d’attractivité » est donc nécessaire pour répondre à ces enjeux, estiment les acteurs du secteur dans un manifeste de 16 propositions rendu public mi-octobre et à destination des décideurs politiques. Ils plaident notamment pour une augmentation du nombre d'internes en formation à au moins 45 en médecine nucléaire (contre une trentaine aujourd’hui), la création du métier de manipulateur en électroradiologie en pratique avancée en radiothérapie interne vectorisée ainsi que du statut de cadre hospitalo-universitaire pour les physiciens médicaux.
Concurrence entre le privé et le public
Le collectif milite également pour le renforcement du maillage territorial en s’appuyant sur une meilleure coordination entre les centres libéraux et les établissements publics et privés grâce aux réseaux régionaux de cancérologie. Au passage, il pointe du doigt la concurrence entre secteur privé et public, au détriment de ce dernier. En cause : les centres libéraux se « concentrant principalement sur des activités de diagnostic », plus lucratives, « tandis que les établissements de santé dispensent la thérapie ». À l’arrivée, les écarts de rémunération en médecine nucléaire sont conséquents. Selon la Drees (ministère), le revenu libéral moyen d’un spécialiste est en 2022 de plus de 250 000 euros par an. Or, rappelle le collectif, son homologue hospitalier empoche moitié moins, soit 112 500 euros brut annuels en fin de carrière.
Enfin, les acteurs de la médecine nucléaire appellent de leurs vœux la création d’une loi de programmation pluriannuelle en santé « intégrant une enveloppe consacrée à l’investissement ». Une manière de donner aux établissements une visibilité financière à long terme et qui permettrait d’accompagner le développement de la médecine nucléaire théranostique. « Les établissements de santé doivent être dotés financièrement pour accueillir ces nouvelles technologies. Le législateur doit permettre aux directions d’hôpitaux de renforcer leur capacité d’investissement à moyen terme », a affirmé Michel Lauzzana, lui-même médecin et député Ensemble pour la République du Lot-et-Garonne, présent à l’occasion de la diffusion du manifeste.
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